On a souvent le sentiment que le Luxembourg parvient toujours à se glisser entre les différentes crises, telle une anguille entre les mains. Bien plus en tout cas que ses grands voisins français, belges ou allemands, qui semblent toujours englués dans l’une ou l’autre de ces crises. Voilà une idée reçue que la Fondation IDEA a mise à mal ce jeudi lors de sa présentation de la onzième édition de son avis annuel.
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«En 2024, l’économie luxembourgeoise a renoué avec la croissance (de l’ordre de +1%). Mais cette reprise économique est largement insuffisante pour dépasser les deux très mauvaises années que nous avons vécues en 2022 et 2023» avance Vincent Hein, le directeur de ce think tank regroupant quelques-un des plus brillants économistes du pays.
Des investissements en baisse
Et selon l’analyse faite par IDEA, c’est principalement le conflit en Ukraine qui est en cause. «Le pays a été plus fortement impacté par la crise qui a suivi l’invasion de l’Ukraine par la Russie, que par la pandémie de covid qui avait précédé.»
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La dynamique d’investissement en a été très affectée (une baisse de 22% sur 3 ans). Et notamment les investissements dans le secteur immobilier «dont on se rend de plus en plus compte qu’il pèse énormément sur la dynamique de l’économie luxembourgeoise» selon Vincent Hein. Ce dernier a ainsi évoqué «un trou dans l’investissement immobilier de l’ordre de plus de 11 milliards d’euros». Avant d’ajouter que le commerce et les activités financières étaient également en léger repli en 2024.
Les plans de soutien publics
L’autre point d’inquiétude, ce sont les exportations des biens et services qui ont tendance à tousser (depuis 2020), «alors qu’ils ont été, par le passé, un des principaux moteurs de la croissance luxembourgeoise.»
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D’autres moteurs ont, heureusement, pris le relais, à l’image de la consommation des ménages. Et puis, il y a surtout les plans de soutien publics qui ont eu un grand rôle ces dernières années. «Pour vous donner une idée, en 2023 avec notamment les différents ‘Solidaritéitspak’, ils ont représenté un total de 1,2 milliard d’euros, soit 1,5% du PIB. C’est considérable» lançait Vincent Hein. «L’économie luxembourgeoise a été fortement soutenue par les dépenses publiques. Mais cela ne pourra pas continuer éternellement…»
Un marché de l’emploi au ralenti
Quant au marché du travail, il est «logiquement impacté par cette phase de ralentissement», ajoute Ioana Pop, économiste de la Fondation IDEA. Cette dernière relève ainsi que la création d’emplois a atteint «son plus bas niveau depuis la crise financière de 2009, avec une hausse de 1,1% en 2024.»
Le secteur marchand n’a créé que 1.300 emplois, contre 4.450 au non-marchand (soit 77,4% des emplois). Et, sans surprise, le domaine de la construction a, lui, largement souffert avec 2.475 emplois créés en moins en 2024.
«La période d’âge d’or de la croissance luxembourgeoise est certainement derrière nous. Au moins pour les cinq années à venir…» conclut Vincent Hein. Dans la lignée donc de ces dernières années. Puisque depuis 2020, Luxembourg évolue globalement autour de 1% de croissance. Là où il volait à 4 ou 5% avant la crise financière de 2008. Un temps qui paraît aujourd’hui bien loin…