Le Vieux Continent se prépare à la guerre. L’UE élabore un plan de réarmement pouvant atteindre 800 milliards d’euros afin de renforcer son autonomie en matière de défense, en réponse aux exigences du président américain Donald Trump. Le but ? Dissuader toute agression extérieure. Dans le viseur : la Russie, alors que l’invasion à grande échelle de l’Ukraine par Vladimir Poutine, entrée dans sa troisième année en 2025, inquiète les voisins de Kiev et au-delà. En juin dernier, Mark Rutte, le secrétaire général de l’Otan, a averti les membres de l’alliance que la Russie pourrait attaquer l’un d’entre eux d’ici 2030. Les dirigeants de l’Otan ont convenu que 300 000 soldats devaient être maintenus prêts à faire face à un conflit avec la Russie.

Dans ce contexte de réarmement des pays européens, les Pays-Bas, avec leurs alliés de l’Otan, se sont engagés à porter leurs dépenses de défense à 5 % du PIB, comme le souhaite le président américain Donald Trump. En mai dernier, le ministre néerlandais de la Défense Ruben Brekelmans a par ailleurs annoncé que le port de Rotterdam devrait être en mesure d’accueillir plusieurs navires transportant du fret militaire, à la demande de l’Otan.

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Le plus grand port d’Europe se prépare ainsi à un éventuel conflit avec la Russie, en réservant de l’espace aux navires transportant des fournitures militaires, et en planifiant où détourner les marchandises en cas de guerre, rapporte le Financial Times (FT). Le terminal à conteneurs de ce port néerlandais est le seul endroit qui pourrait transférer en toute sécurité des munitions d’un navire à un autre, indique le quotidien britannique.

Des exercices militaires

Selon Boudewijn Siemons, directeur général de l’Autorité portuaire de Rotterdam, celle-ci coordonne ses activités avec la ville belge d’Anvers sur la manière de gérer l’arrivée éventuelle de véhicules et de fournitures britanniques, américains et canadiens. Anvers, qui traite 240 millions de tonnes de fret par an, ce qui en fait le deuxième plus grand port de l’UE, reçoit déjà régulièrement des fournitures pour les troupes américaines stationnées en Europe. “Tous les terminaux (du port de Rotterdam) ne sont pas adaptés au traitement du fret militaire”, précise-t-il au FT. “Si de gros volumes de marchandises militaires devaient être expédiés, nous nous tournerions vers Anvers ou d’autres ports pour prendre en charge une partie de la capacité, et inversement. Nous nous considérons de moins en moins comme des concurrents.”

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Boudewijn Siemons indique qu’un ou plusieurs navires seraient amarrés au quai du port de Rotterdam pendant plusieurs semaines, quatre ou cinq fois par an, en cas de conflit, même si l’emplacement pourrait changer. En outre, des exercices militaires amphibies auraient également lieu plusieurs fois par an. Par ailleurs, les zones autour des ports, dotées de bons réseaux de distribution, sont adaptées à des stocks de produits essentiels, comme le pétrole, le gaz, mais aussi le cuivre, le lithium et le graphite, rappelle Boudewijn Siemons. Une partie des réserves stratégiques de pétrole des Pays-Bas se trouve déjà à Rotterdam.

De multiples “couloirs terrestres” prévus

L’Otan se prépare depuis plusieurs mois à l’éventualité d’un conflit sur le sol européen. L’Alliance développe depuis 2024 de multiples “couloirs terrestres” afin d’acheminer rapidement des troupes et des blindés américains vers le front en cas de conflit terrestre majeur entre l’Europe et la Russie. Les soldats américains seraient alors acheminés vers le port de Rotterdam avant d’être transportés vers l’est. Mais des dispositions seraient également prises pour étendre les voies de communication vers d’autres ports afin de garantir que les lignes de communication terrestres ne puissent pas être interrompues par les forces russes, ont indiqué en juin 2024 des responsables de l’Otan au Telegraph.

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Le quotidien britannique a publié le schéma de ces “couloirs de transport” prévus à travers l’Europe. Les plans initiaux de l’Otan prévoient donc que les troupes américaines débarquent à Rotterdam ou à Hambourg, en Allemagne. Cependant, elles pourraient également arriver dans les ports de l’Italie, à Gênes ou La Spezia, à Athènes en Grèce ou dans les ports turcs, dans l’hypothèse où les forces de l’Otan arrivant des Pays-Bas étaient touchées par des bombardements russes ou si les ports d’Europe du Nord étaient détruits. Ces derniers, notamment celui de Rotterdam, sont en effet considérés comme particulièrement vulnérables aux attaques de missiles russes. En 2024, des plans étaient également en cours d’élaboration pour transporter des troupes via des ports des Balkans, ainsi qu’à travers la Norvège, la Suède et la Finlande, révélait le Telegraph.