Si la nouvelle équipe s’affiche parmi les pays soutenant l’Ukraine, elle a toutefois été vite rattrapée par la réalité. Le 17 février, dans le sillage des déclarations américaines qui ont sidéré les autres dirigeants occidentaux, le président français Emmanuel Macron a organisé une réunion d’urgence avec les principaux pays européens impliqués dans ce conflit. La Belgique n’était pas invitée. Elle a eu droit à la deuxième réunion avec d’autres Etats deux jours plus tard.
L’accord de majorité conclu fin janvier n’élude pas le conflit et s’inscrit dans la continuité de l’exécutif précédent.
Livraison de F-16
“Nous continuons à soutenir l’Ukraine dans sa lutte contre l’agression russe”, assure le texte. Le principe est posé mais des questions demeurent.
Dans le domaine militaire, la nouvelle majorité s’engage à poursuivre la formation et la fourniture de “matériel”, notamment la livraison d’ici la fin de l’année des premiers F-16 appelé à être retirés du service. Selon un accord de défense conclu avec l’Ukraine l’an dernier, la Belgique fournira trente de ces appareils d’ici 2028.
Autre domaine important dans lequel la Belgique est en première ligne: les sanctions internationales. “Nous maintenons et renforçons des sanctions ciblées et efficaces contre la Russie”, dit l’accord de gouvernement en se montrant évasif sur la nature de celles-ci. Une grande partie du gaz liquéfié venant de Russie transite par le port de Zeebrugge. L’accord ne l’évoque pas directement, pas plus que les sanctions financières. La Belgique abrite la société Euroclear, pivot de la finance internationale où sont logés les actifs russes gelés ou immobilisés. Selon les dernières estimations du SPF Finances, il est question de 258 milliards d’euros.
Comme son prédécesseur, le nouveau gouvernement marche sur des œufs. Certains pays, à commencer par l’Ukraine, réclament la confiscation pure et simple de ces actifs. La Belgique, comme d’autres Etats européens, s’y oppose pour des raisons de sécurité juridique et de stabilité financière. Financièrement, elle s’expose à des risques considérables. Elle n’entend pas assumer seule cette charge. L’accord de gouvernement plaide pour “une mutualisation du risque de recours devant un tribunal arbitral international, sur la base du principe de proportionnalité”.
L’attachement à l’Alliance atlantique est réaffirmé par l’Arizona. La Défense sera en première ligne de l’attention politique durant les quatre années à venir. Comme d’autres pays européens, la Belgique est à la traîne pour remplir ses engagements en termes de dépenses. En 2014, elle a souscrit à l’objectif de 2% du PIB affecté à la Défense. Elle ne situe qu’à 1,3% dix ans plus tard. Le nouveau gouvernement entend atteindre 2% d’ici 2029 et 2,5% d’ici 2034. Un engagement budgétaire significatif mais qui pourrait être déjà dépassé par les contraintes internationales. Il est question désormais parmi les pays de l’Otan de 3% voire de 5% du PIB. Le Premier ministre a averti les députés jeudi: la “situation géopolitique” pourrait amener la nouvelle équipe à procéder à des “adaptations”.
La Belgique est contrainte tout à la fois à redresser ses finances publiques en mauvais état, accroître ses dépenses militaires et, au-delà des mots, dégager les moyens financiers nécessaires au soutien à l’Ukraine. Sur le plan militaire, le gouvernement De Croo y avait consacré 1,21 milliard d’euros et s’était appuyé sur le produit de l’impôt des sociétés prélevé chez Euroclear et relatif aux avoirs gelés. Un fonds d’1,7 milliard d’euros avait été constitué. L’Arizona n’a pas confirmé pour l’instant qu’elle poursuivrait cette voie.