par Michel Rose

Le président français
Emmanuel Macron se rend dimanche au Groenland pour marquer sa
solidarité avec le Danemark et envoyer un “signal” de la
détermination de l’Union européenne après les menaces de Donald
Trump d’annexer l’île semi-autonome.

Le Groenland est devenu un point de tension entre Bruxelles
et Washington après que le président américain a déclaré à
plusieurs reprises qu’il voulait acquérir ce territoire autonome
danois, riche en matières premières et à la situation
stratégique dans l’Arctique, pour des raisons de sécurité
nationale et internationale

Donald Trump n’a pas exclu d’utiliser la force pour parvenir
à ses fins.

Emmanuel Macron, premier dirigeant étranger à se rendre dans
l’île depuis ces menaces explicites, a déclaré que son
déplacement visait à éviter toute “prédation” sur le territoire,
qui fait partie du royaume du Danemark depuis au moins le 17e
siècle.

Prié de dire si le président français délivrerait sur place
un message explicite à destination des Etats-Unis, un conseiller
d’Emmanuel Macron a répondu aux journalistes que “le déplacement
est un signal en soi”, sans mentionner Donald Trump.

Selon un sondage IFOP pour NYC.eu publié samedi, 77% des
Français interrogés et 56% des Américains désapprouvent une
annexion du Groenland par les Etats-Unis, et 43% des Français
approuveraient un recours par la France à la force militaire
pour éviter une invasion américaine.

ENTRER DANS UNE NOUVELLE DIMENSION

A l’invitation de la Première ministre danoise et du Premier
ministre du Groenland, Emmanuel Macron visitera la capitale Nuuk
ainsi qu’une centrale hydroélectrique financée par l’union
européenne et un glacier, et discutera avec ses hôtes de la
sécurité et du changement climatique dans l’Arctique.

Le déplacement donnera également l’opportunité, selon le
conseiller présidentiel, de discuter de la manière de donner
“une nouvelle dimension” au partenariat entre le Groenland et
l’Union européenne.

La Première ministre danoise Mette Frederiksen s’est rendue
plusieurs fois à Paris après les menaces de Donald Trump pour
s’assurer du soutien français et européen, et a passé commande
de missiles sol-air de fabrication française.

La visite d’Emmanuel Macron constituera pour Copenhague,
historiquement l’un des alliés les plus loyaux aux Etats-Unis au
sein de l’Europe, de se préparer à une forme de réponse plus
ferme vis-à-vis d’Etats-Unis devenus soudain plus agressifs,
commente Florian Vidal du think-tank français IFRI.

“La posture plus agressive de l’administration Trump est un
choc qui fait apparaître la vision française de l’Europe, où
celle-ci est plus autonome, comme plus raisonnable aux yeux du
Danemark”, dit-il. “Du point de vue scandinave, la France est
une puissance militaire qui compte.”

Le Premier ministre du Groenland, Jens-Frederik Nielsen, a
également salué cette semaine sur Facebook le soutien de la
France, “à la fois nécessaire et gratifiant”. Le chancelier
allemand Friedrich Merz a lui aussi assuré que son pays
épaulerait le Danemark sur la question du Groenland.

Lors d’une visite sur l’île en mars, le vice-président
américain JD Vance a accusé le Danemark, un des alliés membres
de l’Otan, de ne pas faire son travail pour garantir la sécurité
du Groenland et suggéré que les Etats-Unis se chargeraient mieux
de cette mission.

Pour les dirigeants du Danemark et du Groenland, seuls les
habitants de l’île peuvent décider de son avenir, et la
constitution danoise prévoit pour le Groenland un droit
d’envisager son indépendance.

Le souverain danois, le roi Frederik X, très populaire au
Groenland, s’est rendu sur place fin avril pour une
démonstration d’unité face au conflit diplomatique avec Donald
Trump. En vertu d’un accord de 1951 entre le Danemark et les
Etats-Unis, ceux-ci ont le droit de construire des bases
militaires au Groenland, à condition que l’île et le Danemark en
soient notifiés.

(Michel Rose, avec Stine Jacobsen à Copenhague et Andreas Rinke
à Berlin, version française Gilles Guillaume)