“C’est un moment que les Européens et les Ukrainiens redoutaient depuis des mois, voire des années. Mais lorsqu’il est finalement arrivé”, mercredi 12 février, “la soudaineté et la teneur du plan de paix” présenté par Donald Trump “ont laissé les alliés de l’Ukraine sous le choc”, résume l’édition européenne du site Politico.
Dans un appel téléphonique, le président américain et son homologue russe Vladimir Poutine ont convenu de lancer des négociations “immédiates” pour mettre fin à la guerre, une décision qui met “effectivement fin au soutien” des États-Unis à l’Ukraine, souligne le site d’information.
Dans le même temps, à Bruxelles, le ministre américain de la Défense, Pete Hegseth, a jugé “irréaliste” d’envisager un retour de l’Ukraine à ses frontières d’avant 2014, estimé qu’une adhésion de l’Ukraine à l’Otan à l’issue de négociations de paix, n’était “pas réaliste” et insisté sur le fait que les pays européens devaient désormais fournir “la part écrasante” de l’aide à Kiev et assumer leur propre défense.
Seulement “deux acteurs” à la table des négociations
De quoi déclencher un vent de “nervosité à travers le continent” européen, note la BBC.
Car mercredi, “Trump a rejeté d’emblée le mantra européen selon lequel le sort de l’Ukraine ne devrait pas être négocié sans l’Ukraine – et pas sans les Européens”, analyse Die Süddeutsche Zeitung. “Dans l’état actuel des choses, il n’y aura que deux acteurs à la table des réunions annoncées par Trump et Poutine : Trump et Poutine. Le dictateur russe, qui se serait senti tellement humilié et ignoré par l’Occident qu’il a dû envahir son pays voisin, apprécie naturellement cela”, souligne le quotidien bavarois.
“Les diplomates européens” n’ont d’abord pas “semblé pas savoir comment réagir” aux annonces de Washington, remarque Politico. “La vérité brutale est que – au moins au niveau de l’Union européenne – les relations avec la nouvelle Maison-Blanche sont si mauvaises qu’elles sont pratiquement inexistantes”, note le site. La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, n’a d’ailleurs pas immédiatement fait de commentaire.
“L’équivalent diplomatique d’un geste de défiance”
Puis dans la soirée, les chefs des diplomaties de six pays européens et de l’Ukraine ont publié un communiqué commun affirmant que l’Europe et Kiev devaient “participer à toute négociation” sur une résolution du conflit. C’est “l’équivalent diplomatique d’un acte de défiance” pour les Européens qui “ne peuvent pas faire grand-chose pour changer la situation à l’heure actuelle”, note la Süddeutsche Zeitung.
“Nous souhaitons échanger sur la voie à suivre avec nos alliés américains”, indique le texte diffusé à l’issue d’une réunion de deux heures à Paris des chefs de la diplomatie française, allemande, polonaise, italienne, espagnole, britannique et ukrainienne. “L’Ukraine doit bénéficier de solides garanties de sécurité. Une paix juste et durable en Ukraine est une condition nécessaire à une sécurité transatlantique forte”, ajoute le texte, qui rappelle l’engagement des pays européens en faveur de l’“indépendance, la souveraineté et l’intégrité territoriale” de l’Ukraine “face à l’agression russe”.
Mais les États-Unis ont montré mercredi qu’ils étaient “pressés de lâcher le vieux continent”, analyse Le Soir. Pour le quotidien bruxellois, “la charge américaine signée Trump n’arrive pas comme une surprise totale. Les Européens eux-mêmes ont depuis longtemps convenu qu’ils devaient en faire davantage pour leur défense et tenter un début d’émancipation”.