« C’est un moment de vérité nationale pour savoir qui pense quoi et qui veut quoi sur ses sujets. » À quelques minutes des prises de parole, le député MoDem du Finistère, Erwan Balanant, résume l’enjeu des échanges engagés, ce lundi, à l’Assemblée nationale, sur la situation en Ukraine et la sécurité en Europe. Un moment permis par l’article 50-1 de la Constitution qui donne au gouvernement la possibilité de faire une déclaration, suivie d’un débat et, éventuellement, un vote.
Pas de vote, cette fois-ci, mais c’est pour la majorité relative du bloc central une bonne occasion – en tout cas espère-t-elle – de mettre en difficulté les deux extrêmes de l’Hémicycle : le Rassemblement national et La France Insoumise. Car s’agissant du conflit ukrainien et de la situation internationale, les deux partis jouent aux équilibristes. Entre un RN, bénéficiaire en 2014 de prêts bancaires moscovites, à qui ses opposants collent une étiquette pro-russe. Et des Insoumis dont l’antiaméricanisme primaire est, désormais, contrarié par l’alliance poutino-trumpienne.
« Nous, les Européens, sommes plus forts que nous le croyons »
C’est en présence du président du Parlement estonien et de l’ambassadeur d’Ukraine en France que François Bayrou ouvre les débats. Dans un ton grave, le Palois explique, une demi-heure durant, la position de la France avec quelques formules ciselées. Par exemple, lorsqu’il rappelle que le basculement de l’Histoire, daté du moment où les troupes de Poutine envahissent l’Ukraine, le 24 février 2022, est le fruit d’un « chef de meute » venu « arracher l’humanité à sa naturelle inhumanité » et libérant « les démons endormis. »
Pointant dans un Hémicycle clairsemé « l’esprit de domination, l’impérialisme et le culte de la force », François Bayrou n’épargne pas non plus Donald Trump, qui engage l’Europe dans une guerre commerciale. « On veut nous cerner, nous assujettir pour nous plier à la loi du plus fort et cela de la part de nos alliés. » Autant d’arguments qui, selon le locataire de Matignon, valident la stratégie d’Emmanuel Macron quand, dès 2017, il engageait la France dans un renforcement de ses capacités militaires et appelait à plus d’autonomie en matière de Défense européenne. « La France avait raison », insiste Bayrou. « Nous, les Européens, sommes plus forts que nous le croyons. »
Proximité du RN et de LFI
Le discours martial du Premier ministre tranche avec la position développée, un peu plus tard, par Marine Le Pen. « Il est incontestable que nous devons soutenir l’Ukraine mais nous devons le faire avec réalisme plus qu’avec des coups de menton dépourvus d’effets », explique la patronne des députés RN, fustigeant, au passage, les « virevoltes du président de la République » sur le terrain diplomatique. Le Pen appelle, elle, de ses vœux à « une conférence pour la paix sans les instances supra nationales ». C’est-à-dire excluant l’Otan et l’Union européenne.
Une position qui se rapproche finalement de celle des Insoumis. Dénonçant les « gesticulations sans effet depuis trois ans » d’Emmanuel Macron qui a, selon lui, « saboté l’appareil diplomatique », le député LFI Aurélien Saintoul fustige, pour sa part, une majorité incapable « de créer un lieu de discussion où les belligérants pourraient se retrouver. »