L’insoumission s’arrête aux frontières de la Chine

by redditeur404

13 comments
  1. L’insoumission s’arrête aux frontières de la Chine

    La députée insoumise Sophia Chikirou s’est à nouveau distinguée par des prises de position prochinoises. La fascination pour le régime de Pékin se paie par l’oubli des peuples et une complaisance avec des puissances qui ne sont nullement une alternative à l’ordre inégalitaire du monde.

    François Bougon et Fabien Escalona

    4 septembre 2025 à 18h32

    Si l’on en croit la députée insoumise Sophia Chikirou, interrogée par l’émission « Quotidien » en marge des universités d’été de La France insoumise (LFI), la Chine ne serait pas une dictature.

    Ces propos polémiques ont été tenus à la fin d’une conférence dans laquelle elle intervenait. Intitulée « De quoi la guerre USA-Chine est-elle le nom ? », elle réunissait également un journaliste du Monde diplomatique, Renaud Lambert, et un économiste, Benjamin Bürbaumer, auteur du livre Chine/États-Unis, le capitalisme contre la mondialisation (La Découverte, 2024), une analyse originale de la confrontation directe, au sein du système capitaliste, entre les deux superpuissances.

    Si les déclarations de Sophia Chikirou ont eu lieu le 23 août, elles n’ont été diffusées que mercredi 3 septembre, quelques heures après le défilé militaire organisé à Pékin pour les 80 ans de la victoire contre le Japon marquant la fin de la Seconde Guerre mondiale, défilé lors duquel Xi Jinping a notamment été accompagné de Vladimir Poutine et Kim Jong-un. Cette concomitance malheureuse, même si elle est du fait de la chaîne de télévision TMC, ne peut que renforcer le trouble. Même sans cela, ses assertions apparaissent plus que douteuses.

    Tout d’abord sur la dictature. À la députée insoumise si prompte à reprendre les éléments de langage de la République populaire de Chine – en particulier dans le rapport d’information consacré aux relations entre l’Union européenne (UE) et la Chine déposé en juin et que Le Monde a mis sur le devant de la scène en juillet –, nous conseillons la simple lecture de la Constitution de la République populaire de Chine, dont la dernière version a été amendée en 2018.

    Il est piquant d’observer que le texte assume le terme « dictature », affirmant que dans le « système socialiste » du pays, « la dictature démocratique du peuple dirigée par la classe ouvrière et basée sur l’alliance des ouvriers et des paysans, essentiellement la dictature du prolétariat, a été consolidée et développée ». Mais il est surtout évident que la nature « démocratique » de cette dictature, qui pourrait avoir un sens d’un point de vue communiste, ne s’est jamais matérialisée. À la domination de la classe capitaliste s’est substituée celle de la classe bureaucratique du parti-État, qui n’a d’ailleurs pas hésité à jeter les masses exploitées dans le tourbillon de la mondialisation néolibérale.

    Mais pour Sophia Chikirou et, dit-elle, « selon les règles » – lesquelles ? –, la Chine n’est pas à ranger dans la catégorie politique infamante des autocraties. La puissance asiatique, affirme-t-elle dans la vidéo, dispose d’un « système politique à parti… » On entend alors bien qu’elle s’apprête à prononcer l’expression « parti unique », mais elle se reprend en expliquant : « Il y a huit partis, donc ce ne n’est pas un parti unique, mais un parti dominant qui est le Parti communiste chinois ». La députée insoumise récite en fait la fable du pouvoir chinois de la pluralité politique, censée être assurée par un parti central et « huit partis démocratiques » consultés dans la conduite des affaires publiques.

    **Surveillance permanente**

    Lors de la fondation de la République populaire de Chine, il s’agissait pour Mao Zedong de présenter l’image d’une « démocratie nouvelle » avec, dans un « front uni patriotique du peuple chinois », l’inclusion de huit formations politiques existantes, considérées comme mineures, censées montrer que le PCC ne régnait pas en maître. Mais ce mythe a volé en éclats très vite : les représentants de ces partis ont fini par être persécutés, voire liquidés pendant la Révolution culturelle (1966-1976).

    Depuis son arrivée à la tête du parti-État, fin 2012, Xi Jinping a en outre renforcé le culte de la personnalité et l’emprise du PCC sur la société. Les organes de sécurité du régime, qui bénéficient de budgets importants, disposent des outils technologiques les plus modernes pour surveiller la population. Ce que certain·es spécialistes de la Chine qualifient de dictature parfaite.

    À cet égard, on ne saurait trop conseiller à Sophia Chikirou de lire également Penser en résistance dans la Chine aujourd’hui, paru jeudi 4 septembre aux éditions Gallimard, sous la direction de deux éminentes expertes du pays asiatique, Anne Cheng et Chloé Froissart.

    Dans son avant-propos, la première, titulaire de la chaire « Histoire intellectuelle de la Chine » du Collège de France, souligne qu’« après le pacte implicite qui a prévalu dans les décennies précédentes avec un pouvoir étatique incitant les citoyens à s’enrichir à condition de ne pas se mêler de politique, le pacte de “confiance” actuel est celui d’un pouvoir garant de la sécurité intérieure des citoyens, à condition de les maintenir sous surveillance permanente ».

    > À propos de Taïwan, Sophia Chikirou reprend sans nuances les dénonciations par Pékin des provocations de Washington.

    Sophia Chikirou s’est rendue en Chine, à Pékin, Shanghai et Canton, et en a tiré le rapport présenté en juin. Sur près de cent pages, elle dévoile une vision susceptible de s’inscrire dans un débat démocratique sur la manière dont l’Europe doit traiter avec la Chine. Sauf qu’au lieu de tracer véritablement une voie indépendante – « non alignée », selon le vocable insoumis –, elle propose une vision de facto compatible avec celle du PCC.

    Ainsi, à propos de Taïwan, elle reprend sans guère de nuances les dénonciations par Pékin des provocations de Washington. En se gardant bien de dire à quel point une majorité de Taïwanais·es refusent de vivre dans le régime politique « dominé » par le PCC, ce que le résultat des élections dans l’archipel montre bien depuis des années.

    Il existe dans cet archipel une culture chinoise non purement han, mêlée, ouverte, dont ne parlent jamais les leaders insoumis. Le premier pays d’Asie à avoir légalisé le mariage pour tous, alors que la Chine met en prison les militantes féministes de premier plan ; celui dont la présidente, en 2016, a présenté ses excuses aux peuples autochtones « pour les souffrances et les injustices […] subies au cours des quatre cents dernières années », alors que la Chine réprime férocement les Ouïghour·es, ethnie musulmane du nord-ouest du pays, n’intéresse visiblement pas les hérauts de la révolution citoyenne.

    **Une « révolution citoyenne » à géométrie variable**

    La bibliographie de son rapport est très courte mais elle en dit long : sept titres, quelques livres de spécialistes certes, mais aussi un recueil de discours de Xi Jinping, un ouvrage de Jean-Pierre Raffarin, connu pour son soutien indéfectible à Pékin, et celui de Jean-Luc Mélenchon, Faites mieux ! Vers la Révolution citoyenne.

    Avec les dernières déclarations de Sophia Chikirou, les masques tombent définitivement. Ce qui frappe dans ses positions, c’est de voir à quel point les peuples n’ont guère droit de cité. Comme l’ancien homme politique et écrivain Alain Peyrefitte, auteur en 1976 du best-seller Quand la Chine s’éveillera, elle rejoint le rang des personnalités fascinées par les « dominants », fussent-ils de demain, au prix de l’oubli de la masse des « dominés ». Un comble pour une femme politique qui se réclame d’une gauche porteuse des inquiétudes des masses populaires.

    On connaît la célèbre phrase de Mao : « Il est bon de se rebeller. » Mais pas partout, s’empresse d’ajouter Sophia Chikirou qui, si l’on peut dire, aggrave son cas en expliquant tranquillement que « la liberté d’expression en Chine est aussi menacée […] que celle qu’on a en France ».

    Jusqu’à preuve du contraire, on n’a cependant pas encore vu, malgré toutes les critiques légitimes que l’on peut adresser au gouvernement français, malgré la dégradation du débat public en raison du contrôle d’une grande partie des médias par des hommes d’affaires, et malgré la criminalisation de la solidarité avec Gaza, on n’a pas vu de défenseurs des droits humains finir leurs jours en prison, comme le prix Nobel de la paix 2010, Liu Xiaobo. Condamné en 2009 à onze ans de prison pour avoir rédigé la Charte 08, un manifeste pour les droits humains en Chine, il est mort d’un cancer du foie en liberté conditionnelle en 2017.

    Derrière l’outrance, on retrouve le simplisme d’un « campisme » de gauche qui voudrait que celles et ceux qui s’opposent à l’impérialisme états-unien fassent preuve de mansuétude envers ses opposants déclarés. Comme si l’impérialisme chinois ou russe n’existaient pas, et n’avaient pas pris soin d’annihiler tout espace depuis lesquels ils pourraient être critiqués et défiés de l’intérieur.

  2. J’entends la meute gronder , en tout cas super le monde selon LFI un mixe entre Rael , la chine de mao et la russie de poutine/staline , un vrai rêve quoi , allez downvotez moi

  3. Le naufrage idéologique de la gauche ce parti politique…

  4. “il est piquant d’observer que le texte assume l’emploi du terme dictature.”

    Mediapart vient de découvrir des concepts marxistes genre la “dictature du prolétariat” ?
    Ils découvrent ce que c’est que ce type de rhétorique ?
    On en est vraiment là en 2025 ?
    Sérieux les mecs…

    En tout cas, je dois avouer une chose, je ne me lasse absolument pas de ce nouvel épisode politique. C’est savoureux comme une tranche de brie sur du pain briochée.

  5. Vous pensez que Mediapart sait qu’on a accueilli Winny le Dictateur Esclavagiste en 2024 en France ?

    Quelqu’un leur dit ?

  6. encore du clickbait du figaro, vivement que ce torchon soit interdit sur ce sub..

  7. Il faudra dire à LFI que supporter les pays de l’ancien bloc communiste n’est plus nécessaire ni d’actualité 

  8. Ouaipe position nulle à chier de LFI. Ça m’empêchera pas de voter pour eux au vu du reste du paysage politique.

  9. Alors loin de moi l’idée de dire que LFI est exempt de tout reproche, mais l’article parle essentiellement des positions de la deputée Sonia Chikirou, qui est particulièrement gratinée niveau langue de bois et affaires politiciennes-judiciaires, plutôt que la ligne du parti dans son ensemble. L’article dresse des parallèles avec l’attitude de LFI sur la Russie, mais ça ne va pas plus loin sur le sujet.

  10. > le pacte de “confiance” actuel est celui d’un pouvoir garant de la sécurité intérieure des citoyens, à condition de les maintenir sous surveillance permanente ».

    Ah et c’est quoi la difference avec la France? On en est à combien de niveau d’alerte écarlates et a combien de decennies de plan vigipirate?

  11. C’est quand qu’on a enfin un parti gauche crédible avec des idées vraiment sociales et une politique internationale qui ne soutient pas des régimes oppressifs ?

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