Après avoir coupé, dimanche dernier, l’aide humanitaire à Gaza, Israël a ordonné dimanche l’arrêt total de son approvisionnement en électricité, coupant la dernière source d’énergie encore reliée au réseau israélien. Il s’agit là “d’une tentative d’accroître la pression sur le Hamas dans un contexte de négociations de plus en plus chaotiques sur le fragile cessez-le-feu dans le territoire”, analyse The Guardian.

“J’ai signé un ordre pour l’arrêt immédiat de l’électricité dans la bande de Gaza”, a annoncé le ministre israélien de l’Énergie, Eli Cohen, dans une courte vidéo, citée par The Times of Israel. “Nous allons utiliser tous les outils à notre disposition pour ramener tous les otages et assurer que le Hamas ne soit plus à Gaza le jour d’après” la guerre, a-t-il ajouté, alors qu’Israël et le mouvement islamiste palestinien s’accusent mutuellement de violer l’accord de trêve entré en vigueur le 19 janvier.

L’ancien ministre israélien d’extrême droite Itamar Ben Gvir réclame quant à lui des mesures encore plus drastiques, appelant le gouvernement à interdire toute entrée de carburant dans l’enclave et à frapper les réservoirs de fuel ainsi que les générateurs utilisés par le Hamas, rapporte The Jerusalem Post. “Gaza doit être plongée dans le noir total tant qu’il reste un seul otage israélien”, a-t-il déclaré sur X.

Une station d’épuration affectée

Le Hamas a de son côté minimisé l’impact de cette décision, rappelant que Gaza était déjà plongée dans le noir depuis des mois. Son porte-parole, Hazem Qassem, a cependant dénoncé auprès de l’AFP une “politique de famine” visant à intensifier la guerre contre les civils, en violation du droit international.

Depuis qu’Israël a lancé sa guerre contre le Hamas à Gaza en réponse aux attaques du 7 octobre, les Gazaouis dépendent largement des générateurs et de l’énergie solaire pour leur production d’électricité. Or le carburant pour ces équipements est lui aussi rationné par Israël, qui accuse le Hamas d’en détourner une partie pour ses infrastructures militaires et le lancement de roquettes.

Et avant même la guerre, en raison du blocus israélo-égyptien en place depuis plus d’une décennie, l’approvisionnement en électricité était déjà réduit à son strict minimum, “ne fournissant que quelques heures d’électricité par jour”, explique le New York Times. La coupure de dimanche a donc principalement affecté une station de traitement des eaux usées qui avait “brièvement été reconnectée au réseau israélien ces dernières semaines”, précise le quotidien américain.

La situation humanitaire aggravée

La suspension de l’aide humanitaire début mars a aggravé la crise dans l’enclave. “Les habitants de Gaza ont du mal à se procurer du pain et des produits de première nécessité alors que le blocus total imposé par Israël a forcé la fermeture de plusieurs boulangeries et magasins”, relate la reporter d’Al-Jazeera, sur place. “De nombreux Gazaouis ne peuvent plus rien acheter et la majeure partie de la population dépend de l’aide alimentaire”, a-t-elle ajouté.

Cette stratégie israélienne vise à contraindre le Hamas à accepter une prolongation de l’échange d’otages et de prisonniers, sans pour autant s’engager sur un cessez-le-feu permanent. Le Hamas exige, lui, de passer à la deuxième phase de l’accord, qui inclue des négociations visant à mettre fin définitivement à la guerre, “comme convenu initialement par les deux parties” insiste la chaîne qatarie.

Selon elle, le refus d’Israël d’entrer dans cette deuxième phase “montre sa réticence à retirer ses troupes du corridor de Philadelphie”, une étroite bande de terre qui sépare Gaza de l’Égypte.

“Donner une chance aux négociations”

Alors que les tensions restent vives, des négociations se poursuivent pour tenter de prolonger la trêve en cours. Une délégation du Hamas est arrivée vendredi au Caire, tandis qu’Israël a accepté une invitation des médiateurs américains et qataris pour discuter à Doha ce lundi.

Washington se montre de son côté prudemment “optimiste”, fait savoir CNN. Adam Boehler, l’envoyé spécial américain pour les otages, a affirmé dimanche à la chaîne info qu’un accord était envisageable “dans les prochaines semaines”, permettant la libération de tous les prisonniers restants, y compris les cinq otages israélo-américains encore retenus à Gaza.

D’après le bureau du Premier ministre israélien, 59 otages seraient toujours détenus à Gaza, dont plus de la moitié seraient morts. Une source israélienne a déclaré à CNN qu’Israël “donnait une chance aux négociations” avant de reprendre les combats à Gaza.