La France va-t-elle devenir le “mauvais payeur” de l’Otan ? Dans le sillage de la censure du gouvernement Barnier, Paris risque de ne pas pouvoir tenir ses engagements vis-à-vis de l’Alliance atlantique. Une mauvaise nouvelle à l’heure où Donald Trump, qui a déjà menacé par le passé ses alliés n’honorant pas leurs engagements, s’apprête à revenir aux affaires .
Avant même d’être censuré, le gouvernement avait tiré la sonnette d’alarme. Mardi 3 décembre, le ministre – désormais sortant – des Armées, Sébastien Lecornu, avait prévenu : la censure revient à “prendre le risque de ralentir considérablement notre réarmement, au moment où le reste du monde ne nous attendra pas”. Le ministre avait même sorti sa calculatrice. “La simple reconduction d’un budget 2024 signifie une perte sèche de 3,3 milliards d’euros pour les armées”, et un budget militaire qui “n’atteindrait pas 50 milliards d’euros l’année prochaine”, avait-il détaillé dans une interview publiée sur le site du Parisien.
La crainte d’un “choc de confiance”
Il existe en particulier un risque de “décalage” pour lancer le porte-avions nouvelle génération (Pang) , destiné à succéder au Charles-de-Gaulle. Et “si on retarde la commande du Pang, on pourrait se retrouver avec un certain nombre d’années sans porte-avions”, a-t-il estimé. Sébastien Lecornu a également déclaré craindre “un choc de confiance” qui affecterait l’industrie de défense. “On parle d’économie de guerre depuis deux ans, on demande à ces entreprises de produire plus vite, de faire confiance en notre réarmement. Et là, on va leur dire qu’il n’y aura peut-être pas le budget prévu pour l’année prochaine ?”, s’est-il interrogé.
Il a aussi relevé que l’aide à l’Ukraine face à la Russie pourrait être impactée . “Par définition, si on a un ralentissement des commandes de nouveaux matériels, on aura un ralentissement des livraisons à l’Ukraine”.
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Si la censure du gouvernement et donc du budget 2025 tombe au plus mal pour le soutien à Kiev, c’est aussi le cas pour les relations entre Paris et Washington. En effet, Donald Trump s’en prend régulièrement aux “mauvais payeurs” en Europe , laissant entendre qu’ils ne bénéficieraient plus de la protection américaine s’ils ne payaient pas leurs factures. Certes, ses prédécesseurs à la Maison Blanche ont, eux aussi, dénoncé le manque d’engagement des Européens à leur propre défense, mais de l’aveu même du secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenbeg, le républicain est de loin le plus “franc et direct” dans ses accusations.
Pour répondre à ces critiques, l’Otan s’est fixée en 2014 un objectif : consacrer au moins 2% de son produit intérieur brut (PIB) aux dépenses militaires. Il y a dix ans, seuls trois pays respectaient ce seuil, ils sont aujourd’hui 23 sur 32.
T.G.