Et si la Russie était la clé de voûte d’une invasion de Taïwan? L’hypothèse est loin d’être absurde. Le secrétaire général de l’OTAN, Mark Rutte, pointe lui-même du doigt une éventuelle coordination stratégique entre Pékin et Moscou, qui pourrait détourner l’attention militaire des États-Unis et de leurs alliés en cas d’invasion chinoise de l’île autonome.

Dans une interview accordée au New York Times le 5 juillet, Mark Rutte évoque les conséquences qu’impliquerait un approfondissement des relations entre les deux pays, unis dans le désir de remodeler l’ordre international dominé par l’Occident. «Si Xi Jinping attaquait Taïwan, il commencerait par téléphoner à […] Vladimir Poutine pour lui dire: “Je vais faire ça, et j’ai besoin que vous les occupiez en Europe en attaquant le territoire de l’OTAN.”»

Selon Mark Rutte, une telle coordination aurait un but: disperser les forces américaines et alliées, compliquant ainsi toute réponse rapide en Asie. Si la Chine devait attaquer Taïwan, les États-Unis seraient en effet confrontés à un défi colossal: défendre l’île tout en contenant d’éventuelles menaces en Europe, voire en Asie du Nord-Est, explique The War Zone. Le simple transport de matériel, notamment à travers le Pacifique, deviendrait presque ingérable en cas de conflit simultané sur plusieurs fronts.

Une attaque pas pour demain?

Ce n’est pas tout. La Corée du Nord, alliée de longue date de Pékin, que ce dernier soutient comme un chien fou capable d’être lâché à tout moment, pourrait également entrer en jeu. Au Moyen-Orient, l’Iran, voire les Houthis, pourraient à leur tour mobiliser les effectifs de l’Oncle Sam, ajoutant une pression insoutenable sur les ressources américaines. De quoi enrayer la machine de guerre censée soutenir Taïwan.

Si cette perspective est partagée par de nombreux responsables occidentaux, elle pourrait ne pas se traduire par une intervention dans les prochains mois… mais dans une poignée d’années. Plusieurs analystes tablent sur un retour en force de la Russie à l’horizon 2029, le temps que Moscou reconstitue ses effectifs et sa logistique militaire, afin d’être apte à engager une confrontation directe avec l’Alliance atlantique.

Le média The War Zone estime que la Russie n’aurait même pas besoin d’entrer en guerre pour servir les intérêts chinois. De simples menaces, des provocations hybrides ou des manœuvres militaires aux frontières de l’OTAN suffiraient à détourner l’attention et les ressources militaires occidentales.

De son côté, la Chine se prépare et accentue chaque jour un peu plus sa pression militaire sur Taïwan. Selon le commandant de l’INDOPACOM, le commandement géographique des forces armées américaines chargé de toutes les opérations militaires des États-Unis dans la région Indo-Pacifique, cette pression aurait augmenté de 300% en 2024. Tous les rapports indiquent que Xi Jinping cherche à être prêt pour une éventuelle invasion de l’île à l’horizon… 2027.