Explosions dans des dépôts de munitions [comme en République tchèque], tentatives d’assassinats d’hommes d’affaires liés à l’industrie de l’armement et d’anciens membres des services de renseignement russes, attaques informatiques, câbles sous-marins, approches de satellites, etc. Depuis au moins 2014, la Russie est soupçonnée, voire accusée, d’avoir mené plusieurs opérations relevant de la guerre dite « hybride » en Europe.
Pour rappel, on appelle « guerre hybride » toute action menée sous le seuil de déclenchement d’un conflit et difficilement attribuable en vue d’obtenir un avantage stratégique. Ce qui englobe donc les opérations clandestines [sabotages, assassinats ciblés], l’intimidation militaire, le recours à des groupes armés irréguliers ou bien encore les pressions économiques.
Or, comme en témoigne l’actualité récente, avec les sabotages d’infrastructures critiques dans la région de la Baltique, le nombre d’actions de ce type s’est multiplié depuis le début de la guerre en Ukraine. Et le risque est que l’une d’entre elles finisse par donner lieu à une catastrophe. En tout cas, c’est ce que redoute James Appathurai, le secrétaire général adjoint de l’Otan pour l’innovation, les technologies hybrides et la cybersécurité.
« On compte déjà au moins des dizaines de cas de sabotage. Et puis il y a beaucoup de complots déjoués », a-t-il d’abord relevé, lors d’un entretien accordé à la chaîne de télévision britannique SkyNews, le 29 décembre. Et d’ajouter : « Nous voyons aujourd’hui ce qui aurait été totalement inacceptable il y a cinq ans, mais nous nous y sommes en quelque sorte habitués… Et c’est très dangereux ».
« Ce qui m’inquiète vraiment, […] c’est qu’il existe une réelle probabilité que l’une de ces attaques provoque un nombre important de victimes ou des dommages économiques très importants. Et nous ne voulons pas nous retrouver dans une situation où nous n’avons pas réfléchi à la manière de réagir », a poursuivi M. Appathurai. D’où la mise à jour de la stratégie de l’Otan dans ce domaine, laquelle a été élaborée en 2015, quand la menace n’avait pas atteint le niveau auquel elle est aujourd’hui.
Selon les explications qu’il a données, il s’agit d’éviter d’arriver à un point où l’un des pays membre de l’Otan serait amené à invoquer la clause de défense collective prévue par l’article 5 du Traité de l’Atlantique-Nord.
En effet, en juin 2021, les Alliés avaient décidé que les actions hybrides relèveraient désormais de l’article 5.
« Bien que la réponse à apporter à des menaces hybrides incombe en premier ressort au pays pris pour cible, l’Otan est prête, sur décision du Conseil, à aider un Allié à n’importe quelle étape d’une campagne hybride menée contre lui, notamment en déployant une équipe de soutien pour la lutte contre les pratiques hybrides. […] Dans des cas relevant de la guerre hybride, le Conseil pourrait décider d’invoquer l’article 5 du traité de Washington, comme pour une attaque armée », avaient-il affirmé, dans la déclaration publiée à l’issue d’un sommet qui venait de se tenir à Bruxelles.
« Nous allons jeter de nouvelles bases pour prévenir l’escalade et la gérer lorsqu’elle se produit. Et aussi ְœuvrer à la désescalade, non pas là où nous en sommes aujourd’hui, mais là où nous en étions il y a des années », a expliqué le responsable de l’Otan.
Et de conclure : « Ce que nous [les Alliés] devons faire maintenant, c’est être plus clairs entre nous et ensuite décider comment nous communiquerons également aux Russes qu’il y a des lignes rouges à ne pas franchir ».