Guerre à Gaza : “Il ne peut pas y avoir d’occupation heureuse ou démocratique” (Henry Laurens)

Guerre à Gaza : “Il ne peut pas y avoir d’occupation heureuse ou démocratique” (Henry Laurens)

Nouvelle étape franchie encore une cette semaine dans la guerre qu’Israël livre au Hamas dans la bande de Gaza. La phase principale de son offensive sur la ville de Gaza démarré précédé par un déluge de feu nocturne qui a terrifié ses habitants dont une grande partie a fui. Direction des zones qui n’ont d’humanitaire que le nom. Le jour même du lancement de cette offensive, une commission d’enquête internationale indépendante de l’ONU accusait Israël de commettre un génocide à Gaza car remplissant quatre des cinq critères du génocide tel que défini par la convention de 1948. Sont mise en cause Benjamin Netaniau et d’autres responsables israéliens le président Herzog et l’ancien ministre de la défense Johav Galland. Dans ce contexte catastrophique pour les civils et face à ce qu’Emmanuel Macron qualifie de fuite en avant d’Israël, Paris s’apprête à reconnaître en début de semaine un état palestinien. On en parle ce soir avec l’un des plus grands spécialistes du proche- Orient, Henry Laurence, professeur au collège de France, titulaire de la chair d’histoire contemporaine du monde arabe, auteur de nombreux ouvrages parmi lesquels questions juive, problème arabe. Rétrospective de l’histoire de la région sur de siècles réédité en cette rentrée chez Galimar. Une synthèse de 800 pages tout de même ouvrage majeur Henry Laurence la question de Palestine qui se dégline quant elle en cinq volumes passionnants. Bonsoir, merci infiniment d’avoir accepté notre invitation ce soir sur France 24. Israël a donc lancé cette semaine la phase principale de son offensive sur la ville de Gaza qui comptait avant cette offensive 1 million d’habitants malgré les condamnations internationales. Malgré ce bilan catastrophique pour les civils, Israël poursuit tête baissée avec donc pour objectif officiel d’en finir avec le Hamas. Votre réaction tout d’abord sur ce qu’Emmanuel Macron qualifie de fuite en avant d’Israël. On est d’abord absolument épouvanté par les images qui nous arrivent et de l’immense misère humaine qu’elle représente. Et puis on ne voit pas de solution. Il semblerait d’après certains que le Hamas est quand même conservé d’importantes forces de combat. On parle de 2000 à 3000 combattants plus d’après certains et mais bon c’est toujours difficile à savoir et puis de toute façon il y a pas d’avenir politique c’est là le le drame. Pour l’instant les Israéliens détruisent la bande de Gaza mais qu’est-ce qu’ils ont qu’est-ce qu’il y aura à faire ensuite ? Ça, on est dans l’impasse total parce que il y a aucun projet crédible qui soit avancé par Israël. par Israël et par la bonne internationale, il y a soit un projet vaguement de d’expulsion de la population arabe mais où ? Parce qu’elle peut pas passer la frontière. l’armée égyptienne a repris position le long de la frontière pour empêcher justement les Palestiniens d’entrer sur le le sol égyptien et là il y a des projets plus ou moins de créer une autorité internationale qui gérait la bande de Gaza. Mais ce sera avant tout une nouvelle force d’occupation et on voit pas qui a envie de participer à une force d’occupation dans la bande de Gaza. Je le disais, le jour même du lancement de cette offensive, enfin de la phase principale de cette offensive sur la ville de Gaza, une commission de l’ONU estimait que la politique israélienne menée depuis le 7 octobre rassemblait quatre des cinq critères constitutifs d’un génocide avec cette question de l’intentionnalité qui est au cœur hein de cette de cette notion de génocide. On la retrouve effectivement dans les discours de certains responsables israéliens. Oui. D’abord, d’abord une chose très simple, que ce soit un crime de guerre, un crime contre l’humanité ou un génocide, c’est de toute façon des gens qui meurent quel que c’est pas réconforté pour eux, réconfortant plutôt pour eux que de changer d’incrimination dans le cas de leur mort. Euh crime de guerre, c’est certain. Il suffit de prendre la définition du crime contre l’humanité dans le texte qui s’appelle le protocole de Rome. Vousz que le trouver sur Google et vous verrez que la politique israélienne correspond parfaitement à la finition des crimes contre l’humanité. Génocide, la question reste ouverte sur l’intentionnalité, mais disons que les responsables israéliens font tout pour renforcer euh cette avis vu les déclarations, on va faire un enfer, on va détruire encore plus et cetera. Ce constat en tout cas n’oblige pas pour autant la communauté internationale. Bah déjà première chose, il y a un droit d’agérence qui n’existe plus, un droit de protection qu’on avait développé au début des années 2000 qui n’existe plus. Donc à partir du moment où vous avez une super puissance qui soutient à l’État d’Israël, le reste du monde est bloqué. H Israël a franchi toutes les lignes rouges ces dernières semaines, notamment avec cette récente frappe inédite sur un bâtiment de doa au Qatar qui abritait des responsables du Hamas qui était engagé dans les pour parler autour d’un éventuel cessé le feu. Le dialogue en a été totalement torpillé. Depuis les monarchies du golf ont resserré les rangs autour du Qatar hein, ce qui peut paraître surprenant à certains égards. Israël est de plus en plus isolé dans la région. Bah c’est la thèse un peu de du gouvernement Netaniaou. Il a déclaré je crois hier ou avant-hier qu’Istrael devrait se penser comme une nouvelle Spart combattante en permanence dans un vrai en autarsie. En autarsie dans un environnement euh totalement hostile mais bon c’était déjà le cas depuis le moment de la création de l’État d’Israël. Quelles conséquences vous pensez sur les accords d’Abraham ? Bon euh les Émirats euh essayent encore de faire vaguement quelque chose en disant on les suspense s’il y a une saisime. Euh mais euh il sent on sent aussi que les opinions publiques arabes, y compris celle de des Émirats, la colère monte et cette colère aussi elle Mais les pays arabes ont quand même été relativement silencieux sur cette durant toute cette guerre à Gaza. Comment l’expliquait ? La première chose, c’est qu’ils ont peur des manifestations proalestiniennes. Ces manifestations proalestiniennes au début des années 2000 ont précédé le printemps arabe et comme tous ces régimes, pensez notamment à quel pays ? Oh la Syrie, l’Égypte et cetera. l’immobilisation. Moi, j’étais du côté de la Syrie au début des années 2000 et les manifestations étaient largement spontanées. Alors dans la série de bassiste, de manifestation spontanée, c’était vraiment rare et donc ils veulent absolument pas que la rue se manifeste. que vous avez des mesures rigoureuses de sécurité, de contrôle de l’information, de contrôle des réseaux sociaux pour empêcher tout début de mobilisation populaire. H vous avez commencé à évoquer cette question de la 6 Jordanie également he parce qu’il n’y a pas que Gaza. La colonisation s’y poursuit. Il y a ce projet de colonie E1 qui a été récemment validé par le gouvernement de Benjamin Natanou qui de fait couperait la 6 Jordanie en deux et empêcherait de fait toute viabilité à un éventuel état palestinien. C’est ça le l’objectif d’Israël. De toute façon euh il formule de 1967 dit tout c’était les vieilles coles qui étaient président du Conseil d’Israël à l’époque. Il parlait des des directoires occupés. Il disait on a la dotte et la fiancée mais il faudrait qu’on se débarrasse de la fiancée. Et depuis ils arrivent pas à se débarrasser de la fiancée et ils sont pris dans un cycle infernal puisque l’occupation suscite nécessairement de la résistance donc des dangers sécuritaires qui renforcent les mesures sécuritaires qui renforcent les mouvements dit terroristes et ainsi de suite. Les deux peuples rêvent de se séparer mais ils sont impossibles à séparer. Donc une spirale sans fin. En tout cas pour quelques siècles, j’en ai bien peur. Encore quelques siècles. L’objectif aussi d’Israël, c’est de constituer ce ce projet de grand Israël que Benjamin Netaniaou a répété aussi à de nombreuses reprises. De quand date d’ailleurs cette cette notion ? Alors, vous trouvez des projets enfin sionistes au début du 20e siècle, au moment de la conférence de la paix, par exemple, en 1919 à Paris où il y avait un grand Israël qui allait jusqu tout le sud d’une grande partie de la Jordanie d’aujourd’hui et ainsi de suite. Ensuite, on a eu plutôt de cal parce que c’était mal vu du point de vue des relations internationales. C’était plutôt des espaces de sécurité qui étaient énoncés par les stratèges israéliens par exemple dans les années 70-80. On disait notre espace de sécurité c’éta jusqu’à le frat h mais ça voulait pas dire qu’on allait occuper le territoire jusqu’à l’Efrat. Non, actuellement ce qu’on a c’est pour dire les termes gentils qui sont utilisés par les stratèges israéliens des ajustement de frontière en particulier au dépend de la Syrie et peut-être Israël qui a d’ailleurs poussé son avantage hein après la chute du gouvernement syrien qui continue d’ailleurs de grapiller des territoires aussi là-bas. Il va y avoir un accord a priori prochainement justement avec les nouvelles autorités syriennes à ce sujet. Ça se discute pour l’instant. Je n’ai pas le contenu mais le gouvernement sérien a dit que ça doit être analogue aux accords de 1975 h et donc pas de session de nouveaux territoire. Bon euh là, il faudra attendre que les choses soient rendues publiques. Henry Laurence, dans tous vos ouvrages, vous retraciez toute l’histoire de la Palestine, de toute la région sur de siècles. Cette question de la Palestine, c’est l’histoire d’une dépossession territoriale progressive. Ah bah si on regarde les cartes et c’est évident si on prend connaissez les jeux de cartes qui montrent que de décennies en décennies l’espace arabe palestinien se rétrécit en permanence mais cet agrandissement continu d’Israël ne permet pas au contraire à Israël d’assurer ses sécurités. C’est là le paradoxe. Quand il y a en 19 entre 1965 et 67, Israël avait évidemment des dangers militaires face à des armées régulières arabes, mais les activités entre guillemets terroristes avaient écouté cinq ou six morts en 2 ans à Israël. Depuis l’occupation par des territoires par Israël, ils avaient des centaines voire des milliers de morts. Donc le raisonnement sécuritaire sur à la réalité des faits. Pour reprendre le titre de votre dernier ouvrage qui est donc réédité en cette rentrée chez chez Galimar, quand est-ce que la question juive est devenue un problème arabe ? C’était le en fait elles se construisent l’un l’autre en quelque sorte. C’était Ben Gorion qui disait au début des années 30 que la question juive, c’estàdire le sort des juifs en Europe, était transformé en problème arabe, c’est-à-dire la question des Arabes euh palestiniens. Mais il n’avait pas vu évidemment que le nazisme, la choix allait euh se produire. Mais le drame d’aujourd’hui, c’est au-delà des terribles choses qui se passent sur le terrain, c’est qu’on va retrouver la question juive du 19e siècle parce que ce qui se passe là remet en cause le statut, l’opinion, enfin la la place des juifs en tout cas dans les sociétés européennes et occidentales à travers les discours d’où des malaises puissants, des inquiétudes et cetera. Et ce qui se passe là, c’est que les 70000 mais qui sont probablement le double de victimes, bah ça va rester maintenant marqué à vitamernie éternelle à l’État d’Israël et voire même à l’ensemble des populations juives du monde. C’est une malédiction. Vous dites qu’après des décennies de conflits, le poids de l’histoire suscite une incompréhension mutuelle, un rejet de l’autre, une déshumanisation aussi. Bah démonisation, c’est le terme terroriste qu’il utilise à partir de vous définissez quelqu’un comme terroriste, vous avez les sens de le tuer. Et donc à la limite toute personne tuée par Israël, par l’armée israienne sa israien est devenu par le fait même qu’il a été tué un terroriste. Et si on a aussi aux États-Unis aujourd’hui ailleurs des définitions extensiées terme terrorisme qui sont en fait des instruments de déshumanisation et c’est là on se rapproche de la notion de génocide parce que pourquer un génocide, il faut qu’il y ait déshumanisation. Henry Laurence, dans le cadre de notre traditionnelle carte blanche dans Au cœur de l’info, vous avez choisi à ma demande une image d’archive qui en longon sur les rapports justement entre ces deux communautés israéliens et palestinien. C’est une photo qu’on va voir apparaître dans quelques instants à l’antenne de Nati Chatoat qui date de 2001. Voilà, une photo prise à Hébron. Une femme palestinienne demande l’autorisation de franchir un checkpoint avec ses enfants, un soldat de l’armée israélienne. Pourquoi avoir voulu revoir cette archive ? Bah bah si vous on met toujours les Palestiniens ou les autres les terroristes en disant c’est la faute au mauvais discours, aux mauvaises idées qui puissent avoir la religion, le projet politique. Non, les choses sembles, c’est l’impression. Et voyez ces enfants sur cette photo euh d’il y a près de 25 ans. Ben imaginez ce qu’ils peuvent penser aujourd’hui d’Israël et ce qu’ils ont envie de faire aux Israéliens. C’est et de le même côté c’est le fait que toute une jeunesse israélienne ne connaît les Palestiniens que par le biais du service militaire, les shpes euh et cetera. C’est il ne peut il ne peut pas y avoir d’occupation heureuse et il peut pas y avoir d’occupation démocratique. C’est là le le point absolument essentiel et c’est l’occupation qui engendre la violence. Le général de Gaulle le disait déjà en 1967. Dans le contexte actuel, Emmanuel Macron et derrière lui une dizaine d’autres dirigeants s’apprêtent à reconnaître un état palestinien à l’ONU la semaine prochaine à l’occasion de l’Assemblée générale des Nations Unies. Une reconnaissance qui n’a que trop tardé. Oui. Bah si on regarde les étapes, en 87, c’était la proclamation de l’État de Palestine et puis en 2002, c’était l’annonce par les États-Unis qui ne reconnaissait que le but de la paix était la création d’un état palestinien. Donc depuis 2002, on est à 23 ans d’écart. Euh mais à part quelques bénéfices juridiques pour les Palestiniens, euh ça n’apportera rien sur le terrain parce que ça ne peut pas être un levier pour la paix comme le dit Emmanuel Macron. On n’ pas de partenaire. Le gouvernement israien d’aujourd’hui ne cherche pas la paix. Donc de toute façon on voit pas comment s’en sortir. Quand vous avez 500000 colons en Suisse Vernad 250000 à Jérusalem si on prend les chiffres de base, on voit pas comment un état palestinien peut exister et dans la mesure même où l’occupation engendre des besoins de sécurité, que la sécurité engendre de la violence et ainsi de suite, on voit aucun mécanisme de réconciliation qui puisse exister. Et vous venez d’évoquer Jérusalem, on en parle moins, mais le statut co à Jérusalem est là aussi menacé. pas menacer parce que de toute façon c’est déjà annexé mais on connaît les hypocrisies de langage. Au départ par exemple lesensiens ont dit on va simplement étendre notre loi sur Jérusalem pour des raisons techniques et puis 20 ans après du plus qu’on a fait ça c’était qu’une annexion en fait mais personne n’était d partir du moment où vous attendez votre loi c’est que vous l’avez annexé. Henry Laurence, je constate que vous êtes assez pessimiste ce soir. Il y a de quoi comment sortir de l’engrenage actuel ? Al ça, je laisse ça aux politiques. Moi, j’ai le droit d’être pessimiste avec le droit de me tromper avec le recul de l’historien aussi. Oui, et les ponétiques ont le droit d’avoir de l’espérance parce que sinon il n’entreprendraient rien. Merci en tout cas infiniment ce éclairé ce soir Henry Laurence et je rappelle donc votre ouvrage question juive problème arabe réédité en cette rentrée aux éditions Galimar. Merci encore. C’est la fin de cet entretien qui est à retrouver sur notre site internet et nos réseaux sociaux. Restez avec nous. Prochain point complet sur l’actualité dans quelques minutes.

La phase principale de l’offensive sur la ville de Gaza par Israël a été franchie cette semaine. Une grande partie de ses habitants a fui et une commission d’enquête internationale indépendante de l’ONU a accusé Israël de commettre un “génocide” à Gaza, car remplissant 4 des 5 critères du génocide tel que défini par la Convention de 1948. Dans ce contexte catastrophique, la France s’apprête à reconnaître en début de semaine un État palestinien. Henry Laurens, titulaire de la chaire d’Histoire contemporaine du monde arabe au Collège de France et auteur notamment de “Question juive, problème arabe” était notre invité sur France 24.
#Gaza #Israël #Histoire

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