Pénalisation croissante du droit des affaires : des cols blancs sous surveillance • FRANCE 24
Bonjour et bienvenue dans l’entretien de l’intelligence économique, l’émission consacré aux coulisses de la mondialisation. Ils se croyaient à l’abri, ils ne le sont plus ou de moins en moins. Je parle des coles blancs et de leurs crimes et délits que les justices du monde entier souhaitent poursuivre plus sérieusement. C’est ce qui ressort du rapport annuel du cabinet d’avocat d’affaires international à Sherman. pour en parler, je reçois Paul Fortin, l’un de ces membres. Bonjour Paul Fortin. Alors, dans vos mots, la définition des crimes et délit euh des coles blancs ? Alors, les crimes des coles blancs, c’est ce qu’on appelle aussi le le pénal des affaires et c’est tout simplement l’idée que dans la vie normale d’une entreprise et bien il peut y avoir des crimes et des délites, c’est-à-dire du pénal. Et pourquoi on a un terme consacré ? Et ben c’est parce que c’est un peu étonnant parce que parfois le pénal, on se dit que c’est du trafic de drogue, du terrorisme. Bah non, en fait dans la vie des entreprises, il peut aussi y avoir du pénal et c’est le pénal des affaires. Alors alors on parle de quel délit ? Quel crime en gros ? Alors il y en a vraiment une une grande multitude. Bah une entreprise est censée payer ses impôts. Si elle les paye pas, c’est la fraude fiscale. Les conditions de travail, le harcèlement, bah ça peut être pénal. Et ben c’est bien des relations entre un employeur et ses employés. Voilà. Voilà des des exemples. Euh je sais pas, il y a beaucoup de sociétés quand même qui travaillent pour l’État. Il y a ce qu’on appelle des marchés publics. Bah si on a été avantagé à tort dans un marché public, ça s’appelle du favoritisme. Voilà encore un autre exemple. Et donc les sociétés dans leur cours ordinaires, elles sont confrontées à la commission éventuelle de crime et de délit. Alors quand on est une société qu’on travaille à l’international, faut tenir compte des justices bah françaises, on est française mais aussi de toutes les justices du monde dans lequel on travaille. Exactement. dans un monde internationalisé, c’est les sociétés doivent être extraordinairement vigilantes parce que il y a toute une série de normes qui s’appliquent, elles peuvent être un peu contradictoire, un peu changeantes et puis s’il y a un problème, comme il est mondialisé, il peut y avoir plusieurs justices qui s’intéressent simultanément à vous ou sur le même délit, sur le même crime. Exactement. Ouais. Quelle est l’évolution de ce que vous voyez sur le terrain en ce qui concerne la répression des États vis-à-vis donc du des crimes et délits de Col Blanc ? Est-ce que c’est de plus en plus dur là-dessus ou pas ? Ah oui oui, il y a très clairement une volonté des pouvoirs publics de s’attaquer à la criminalité en col blanc et donc ça passe parfois l’invention de nouveaux délit. C’est-à-dire que on vote une loi et on dit tiens désormais tel comportement c’est pénal. Ça c’est l’idée qu’on on étend le champ des interdits. Mais il y a aussi l’idée que des procureurs peuvent être plus agressifs. Ils peuvent se dire ça historiquement je regardais pas trop pénal. et on se dit tiens dans le fond il y a peut-être une dimension pénale et je vais commencer une enquête pour voir s’il y a quelque chose qui cloche ou même plus grave s’il y a quelque chose d’illégal. Cette sévérité, elle vient du monde anglo-saxon ou pas. Oui, historiquement. Oui. Historiquement le le le le la répression anglo-saxone, notamment américaine était était la plus sévère. Mais euh maintenant, on assiste à un mouvement de fond où, y compris l’Union européenne regarde de très très près ce que font euh différentes sociétés et euh euh quand on sanctionne, ça peut sanctionner très fort. Et au sein de l’Union européenne, tous les membres sont pareils dans cette approche ou alors ce qu’ il y a une approche différence en France, en Allemagne, en Italie ou ailleurs ? Il y a des variations mais c’est vraiment un mouvement de fond justement lié à cette internationalisation. Euh et puis paradoxalement, on on évoquait le fait que euh les États-Unis étaient en pointe. Euh il y a un moment où on peut se dire si c’est un comportement euh problématique international, pourquoi ce serait que les États-Unis euh qui toucheraient euh une amende et cetera ? Donc il y a un moment où les pouvoirs publics euh nationaux se sont dit bah dans le fond nous aussi euh on est concerné puisque on est dans un monde mondialisé. Même approche en Asie et en Chine en particulier ou pas ? Ah je dirais que c’est je dirais que c’est que c’est moins présent. On a moins on est moins au courant d’amende record euh prononcé, mais c’est fondamentalement un mouvement de tendantiel de la société. Ouais. D’où la vigilance des entreprises qui doit être de plus en plus resserrée là-dessus. Exactement. Et cette vigilance renforcée, c’est pas seulement parce qu’on a peur de se prendre un coup de bâton. Disons que le le législateur européen par exemple organise ça en disant “Attendez euh vous vous êtes une entreprise euh vous avez des obligations, j’aimerais bien que vous mettiez en place des programmes de conformité. Par exemple, la corruption s’est interdit, mais on ne veut pas que sanctionner une fois que la corruption est intervenue.” Donc les ce qu’on ce qu’on peut appeler des arsenaux législatifs disent “Bah si vous êtes une société qui dépasse une certaine taille, j’aimerais bien que vous mettiez en place des programmes anticorruption.” Il y a aussi cette idée de prévenir plutôt que de guérir. Ouais. Alors si on si on prend un exemple par exemple ce qu’on a appelé le scandale kouomkou qui est en fait une affaire où on essaie d’éviter d’être fiscalisé de de payer des taxes euh là on sait pas en effet si on est dans l’optimisation fiscale ou dans la fraude fiscale mais la justice a décidé de s’en saisir très clairement. Alors, c’est un sujet euh c’est un sujet très compliqué, mais on est sur du un sujet fiscal. Donc, comme je vous disais, la vie d’une entreprise, elle doit payer ses impôt et si elle les paye pas, ça peut être de la fraude fiscale. Et c’est un sujet très technique, très compliqué. On va dire que historiquement la fraude fiscale, ça pouvait être quelque chose de plus simple avec quelqu’un qui a de l’argent caché en Suisse. Donc, quelque chose avec de la dissimulation. Là, le sujet des kouumkum, ce sont des transactions qui ont lieu sur les marchés financiers et on se demande quel est le régime fiscal adapté et c’est des sujets, on va dire, très techniques qui historiquement n’auraient pas été envisagés sous tout à coup la justice décide d’agir. C’est ça la question avec alors c’est le fruit de de plusieurs réformes historiquement. Alors, il y avait une notion en qu’on appelait le verreau de Bery. Qu’est-ce que c’était ? C’était qu’historiquement en France le fiscal c’était beaucoup le ministère des finances donc Bercy comme comme on l’appelle souvent et que c’est un peu le ministère des finances qui pouvait décider que une affaire de redressement fiscal devenait ou non une affaire pénale. Et bien il y a eu un changement législatif où on a dit des problèmes fiscaux deviennent beaucoup plus automatiquement des problèmes de fraude fiscale, c’est-à-dire pénaux. H et donc sans doute qu’ un sujet comme les kouumkum l’idée qu’il soit pau, c’est partiellement le fruit de ces de ces réformes là particulier à la France ou pas ? Alors là c’est assez particulière à la France. Oui. En ce sens que il y a encore beaucoup de de pays dans lesquels la fraude fiscale c’est des comportements fiscaux avec de la dissimulation et des des des choses qui on va dire dépassent un très un très grand niveau de de de gravité. Là, on est sur des contentieux extrêmement techniques que beaucoup de pays envisageraient simplement comme un problème fiscal où vous devez évident payer ou non à la fin l’impôt que vous n’avez pas payé avec une sanction fiscale mais pas une sanction pénale. Autre exemple euh de réaction de la la justice avec des lois qui sont adaptées, avec des pratiques qui nous viennent plutôt des États-Unis, c’est que quand une entreprise est confrontée donc à ce problème, elle passe un accord avec la justice qu’on appelle le CIGIP et à partir du moment où elle passe cet accord, bah il y a plus de poursuite en fait, elle paye. Oui. Oui. Alors ça c’est encore une fois c’est un mécanisme très nouveau en France mais qui existe depuis plus longtemps aux États-Unis et c’est l’idée qui a un constat, c’est que ces sujet extrêmement technique, ça peut être difficile d’enquêter dessus et long et très long. Et donc on se dit dans le fond une société vous allez pas la mettre en prison. Dans le fond une société même si on faisait un procès, est-ce qu’à la fin l’enjeu ce serait pas principalement une amende ? Donc on s’est interrogé sur comment on pouvait faire la justice différemment. Et donc l’idée de la Cégipe, convention judiciaire d’intérêt public, mais fondamentalement c’est un accord entre le procureur et une société qui est visée homologuée par euh par un juge. C’est l’idée que il y a un moment où alors que on ne va pas faire que s’affronter, il y a un moment on va être capable de discuter pour trouver un accord où on va dire bah il s’est passé ça et on s’arrête là mais on paye une amende dite d’intérêt public. Ouais. Justice transactionnelle quoi. Exactement. Exactement. Ouais. Alors vous dans votre étude, donc je rappelle que c’est une étude qui sort chaque année. Euh quels sont les risques que vous voyez pour les prochaines années pour les entreprises ? Ah bah le le risque c’est que cette tendance qu’on évoquait à l’instant, elle va elle va continuer à se développer. Là si on est sur la France, on évoquait les coucou et les sujets de fraude fiscale. J’évoqué cette réforme qui fait qu’il va y avoir encore plus de dossiers. C’est c’est évident que ça va que ça va continuer. Puis il y a toute une série de de sujets médiatiques où des ONG peuvent porter plainte des des associations. Donc il y a il y a toute une série de de mouvements. Fondamentalement l’idée ici est de vous dire que n’importe quel problème notamment en France peut quasiment avoir une dimension pénale et ça c’est quelque chose de nouveau. Et donc il faut que les sociétés s’y préparent. Ouais. Et est-ce que cette vision c’est la même pour aussi les marchés à l’étranger ? Alors oui, c’est c’est une tendance internationale. Après, il y a évidemment des des réalités locales. Là, j’ai éévoqué sur le fiscal l’idée que peut-être que la France est à une extrémité du spectre en envisageant que certains certains sujets très techniques peuvent être pénux. Après, il y a aussi des des dé là, on parle beaucoup des sociétés, mais il y a aussi la question de la responsabilité des dirigeants d’entreprise. Oui. Voilà. Bon et ben euh historiquement aux États-Unis, on va dire qu’on ose un petit peu plus mettre un un dirigeant en prison. La figure de Bernard Madov, je sais pas si on parle du Japon, Carlos Gon, on a tous découvert que il pouvait être enfermé. Donc euh il y a des variations il y a des variations sur les pays. Plus de sévérité, on voit de de la justice sur ces problématiques et en même temps vous avocat craignez que on puisse porter atteinte à votre secret professionnel. Ça va jusque là ? Ah oui oui parce que la question du secret professionnel, elle est elle est très importante. L’idée, elle est simple he c’est que si vous devez aller discuter avec votre avocat, c’est un peu comme aller voir son médecin. Il y a l’idée qu’on peut se confier à lui pour lui demander un un bon conseil et puis surtout le droit comme on vient de dire, il est internationalisé, extrêmement technique. Vous êtes pas censé tout connaître vous-même. Il y a bien un moment où vous avez le le droit de demander de de l’aide à quelqu’un. Sauf que il y a une dimension, c’est que le secret professionnel, peut-être qu’il a été très largement conçu dans l’idée que bah un jour que je vous souhaite pas, vous venez me voir dans mon cabinet et on discute. Voilà. Mais si on parle de de pénal des affaires, si le client c’est une société, on voit bien que il y a une il va y avoir des juristes dans cette société que moi avocat, je vais échanger avec une multitude de juristes, que les juristes vont aussi échanger entre eux en se disant tiens, j’ai discuté avec l’avocat. Voilà voilà ce qu’il m’a dit. Et donc le secret professionnel, comment on l’appréhende dans un monde beaucoup plus compliqué où le c’est les rapports entre un avocat et une très large société, une multitude de personnes par rapport à quelque chose de plus interpersonnel, de bilatéral. Et bien nos règles elles sont pas tout à fait adaptées, on les change, on les adapte, les règles sont pas toujours claires. Donc on attend que le juge nous dise exactement comment fallait comprendre la chose. Et donc on est dans un monde mouvant où il est pas du tout évident qu’on ait un grand niveau de protection. Terra miné. Donc merci beaucoup Paul Fortin pour vos réponses. L’entretien de l’intelligence économique est terminé. Évidemment, vous pouvez retrouver cette émission sur france24.com sur nos réseaux sociaux et sur nos podcasts. Au revoir. [Musique]
Beaucoup se pensaient sans doute à l’abri, mais le sont de moins en moins : nous parlons des cols blancs, de leurs crimes et délits, que les justices du monde entier souhaitent désormais poursuivre plus activement. C’est l’une des principales conclusions tirées dans le rapport annuel du cabinet d’avocat d’affaires internationale A&O Shearman. Nous décryptons cette problématique avec l’un des membres de ce cabinet, Paul Fortin, avocat.
En savoir plus avec notre article : https://f24.my/B97O.y
🔔 Abonnez-vous à notre chaîne sur YouTube : https://f24.my/YTfr
🔴 En DIRECT – Suivez FRANCE 24 ici : https://f24.my/YTliveFR
🌍 Retrouvez toute l’actualité internationale sur notre site : https://www.france24.com/fr/
📲 Recevez votre concentré d’information sur WhatsApp : https://f24.my/WAfr
et sur Telegram : https://f24.my/TGfr
Rejoignez-nous sur Facebook : https://f24.my/FBfr
Suivez-nous sur X : https://f24.my/Xfr
Bluesky : https://f24.my/BSfr et Threads : https://f24.my/THfr
Parcourez l’actu en images sur Instagram : https://f24.my/IGfr
Découvrez nos vidéos TikTok : https://f24.my/TKfr
5 comments
Approche très intéressante du sujet ! Merci pour cette vidéo si instructive ! 💝🐱
Merci pour votre inspiration ! Comment gérez-vous les blocages créatifs ? 🐱💞
Merci pour votre ouverture d'esprit ! Comment interagissez-vous avec les commentaires des spectateurs sous la vidéo ? 🍒🧡
Se sont les politiques qui sont épargnés , qui passe complètement au dessus des lois , de la justice , les outre mer en font les frais . Il y a même des détournements de fond public ( clan , clientelisme copinage) qui deviennent une culture pour certains ; voir un système de type de fonctionnement mafieux entre amis ..
Pour mettre nos familles a l'abri du grand déclassement, du vol en bande organisée de nos revenus, il faut magouiller un peu, voir beaucoup. Abus de bien sociaux, black etc. Et puis sans parler du fait qu'on donne de l'argent a ceux qui détruisent la France.
Et puis la gauche avec la paupérisation en France et la délinquance allogène veut faire diversion en accusant les blancs en col blanc…
Comments are closed.