Lundi, des étoiles pleuvaient sur le Luxembourg et la Belgique, plus précisément sur de nombreux restaurateurs récompensés par le célèbre guide Michelin pour leur cuisine. Quatre nouvelles étoiles brillent désormais au Luxembourg: chez Clovis Degrave du «Grünewald Chef’s Table» dans la capitale, chez Archibald De Prince et son restaurant du même nom à Lauterborn ainsi que chez René Mathieu du «Fields by René Mathieu». Louis Linster peut quant à lui se réjouir d’avoir obtenu une deuxième étoile Michelin pour son restaurant «Léa Linster» à Frisange.
Le lendemain de la remise des prix à Anvers, en Belgique, le Luxemburger Wort a contacté par téléphone le nouveau détenteur d’une étoile, Archibald De Prince. Ce Belge d’origine, qui vit au Grand-Duché depuis qu’il a un an, n’est pas encore rentré chez lui. Il se rend d’abord en Champagne, où il veut tester et sélectionner des vins pour son restaurant.
Il a ouvert ce dernier avec sa femme Rachel il y a six mois seulement. Il ne s’attendait donc pas à obtenir si vite sa propre étoile Michelin -, et c’est pour lui un rêve devenu réalité. En effet, lorsqu’Archibald De Prince a commencé sa carrière dans la gastronomie à l’âge de 14 ans, il rêvait déjà d’entrer dans la classe des chefs célèbres comme Paul Bocuse, Michel Troisgros, Georges Blanc ou Marc Veyrat.
Le stress qui accompagnera sa nouvelle distinction n’est pas un problème pour Archibald De Prince : «Je vais continuer comme avant l’étoile». © PHOTO: Anouk Antony
Le chef ne peut pas encore estimer dans quelle mesure sa nouvelle plaque à côté de la porte du restaurant va changer les choses. Mais il espère que la clientèle s’élargira et qu’il attirera peut-être même des clients prêts à faire 50 ou 100 kilomètres pour déguster ses plats. Car comme on le dit si bien, un restaurant avec une étoile vaut un arrêt, un restaurant avec deux étoiles vaut un détour et un établissement avec trois étoiles Michelin vaut même tout un voyage.
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Pour Archibald De Prince, le stress fait partie intégrante du travail de chef de cuisine. Il n’a donc pas peur d’une pression croissante. Et à la question de savoir s’il rendrait un jour volontairement son étoile à cause de cette même pression de la perfection, il répond par la négative avec véhémence.
«J’ai travaillé pendant huit ans comme sous-chef pour René Mathieu à la Distillerie, c’était stressant tous les jours. Mais le stress n’est pas un problème, je vais continuer comme avant l’étoile.» Concrètement, cela signifie pour lui de toujours donner le meilleur de lui-même pour les clients, et aussi pour ses collaborateurs en cuisine.
Clovis Degrave, qui gère pas moins de trois restaurants au Grand-Duché, suit une philosophie similaire. Tout comme Archibald De Prince, il s’attend à une pression accrue, mais considère cela comme un phénomène normal dans son domaine professionnel. Mais quand nous l’avons joint, il ne semblait pas être sous pression, car en train de prendre son petit-déjeuner – de préférence un très bon croissant, en bon français qu’il est. Il lui reste même du temps pour un cappuccino avec Louis Linster et sa femme, qui ont séjourné dans le même hôtel à Anvers.
Clovis Degrave (à gauche), ici avec le sous-chef Kevin Gismondi, se réjouit de la distinction reçue par son établissement de fine cuisine, car il accorde une grande importance aux produits, au personnel et au service. © PHOTO: Gerry Huberty
Clovis Degrave ne s’attendait pas non plus à décrocher une étoile, et était donc nerveux lors de la remise des prix lundi : «Au total, 13 restaurants ont été récompensés par une étoile, et nous étions l’un des derniers restaurants à l’être. Et quand tu gères un restaurant à Luxembourg-Ville et que tu le vois sur le grand écran, c’est vraiment cool», raconte-t-il.
L’étoile ne lui a été décernée ni pour la «Maison B» ni pour l’«Hostellerie du Grünewald», mais pour son établissement de fine dining «Grünewald Chef’s Table». Dans le domaine du fine dining, on attache une importance particulière aux produits et à leur origine, au personnel et au service. On ne fait évidemment pas cela pour une étoile, rit Clovis Degrave, mais quand on l’obtient, c’est d’autant plus formidable – pas seulement pour sa partenaire Aline Bourscheid et lui, mais pour toute l’équipe.
Une mise à niveau après 38 ans
Si le restaurant «Léa Linster» a officiellement reçu une deuxième distinction, c’est la première pour le chef Louis Linster. Dès qu’il a repris le restaurant de sa mère Léa Linster en 2019, il s’est fixé comme objectif de décrocher la prestigieuse distinction. «Nous avons une étoile depuis 38 ans, j’ai grandi avec», explique Louis Linster. Il se réjouit donc tout particulièrement de ce deuxième macaron, qu’il a mérité, notamment parce que son équipe et lui ont travaillé dur pour l’obtenir.
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Louis Linster considère cette distinction avant tout comme un soulagement, qui souligne qu’il est sur la bonne voie et qu’il se réjouit de l’avenir. Il ne peut pas encore dire si cela augmentera la pression de devoir toujours fournir les meilleurs résultats: «Nous devons d’abord faire face à la grande demande de réservations», dit-il. Et d’ajouter: «Nous verrons bien si les attentes des clients sont encore plus élevées. Mais nous sommes en tout cas prêts à le faire».
Le plus gros problème actuel de Louis Linster est de faire face à la forte demande de réservations. Les attentes des clients vont-elles augmenter avec la deuxième étoile ? © PHOTO: Guy Jallay
Pendant presque aussi longtemps que sa consoeur Léa Linster, c’est-à-dire pendant 37 ans, René Mathieu a eu une étoile Michelin pour «La Distillerie» à Burglinster. Celle-ci a été fermée en octobre, ce qui a entraîné la perte de l’étoile. Mais avec l’ouverture du nouveau restaurant «Fields» à la mi-janvier 2025, il a été facile pour le chef de récupérer la distinction du Guide Michelin.
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En plus d’une étoile rouge, Mathieu a dû se réjouir peut-être encore un peu plus d’une deuxième étoile verte, qu’il a été le seul à recevoir au Luxembourg pour son engagement dans le domaine de la durabilité. «C’est un peu mon étoile, si l’on peut dire. Cela correspond évidemment beaucoup à ma cuisine, à ma philosophie et à mes efforts pour protéger la planète».
C’est un peu mon étoile, si l’on peut dire.
René Mathieu
Ce que cela signifie concrètement? René Mathieu et son équipe de cuisine essaient de gaspiller le moins d’énergie possible – que ce soit en cuisinant ou en entretenant les locaux – et d’utiliser exclusivement des produits issus de la production locale. «L’étoile est donc aussi un peu une reconnaissance pour nos fournisseurs, avec lesquels nous travaillons tous les jours», explique le chef.
En même temps, il a à cœur d’éviter le gaspillage alimentaire. L’étoile verte de la durabilité est donc une belle incitation pour les autres cuisiniers à faire encore plus attention à la durabilité, à la saisonnalité et à l’origine locale.
Après la fermeture de “La Distillerie”, René Mathieu a retrouvé son étoile Michelin. © PHOTO: Marc Wilwert
Les clients étrangers qui cherchent un bon restaurant au Luxembourg se fient encore beaucoup au jugement du Guide Michelin, René Mathieu en est convaincu. En conséquence, il trouve fantastique que le Grand-Duché ait été récompensé à ce point en 2025. «Mais le monde ne s’arrête pas de tourner parce qu’on a soudain une étoile. C’est là que le travail commence vraiment», sait-il par expérience. Enfin, il faut continuer à être à la hauteur de cette reconnaissance, ce que certains jeunes cuisiniers ne sont pas encore prêts à faire.
Il souhaite toutefois faire une exception: son ancien sous-chef Archibald De Prince est absolument à la hauteur de sa nouvelle étoile. «Archibald et moi avons travaillé côte à côte pendant huit ans. Nous avons pour ainsi dire entrepris ensemble de faire progresser la cuisine végétarienne. Il est bien sûr beaucoup plus jeune que moi, mais il a beaucoup de savoir-faire, ce qui a fait de notre collaboration une expérience très enrichissante». Il est rare de trouver un talent d’exception aussi motivé que lui.
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Pour son ancien collègue, avec lequel il a passé entre-temps plus de temps qu’avec sa propre famille, René Mathieu a donc dû être presque aussi heureux que pour sa propre distinction. «Mais la deuxième étoile de Louis Linster était aussi très émouvante pour tout le monde, y compris pour Léa. Un duo mère-fils aussi performant est quelque chose de très particulier. Le garçon a définitivement pris son envol et peut désormais voler de ses propres ailes».
Cet article a été publié initialement sur le site du Luxemburger Wort.
Adaptation: Pascal Mittelberger.