Depuis des
générations, on nous enseigne que la naissance d’un garçon ou d’une
fille relève du pur hasard, avec une probabilité théorique de 50%
pour chaque sexe. Cette vision simpliste vient d’être bousculée par
une équipe de chercheurs de Harvard qui affirme avoir identifié des
facteurs biologiques capables d’influencer la détermination du
sexe.
Quand la
réalité défie la théorie
Sur le papier, tout semble
pourtant logique. Lors de la formation des spermatozoïdes, la
moitié porte un chromosome X (futur bébé fille)
et l’autre moitié un chromosome Y (futur bébé garçon). Cette
répartition équitable devrait naturellement conduire à un équilibre
parfait entre naissances masculines et féminines.
Pourtant, l’observation du
monde réel raconte une histoire différente. Nous connaissons tous
des familles où règne une étonnante homogénéité : trois sœurs sans
aucun frère, quatre garçons nés consécutivement, ou encore des
lignées où un sexe semble systématiquement dominer. Ces situations,
bien trop fréquentes pour être de simples coïncidences
statistiques, ont intrigué les scientifiques.
Une étude
d’envergure aux résultats surprenants
Pour percer ce mystère,
l’équipe de la Harvard TH Chan School of Public Health a analysé
les données reproductives de 58 007 femmes américaines, toutes
participantes à la célèbre Nurses’ Health Study. Cette
investigation minutieuse a révélé une anomalie significative : le
nombre de familles comptant exclusivement des enfants du même sexe
dépassait largement les prévisions du hasard.
Cette découverte suggère
l’existence de mécanismes biologiques sous-jacents qui
orienteraient subtilement la balance vers un sexe plutôt que
l’autre. Mais quels sont ces facteurs mystérieux ?
L’âge
maternel, un facteur déterminant
Premier élément identifié
par les chercheurs : l’âge de la mère lors de sa première
grossesse. Plus une femme enfante tardivement, plus ses chances
d’avoir des enfants tous du même sexe augmentent. Ce phénomène
pourrait s’expliquer par des modifications hormonales ou
cellulaires liées au vieillissement, bien que les mécanismes précis
restent à élucider.
La taille de la fratrie
joue également un rôle. Les données révèlent que les mères ayant
trois enfants ou plus présentent une tendance accrue à donner
naissance à des enfants du même sexe, dépassant ce que le simple
hasard permettrait de prédire.
La piste
génétique se précise
L’aspect le plus fascinant
de cette recherche concerne l’identification de variants génétiques
spécifiques. En analysant l’ADN de certaines participantes, les
scientifiques ont découvert plusieurs gènes potentiellement
impliqués dans cette détermination sexuelle biaisée.
Le gène CYP2U1 présente
des variants associés à la naissance d’enfants d’un seul sexe. Plus
spécifiquement, un variant du gène NSUN6 semble favoriser la
naissance exclusive de filles, tandis qu’un variant du gène TSHZ1
orienterait vers des naissances masculines.
Ces découvertes,
rapportées dans Science Advances, ouvrent des
perspectives fascinantes sur les mécanismes moléculaires qui
régissent la reproduction humaine, bien au-delà de la simple
loterie chromosomique.
Crédit :
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Crédits : :fizkes/istockUne
controverse scientifique légitime
Malgré l’intérêt de ces
résultats, la communauté scientifique reste divisée. Une étude suédoise de 2020, portant sur plus de 4,7
millions de naissances – soit un échantillon quatre-vingts fois
plus important – n’a identifié aucune contribution génétique
significative au sex-ratio.
Brendan Zietsch,
généticien à l’Université du Queensland et auteur principal de
cette étude contradictoire, qualifie même les nouveaux résultats de
« faux ». Cette opposition soulève des questions
importantes sur la reproductibilité des découvertes scientifiques
et la nécessité d’échantillons représentatifs.
Les
limites d’une recherche prometteuse
Les chercheurs de Harvard
reconnaissent eux-mêmes les limitations de leur travail. Leur
échantillon, composé à 95% de femmes blanches américaines, manque
cruellement de diversité ethnique et culturelle. Cette homogénéité
compromet la généralisation des résultats à l’ensemble de
l’humanité.
De plus, les comportements
reproductifs variant considérablement selon les cultures et les
sociétés, il reste impossible de déterminer si ces observations
s’appliquent universellement ou reflètent des spécificités propres
à la population étudiée.
Vers une
compréhension renouvelée
Bien que controversés, ces
travaux ouvrent une voie de recherche prometteuse. Ils rappellent
que la biologie humaine recèle encore de nombreux mystères et que
nos connaissances sur la reproduction évoluent constamment.
Une chose reste certaine :
les anciennes croyances populaires prétendant permettre de
« choisir » le sexe de son enfant par des méthodes
naturelles demeurent sans fondement scientifique. La science
progresse, mais elle garde ses secrets les mieux gardés.