Le 19 juillet 2024, on a appris que plus de 61 millions d’euros avaient disparu chez Caritas Luxembourg. Le Parquet a ensuite qualifié cette affaire d’escroquerie au «faux président». Le scandale a ébranlé le secteur social luxembourgeois et a soulevé de sérieuses questions sur la gestion des organisations à but non lucratif, la surveillance bancaire, le contrôle par les autorités de régulation et la stabilité de la Place financière.

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L’argent a été transféré en plus de 120 transactions sur des comptes en Espagne, non seulement à partir des réserves de Caritas, mais aussi à l’aide de nouvelles lignes de crédit des banques Spuerkeess et BGL BNP Paribas.

Malgré plusieurs enquêtes, diverses démissions et la création d’une nouvelle organisation pour reprendre les tâches nationales de Caritas, beaucoup de choses restent obscures.

On revient en quinze dates clés sur le déroulement de l’affaire, de sa révélation à ses conséquences sur l’année écoulée.

Février 2024: la fraude commence

En février 2024, la directrice financière de Caritas Luxembourg a commencé à transférer des fonds à grande échelle vers des comptes espagnols, soit plus de 120 transactions pour un volume total d’environ 61 millions d’euros. L’argent provenait de réserves internes et de lignes de crédit nouvellement établies par des banques luxembourgeoises.

Le Parquet a par la suite déterminé qu’il s’agissait d’une escroquerie au «faux président»: la directrice financière pensait agir sur les instructions du PDG. En réalité, les courriels provenaient de fraudeurs. Les banques impliquées, BGL BNP Paribas et Spuerkeess, ont approuvé d’importantes lignes de crédit. Les versements gouvernementaux prévus à l’organisation ont servi de garantie.

Mai 2024: un avertissement manqué

En mai, un auditeur de Grant Thornton a tiré la sonnette d’alarme concernant plusieurs virements suspects, dont onze paiements totalisant plus de 5 millions d’euros à une banque espagnole, prétendument pour le compte de la banque d’investissement turque ASAM. Or, selon l’auditeur, ASAM travaille exclusivement avec des banques turques.

L’auditeur a exigé des explications écrites sur ces transactions et d’autres, notamment celles adressées à Caritas Internationalis, qui n’avait reçu aucun argent du Luxembourg. Selon Reporter.lu, la directrice financière a bloqué cette demande.

15 juillet 2024: une réunion du conseil d’administration

La question de savoir qui savait quoi et quand reste controversée. Le directeur des opérations, Tom Brassel, affirme avoir informé le vice-président Pit Bouché des nouvelles lignes de crédit dès le 6 juin. Le conseil d’administration nie ces allégations, affirmant n’avoir pris connaissance des irrégularités que lors de la réunion du 15 juillet. Le lendemain, le directeur Marc Crochet a déposé une plainte pénale.

19 juillet 2024: le scandale éclate au grand jour

La radio 100,7 est la première à signaler l’affaire. Le Parquet a confirmé dans un communiqué avoir ouvert une enquête pour fraude. Caritas annonce sa pleine coopération avec les autorités.

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24 juillet: le gouvernement réagit

Le Premier ministre Luc Frieden (CSV) annonce que tous les versements de l’État à Caritas seront suspendus jusqu’à ce que l’utilisation des fonds soit clarifiée. Il souligne que Caritas n’est pas une organisation publique, mais un prestataire de services contractuel.

Frieden exige la nomination d’un administrateur provisoire et annonce qu’il épuisera tous les recours légaux pour récupérer les fonds détournés.

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Fin juillet à août 2024: négociations de crise et restructuration

Caritas met en place une cellule de crise dirigée par Christian Billon, avec le soutien de PwC. Le gouvernement négocie avec le syndicat OGBL pour préserver les emplois.

Cependant, l’État et l’Église refusent tout soutien financier supplémentaire. Des donateurs privés exigent également une restructuration préalable, ce qui conduit à la création d’une nouvelle organisation.

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Septembre 2024: arrêt des activités internationales

Caritas met fin à tous ses programmes internationaux. Une centaine d’emplois seront supprimés: 30 au Luxembourg et 70 à l’étranger. Plus de 60 projets d’aide seront interrompus.

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Octobre 2024: une nouvelle structure voit le jour

«Hëllef um Terrain» (HUT) est créée pour poursuivre les missions nationales de Caritas – services sociaux et aide aux réfugiés – tout en évitant les charges financières héritées de Caritas. Parmi les membres fondateurs figurent la Fondation Félix Chomé, la Fondation luxembourgeoise, le directeur de Bofferding, Georges Lentz, l’ancienne médiatrice Claudia Monti et Christian Billon lui-même.

Au cours de la même période, les médias ont rapporté qu’une diseuse de bonne aventure liée à la mafia bulgare avait manipulé la directrice financière en lui faisant croire qu’elle suivait les instructions de son patron.

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En octobre également, le Parlement a approuvé la création d’une commission spéciale chargée d’enquêter sur les événements et de formuler des recommandations pour la prévention de la crise. L’échéance initiale d’avril 2025 a ensuite été reportée à juin.

Novembre et décembre 2024: démissions en série

Laurent Zeimet a démissionné de son poste de président de la commission spéciale après seulement un mois, en raison de possibles conflits d’intérêts. Il est inscrit comme «of counsel» au sein du cabinet d’avocats Schiltz & Schiltz, dont le lien avec l’affaire reste flou à ce jour.

Sa successeure, Stéphanie Weydert, a également démissionné peu de temps après, en raison de ses liens avec le cabinet d’avocats Arendt & Medernach. Charles Weiler a finalement pris la présidence.

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En décembre, la présidente de Caritas, Marie-Josée Jacobs, a annoncé sa démission, mais est restée en poste afin d’assurer une transition harmonieuse.

Janvier 2025: des arrestations

La police luxembourgeoise, en collaboration avec Europol, Interpol, Eurojust et les autorités françaises, bulgares et britanniques, a arrêté huit suspects, dont des citoyens bulgares, soupçonnés d’être impliqués dans l’ouverture des comptes espagnols.

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La CSSF, l’autorité de surveillance financière, a annoncé qu’elle clôturerait ses enquêtes sur d’éventuelles infractions en matière de blanchiment d’argent commises par les banques d’ici mars. La Banque centrale européenne (BCE) était également impliquée. La CSSF n’a fait aucune déclaration publique depuis.

Février à mars 2025: les banques sous pression

L’ancienne présidente Marie-Josée Jacobs a publiquement critiqué les banques et s’est interrogée sur les raisons pour lesquelles des millions de dollars de prêts ont été accordés sans la signature du conseil d’administration de Caritas.

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Le scandale dégénère en un débat fondamental sur la supervision bancaire et les systèmes de contrôle interne.

Avril 2025: Tom Brassel contredit le conseil d’administration

L’ancien directeur des opérations Tom Brassel a déclaré publiquement qu’il avait déjà informé Pit Bouché des prêts au début du mois de juin 2024 et qu’il avait, à la demande de la directrice financière, approuvé des prêts de plus de 30 millions d’euros sans savoir que les comptes étaient déjà fortement débiteurs.

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Mai à juin 2025: les accusations s’intensifient

L’ancien directeur Marc Crochet a écrit à la commission spéciale qu’il ne doutait pas que Tom Brassel ait informé le conseil d’administration en juin. Pit Bouché a contredit cette affirmation et a présenté des messages WhatsApp censés prouver le contraire.

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Selon certaines informations, la banque publique Spuerkeess pourrait faire l’objet de sanctions de la part de la CSSF en raison de manquements à sa surveillance.

Juillet 2025: un an après

Après plus de 20 réunions, la commission spéciale a présenté son rapport final le 2 juillet. Il a révélé que de nombreux témoins convoqués – dont des représentants du gouvernement, des dirigeants de banques et des procureurs – ont refusé de commenter les incidents pour des raisons de confidentialité. Grant Thornton a refusé de participer, et PwC n’a accepté de participer que sous des conditions strictes.

Le rapport a constaté des défaillances institutionnelles généralisées: chez Caritas, dans le secteur bancaire et parmi les autorités de contrôle. Cependant, aucune responsabilité claire n’a été établie.

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La commission a critiqué l’absence de pouvoirs coercitifs et a proposé des règles plus strictes pour les ONG, des normes de gouvernance contraignantes, des audits réguliers et des réformes de la coopération ministérielle en matière de contrôle parlementaire.

Le 16 juillet, deux Bulgares ont été condamnés en tant que «passeurs d’argent» dans le cadre d’une affaire. Ils ont été condamnés à 18 mois de prison, dont 15 avec sursis, et à une amende de 3.000 euros. Le Parquet a confirmé leur coopération. L’ancien directeur financier est toujours poursuivi en justice, affirmant avoir été victime d’une fraude de la part d’un «faux président».

Un an après la révélation du scandale, l’enquête luxembourgeoise sur l’affaire Caritas est toujours en cours.

Cet article a été publié initialement sur le site du Luxemburger Wort.

Il a été traduit à l’aide d’outils d’intelligence artificielle qui apprennent à partir de données issues de traductions humaines, puis vérifié et réadapté par Antony Speciale.