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Les discussions sur la guerre en Ukraine ont lieu en Arabie saoudite, voici pourquoi (Photo de Volodymyr Zelensky et Mohammed Ben Salmane en juin 2024)
INTERNATIONAL – L’Arabie saoudite, la grande négociatrice. Volodymyr Zelensky, arrivé lundi à Riyad, va reprendre les discussions avec Washington sur la guerre en Ukraine, ce mardi 11 mars. Un moment qu’il doit appréhender alors qu’il s’agit du premier rendez-vous entre Ukrainiens et Américains, dix jours après le fiasco de son entretien avec Donald Trump à la Maison-Blanche.
Les échanges devraient se concentrer sur un accord bilatéral sur les minerais, convoités par les États-Unis, et sur la manière de mettre fin à la guerre avec Moscou, selon Reuters. L’émissaire américain pour le Moyen-Orient, Steve Witkoff, a déclaré qu’ils doivent servir à « définir un cadre pour un accord de paix et un cessez-le-feu initial » entre la Russie et l’Ukraine.
Entre les trois acteurs, l’Arabie saoudite, hôte de cette rencontre, fait office de négociatrice impartiale. Et elle n’a évidemment pas été choisie au hasard.
Relations stratégiques pour maintenir la paix
Ce sont les États-Unis qui ont en effet décidé du point de chute de ces discussions. Selon TF1 News, Donald Trump ne voulait pas qu’elles se déroulent sur le sol européen afin de ne pas être « sous l’influence et les exigences des membres de l’Union européenne » qui soutiennent l’Ukraine.
Un territoire neutre pour des négociations serrées, et un environnement « relativement privé », note l’agence Associated Press, qui évoque la réunion de trois facteurs : un gouvernement autocratique, la complaisance des médias et l’éloignement de la guerre. La meilleure recette pour engager sereinement des pourparlers.
Malgré son bilan très controversé en matière de droits humains, le royaume s’est en effet forgé un rôle de médiateur dans les conflits internationaux. Il faut dire qu’en tant que premier producteur mondial de pétrole, la stabilité mondiale lui tient à cœur ; car qui dit guerres et sanctions, dit marchés perturbés. Et ça, ce n’est pas bon pour les affaires.
Ainsi, depuis son arrivée sur le trône, le prince héritier Mohammed ben Salmane a réussi à tisser des relations stratégiques telles qu’il se tient désormais entre les États-Unis, la Russie, l’Ukraine et la Chine, aux côtés de chacun d’entre eux.
Gagner son statut de « champion de la paix »…
C’est grâce à cette position privilégiée qu’elle a pu notamment permettre les échanges de prisonniers russes et ukrainiens. En septembre 2022, elle avait aussi joué un rôle clé dans la libération d’une dizaine de prisonniers étrangers capturés en Ukraine. Parmi eux, des ressortissants des États-Unis et du Royaume-Uni.
Le prince, surnommé MBS, a également réussi à apaiser les relations avec l’Iran, rétablissant leurs relations diplomatiques et commerciales. Il a aussi participé aux négociations sur les guerres au Soudan et dans la bande de Gaza, souligne Associated Press, qui ajoute qu’ainsi, grâce à ces manœuvres habiles, il a pu affirmer le rôle de « leader du monde musulman sunnite et force dominante au Moyen-Orient. »
Renforçant son assise diplomatique, le prince héritier a prouvé son efficacité à jouer les intermédiaires dans des conflits internationaux particulièrement épineux, avec de gros enjeux à la clé. Le tout en usant de dialogues et de solutions diplomatiques, et non des réponses punitives, comme peuvent en assener les États-Unis. L’objectif : être considérée comme un « champion de la paix », selon RFI.
…Mais pas dans son propre royaume
Le média rappelle par ailleurs qu’il est tout dans l’intérêt de Trump de maintenir Riyad dans les boucles diplomatiques, car ils peuvent ainsi continuer à avancer sur un autre volet important : les accords d’Abraham, négociés par Washington et qui visent à normaliser les relations entre Israël et les États arabes.
L’Arabie saoudite, garante de la paix, mais dont la réputation à l’internationale reste sérieusement entachée par la mort brutale du journaliste Jamal Khashoggi à l’intérieur du consulat saoudien à Istanbul en 2018. Un assassinat attribué à des agents saoudiens et qui aurait été ordonnée par le prince héritier. Ce que Riyad continue de nier.
Reste également que le régime est épinglé pour ses violations des droits humains, notamment ceux des femmes et des dissidents politiques. La paix oui, mais ailleurs.
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