Le lien transatlantique se délite un peu plus. Après l’annonce par le président Trump et son administration de nouveaux droits de douane, puis les propos du vice-président JD Vance sur une supposée baisse de la liberté d’expression en Europe, la guerre en Ukraine devient, comme redouté, un nouveau sujet de tensions entre les alliés.

Présent à la Conférence de Munich (Allemagne) sur la sécurité, l’émissaire spécial de Donald Trump sur l’Ukraine a clairement dit que l’Union européenne sera tenue à l’écart des discussions à venir sur la guerre en cours sur son continent. Interrogé sur une éventuelle présence européenne, Keith Kellogg a répondu sans détour, selon des propos rapportés notamment par l’agence Reuters. « Je viens de l’école du réalisme et je pense que cela ne se produira pas. » Un peu plus tard, il a toutefois tempéré son propos, sans rien renier sur le fond : « Cela ne veut pas dire que les intérêts européens ne seront pas pris en compte ou mis en avant. »

Il a justifié ce choix par un précédent. Comme le rapporte Le Monde, il a rappelé les accords de Minsk II de 2015, intervenus après l’invasion de l’est des régions les plus orientales de l’Ukraine par la Russie en 2014. Allemagne et France étaient des parties prenantes de l’accord aux côtés de l’Ukraine et de la Russie. « Il y avait beaucoup de monde, mais cela n’a pas fonctionné », a déclaré Kellogg.

Appel Trump-Poutine

Cette prise de position américaine a rapidement provoqué un certain nombre de réactions comme celle du président finlandais Alexander Stubb : « Il n’est pas possible d’avoir des discussions sur l’Ukraine, le futur de l’Ukraine et l’organisation de la sécurité européenne sans les Européens. »

VidéoGuerre en Ukraine : Zelensky appelle l’Europe à « agir pour son propre bien » face à la Russie

Les discussions entre la Russie, qui a envahi l’Ukraine depuis près de trois ans, et les États-Unis, principal soutien financier et militaire de ce pays de l’est de l’Europe, ont déjà commencé. Donald Trump et son homologue russe, Vladimir Poutine, ont échangé au téléphone dans la semaine. Il s’agit d’une première à ce niveau de responsabilités depuis le début du conflit le 24 février 2022. Trump assure que les deux dirigeants se sont mis d’accord pour « travailler ensemble de manière très étroite » et pour se rencontrer prochainement. Européens et Ukrainiens n’ont pas été consultés au préalable.

« Le moment est venu de créer les forces armées de l’Europe »

Afin de renforcer l’indépendance de l’Europe, qui bénéficie du bouclier américain depuis la fin de la Deuxième Guerre mondiale (1939-1945) par l’intermédiaire de l’Otan (Organisation du traité de l’Atlantique Nord) et pour offrir des garanties de sécurité à l’Ukraine, le président ukrainien, Volodymyr Zelensky, a estimé samedi, à Munich, que « le moment est venu de créer les forces armées de l’Europe ».

« Le temps où l’Amérique soutenait l’Europe simplement parce qu’elle l’avait toujours fait est révolu. » Face au risque d’être marginalisés, « je vous exhorte à agir, pour votre propre bien ». Il ne faut « pas de décisions sur l’Ukraine sans l’Ukraine, pas de décisions sur l’Europe sans l’Europe », car « si nous sommes exclus des négociations concernant notre propre avenir, alors nous perdons tous », a-t-il ajouté.

Dans ce contexte, le président français, Emmanuel Macron, pourrait convier des dirigeants européens à une réunion lundi, à Paris, a fait savoir la Pologne. La France n’a pas confirmé la tenue de ce sommet. Le chef de l’Otan, Mark Rutte, a confirmé sa présence. Les Européens doivent montrer leur « utilité » s’ils veulent peser, a-t-il fait valoir auprès de l’AFP (Agence France presse).

Côté américain, le chef de la diplomatie, Marco Rubio, en tournée au Moyen-Orient jusqu’à mardi, et d’autres hauts responsables de l’administration, vont rencontrer en Arabie saoudite des négociateurs russes et ukrainiens, ont fait savoir samedi les autorités américaines.