L’administration du président américain Donald Trump a préparé de nouvelles sanctions susceptibles de cibler des secteurs clés de l’économie russe si le président Vladimir Poutine continue de retarder la fin de la guerre menée par Moscou en Ukraine, selon un responsable américain et une autre source proche du dossier.
Des responsables américains ont également indiqué à leurs homologues européens qu’ils soutenaient l’utilisation par l’Union européenne des avoirs russes gelés pour acheter des armes américaines destinées à Kyiv. Par ailleurs, Washington a entamé des discussions internes préliminaires sur l’utilisation d’actifs russes détenus aux États-Unis pour soutenir l’effort de guerre ukrainien, selon deux responsables américains.
Il n’est pas certain que Washington mette en oeuvre ces mesures dans l’immédiat, mais cela démontre l’existence d’un arsenal de mesures bien établi au sein de l’administration pour intensifier la pression, après que Donald Trump a imposé mercredi des sanctions à la Russie pour la première fois depuis son retour à la Maison-Blanche en janvier.
Donald Trump s’est positionné en artisan de la paix à l’échelle mondiale, mais il a reconnu que mettre un terme à la guerre de plus de trois ans menée par la Russie en Ukraine s’avère plus difficile qu’il ne l’avait anticipé.
Sa rencontre avec Vladimir Poutine en Alaska, en août, n’a pas permis d’avancées. Samedi, Trump a déclaré à la presse à Doha qu’il ne rencontrerait plus Poutine à moins qu’un accord de paix ne paraisse possible. « Je ne vais pas perdre mon temps », a-t-il affirmé.
Les alliés européens, confrontés aux revirements de Trump entre conciliation et colère envers Poutine, espèrent qu’il maintiendra la pression sur Moscou.
Un haut responsable américain a confié à Reuters qu’il souhaitait voir les Européens prendre la prochaine initiative majeure contre la Russie, qu’il s’agisse de nouvelles sanctions ou de droits de douane. Une autre source, informée de la dynamique interne de l’administration, a précisé que Trump devrait marquer une pause de quelques semaines afin d’observer la réaction de la Russie à l’annonce des sanctions de mercredi.
Ces sanctions ont visé les compagnies pétrolières Lukoil et Rosneft. Cette décision a fait grimper les prix du pétrole de plus de 2 $ et poussé les principaux acheteurs chinois et indiens de brut russe à chercher des alternatives.
Trump a indiqué samedi que, lors de sa rencontre prévue avec le président chinois Xi Jinping jeudi, les achats de pétrole russe par la Chine pourraient être abordés. Mais, selon Trump, la Chine réduit « très substantiellement » ses achats de pétrole russe et « l’Inde les réduit complètement », a-t-il déclaré à la presse.
SECTEUR BANCAIRE, INFRASTRUCTURES PÉTROLIÈRES
Une partie des sanctions additionnelles préparées par les États-Unis cible le secteur bancaire russe ainsi que les infrastructures permettant l’acheminement du pétrole sur les marchés, selon un responsable américain et une source proche du dossier.
La semaine dernière, des responsables ukrainiens ont proposé de nouvelles sanctions que Washington pourrait adopter, selon une source informée de ces échanges. Parmi leurs suggestions figuraient des mesures visant à couper tous les établissements bancaires russes du système basé sur le dollar avec des homologues américains, selon deux sources. Il n’est toutefois pas certain que ces demandes spécifiques de l’Ukraine soient sérieusement envisagées par les autorités américaines.
Certains sénateurs américains relancent l’effort pour faire adopter un projet de loi bipartisan de sanctions, longtemps bloqué. Selon une source informée de la dynamique interne de l’administration, Trump serait ouvert à soutenir ce texte. Toutefois, la source estime qu’un tel soutien est peu probable ce mois-ci.
Le département du Trésor n’a pas répondu aux sollicitations pour commentaire.
Kirill Dmitriev, envoyé spécial du président russe Vladimir Poutine pour l’investissement et la coopération économique, a déclaré vendredi croire que son pays, les États-Unis et l’Ukraine sont proches d’une solution diplomatique pour mettre fin à la guerre en Ukraine.
Halyna Yusypiuk, porte-parole de l’ambassade d’Ukraine à Washington, a salué la récente décision de sanctions, sans autre commentaire.
« Démanteler la machine de guerre russe est la manière la plus humaine de mettre fin à ce conflit », a écrit Yusypiuk dans un courriel.
UNE SEMAINE DE REBONDISSEMENTS
La décision de Donald Trump d’imposer des sanctions à la Russie a conclu une semaine mouvementée pour la politique ukrainienne de l’administration.
Trump s’est entretenu avec Poutine la semaine dernière et a ensuite annoncé que les deux hommes prévoyaient de se rencontrer à Budapest, prenant l’Ukraine au dépourvu.
Le lendemain, Trump a rencontré le président ukrainien Volodymyr Zelenskiy à Washington, où des responsables américains ont exhorté Zelenskiy à céder du territoire dans la région du Donbass dans le cadre d’un échange de terres déséquilibré pour mettre fin à la guerre. Zelenskiy a refusé, et Trump a quitté la réunion en estimant que le conflit devait être gelé sur les lignes de front actuelles.
Le week-end dernier, la Russie a envoyé une note diplomatique à Washington réitérant ses conditions de paix précédentes. Quelques jours plus tard, Trump a déclaré à la presse que la rencontre prévue avec Poutine était annulée car « cela ne me semblait tout simplement pas approprié ».
Interrogé vendredi par CNN après son arrivée à Washington pour des discussions avec des responsables américains, Dmitriev a affirmé qu’une rencontre entre Trump et Poutine n’avait pas été annulée, contrairement à ce qu’a déclaré le président américain, et que les deux dirigeants se retrouveraient probablement à une date ultérieure.
Deux responsables américains ont confié en privé qu’avec le recul, le projet avorté de Trump de rencontrer Poutine était probablement le fruit d’un excès d’optimisme. Après avoir obtenu un cessez-le-feu à Gaza, ces responsables estiment que Trump a surestimé sa capacité à capitaliser sur cet élan diplomatique pour en obtenir un autre.
Trump a finalement décidé d’imposer des sanctions à la Russie lors d’une réunion mercredi avec le secrétaire au Trésor Scott Bessent et le secrétaire d’État Marco Rubio, selon un haut responsable de la Maison-Blanche.