Le moment était attendu lors de ce procès autour du meurtre de Patricia Gomit, il est survenu dès le premier jour des débats le lundi 20 janvier 2025 au palais de justice de Niort : la cour d’assises des Deux-Sèvres s’est penchée dans le détail sur la plainte déposée à la gendarmerie par la victime contre l’accusé, Yunus Cosgun.
En ce dimanche 8 mai 2022, cette auxiliaire de vie sociale de 51 ans dénonçait son ancien compagnon pour les violences et même les viols qu’il lui faisait subir régulièrement, sans compter les insultes et les menaces de mort. Une déposition restée sans suite judiciaire.
Un mois plus tard, la quinquagénaire était retrouvée morte, baignant dans une mare de sang, à son domicile du village de Cersay, à Val-en-Vignes : elle présentait de multiples fractures, les lésions ayant été causées par un objet contondant. Principal suspect, son ex-concubin sera interpellé l’après-midi même de la macabre découverte à son retour chez la victime : depuis son box, et comme il le fait depuis le départ, ce ressortissant turc nie. Parfois en s’énervant et en dénigrant la victime.
« Précieuses » déclarations
En fin de journée, la présidente Anne Haye a lu le procès-verbal signé par la défunte. Autant de déclarations « précieuses ». Patricia Gomit y évoquait notamment cet épisode, survenu le samedi 7 mai 2022, où Yunus Cosgun aurait fait mine de la frapper avec un râteau, lui promettant qu’elle allait « crever », que c’était « son soir ». Pourtant, cet homme rencontré alors qu’ils étaient voisins dans les Pyrénées-Atlantiques, elle l’avait quitté, à ses yeux, trois ans plus tôt. Une décision qui n’était pas partagée.
« Il ne veut pas l’entendre, il squatte chez moi, témoignait-elle. Mais j’ai peur de le mettre dehors. Je ne me sens pas bien, j’ai des pensées suicidaires. Je ne vois pas la sortie avec ce type. » Les coups, a-t-elle déclaré, pleuvaient plusieurs fois par semaine, ils lui laissaient parfois « des bleus » : elle gardait ses ongles longs, « une arme d’autodéfense ».

Un mois avant sa mort, Patricia Gomit avait affirmé auprès des gendarmes être victime de violences répétées et même de viols de la part de son ex-concubin.
© (Photo Patricia Gomit, fournie par la famille)
Quant aux relations sexuelles, elle était « obligée » de s’y soumettre : « J’ai déjà regardé sur mon téléphone combien de temps ça durait… » Non, avant l’histoire du râteau, elle n’avait jamais déposé plainte. Sauf que depuis son arrivée dans le Thouarsais, auprès de ses filles issues d’une précédente union, elle se sentait « plus en confiance ». De fait, « je ne veux pas qu’il revienne chez moi ».
Il squatte chez moi mais j’ai peur de le mettre dehors
Patricia Gomit lors de sa déposition à la gendarmeri un mois avant sa mort
La gendarmerie entendra trois voisins et mènera une perquisition, où ils mettront la main sur trois grammes de cannabis. Constat de Me Fabien Arakelian, le conseil des quatre filles et du beau-fils de la victime :
« Je note qu’on a considéré que l’infraction de violences sur conjointe était insuffisamment caractérisée alors que Mme Gomit était venue avec un certificat médical qui émanait du service d’accueil des urgences avec trois jours d’incapacité totale de travail. On a préféré le poursuivre via une ordonnance pénale pour une détention de produits stupéfiants. Chacun appréciera… »

Avec Me Laure Chazerain, Me Fabien Arakelian est le conseil des quatre filles et du beau-fils de Patricia Gomit : en toute fin de journée le lundi 20 janvier 2025, l’accusé s’est montré véhément à son égard.
© (Photo NR)
Par ailleurs substitute du procureur de la République de Niort, l’avocate générale Nina Blanchon a répliqué : « Le parquet, le jour où le compte rendu lui est fait, considère qu’il n’a pas assez d’éléments, ni pour ouvrir une information judiciaire ni pour poursuivre M. Cosgun devant le tribunal. La suite est ce qu’elle est… Il appartient au ministère public d’apporter la preuve de la commission d’une infraction. Ce qui ne veut pas dire que le comportement de M. Cosgun était adapté, ce qui ne veut pas dire que la décision a été la bonne. »
« Tout le monde doit l’entendre »
« Ce n’est pas le procès de la justice, a rebondi l’avocat des parties civiles. Mais il ne faut pas avoir honte de dire qu’il y a eu un trou dans la raquette ! Il n’y a même pas de mesure d’éloignement… Tout le monde doit l’entendre. » Comme tout le monde a écouté la réponse de Yunus Cosgun à cette question du même Me Fabien Arakelian : « Aujourd’hui, vous dites que vous n’avez jamais violé Mme Gomit, que vous n’avez jamais exercé de violences sur elle et que vous n’êtes pas celui qui lui a donné la mort ? » « Oui. »
En garde à vue pour l’affaire du râteau, quand les gendarmes lui avaient demandé s’il accepterait le choix de la victime de se séparer de lui, il avait dit « non ».