Depuis quelques années, le football belge est confronté à une tendance préoccupante : de nombreux joueurs binationaux belgo-marocains choisissent de représenter l’équipe nationale du Maroc plutôt que les Diables Rouges. Ce phénomène, qui s’accentue, soulève des questions fondamentales sur la fidélité nationale, l’intégration et les dérives d’un multiculturalisme mal assumé par les instances sportives.

Le cas récent de Chemsdine Talbi, jeune talent du Club Bruges, illustre parfaitement cette problématique. Après avoir bénéficié de la formation et des infrastructures belges, après avoir porté les couleurs nationales de la Belgique des U15 aux U18, Talbi a choisi de tourner le dos à son pays de naissance pour rejoindre les Lions de l’Atlas. Une décision vécue comme une trahison par certains responsables sportifs belges, et qui a provoqué une onde de choc au sein de la Fédération. Le directeur technique national a exprimé une vive inquiétude, exhortant les jeunes joueurs à ne pas instrumentaliser le maillot belge comme un simple tremplin.

Ce choix de rupture n’est pas isolé. D’autres profils prometteurs, comme Selim Amallah, ont pris le même chemin, préférant représenter le Maroc malgré les opportunités offertes par la Belgique. Si le discours dominant évoque un « choix du cœur » pour ces jeunes binationaux, c’est souvent en réalité un mélange d’attachement culturel et de stratégie opportuniste qui les pousse à changer de drapeau.

Dans le même temps, la Fédération marocaine multiplie les efforts pour attirer ces profils formés en Europe. La reconnaissance affichée, le soutien logistique, et une attention personnalisée sont des leviers qui séduisent des joueurs parfois frustrés par le manque de reconnaissance en Belgique. Le père de Chemsdine Talbi a ainsi dénoncé l’indifférence des responsables belges lors de la blessure de son fils, quand la Fédération marocaine, elle, n’a cessé de le soutenir.

Face à ce phénomène, la Belgique semble enfin réagir. Le directeur technique national a annoncé que seuls les joueurs exprimant une loyauté claire et sans ambiguïté envers la Belgique seraient désormais sélectionnés dans les équipes de jeunes. Une mesure de bon sens pour endiguer ces départs, qui nuisent à la cohésion et à l’image de l’équipe nationale.

Ce phénomène révèle surtout une problématique plus large : celle de l’intégration réelle des jeunes issus de l’immigration, et du rapport qu’ils entretiennent à leur pays d’accueil. La question dépasse le cadre du football : elle touche à la transmission des valeurs, à l’identité nationale, et à la capacité de la Belgique à exiger, comme tout pays, fidélité et engagement de la part de ceux qui aspirent à porter ses couleurs. Il est temps, pour les instances sportives comme pour les responsables politiques, de cesser de fermer les yeux sur ces abandons silencieux et d’imposer un cap clair sur la loyauté nationale.

Cette remise en question de la cohésion nationale est d’autant plus sensible dans un pays comme la Belgique, qui connaît déjà des divisions internes. La coexistence entre Flamands et Wallons repose sur un équilibre précaire. La Flandre, plus prospère et ancrée à droite, affiche régulièrement des velléités d’indépendance, tandis que la Wallonie, plombée depuis des décennies par une gestion socialiste, accumule les difficultés économiques et doit faire face à une immigration extra-européenne croissante. Dans un tel contexte, le football n’est qu’un révélateur supplémentaire d’un pays en mal de cohérence et d’unité nationale.

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