Carte interactive –
Quel niveau de formation domine dans votre quartier?
Pour la première fois, des données officielles révèlent le niveau de formation à l’hectare près en Suisse. L’écart entre villes et campagnes est saisissant.
En Suisse, le fossé entre villes et campagnes en matière de formation est considérable: par exemple, la commune de Lausanne compte 51% d’académiciens, contre seulement 19% dans la commune de Moudon (VD).
C’est ce que révèlent les nouvelles données officielles sur le niveau de formation de la population suisse âgée de 25 à 64 ans. Pour la première fois, ces données sont disponibles à l’hectare près (100 x 100 mètres), permettant de tirer des conclusions sur les communes ou encore les quartiers urbains (ndlr: vous trouverez davantage d’informations sur la méthodologie dans l’encadré au fond de l’article).
Notre outil interactif révèle le niveau de formation dans votre commune pour les années 1990 et 2022. Les données distinguent trois catégories: les diplômes tertiaires (hautes écoles, universités ou formation professionnelle supérieure), les diplômes du secondaire II (principalement l’apprentissage) et la catégorie «sans formation postobligatoire» (scolarité obligatoire uniquement). Pour chaque hectare, la carte affiche la catégorie de formation la plus représentée.
Le classement des communes 2022 vous permet de situer votre commune par rapport aux autres. En cliquant sur les en-têtes des colonnes, vous pouvez trier les données selon la catégorie souhaitée.
Les données montrent que l’expansion de la formation a touché l’ensemble de la Suisse depuis les années 1990. Dans toutes les communes, la proportion de la population détenant un diplôme du degré tertiaire a progressé. Seules 17 communes affichent une croissance du taux de diplômés tertiaires inférieure à 10% sur 30 ans. C’est notamment le cas de la station valaisanne de Loèche-les-Bains ou de la commune argovienne de Reinach.
Les académiciens dominent dans les grandes villes
Dans les cinq grandes villes suisses – Bâle, Berne, Lausanne, Genève et Zurich –, l’expansion de la formation a progressé plus rapidement que la moyenne nationale. En trente ans, Lausanne a vu sa population diplômée du tertiaire augmenter de 32%, Genève de 29% et Zurich même de 44%. Seules deux communes dépassent ce score: Kilchberg (ZH) avec une hausse de 49% et Ennetbaden (AG) avec 45%.
À Lausanne, on ne trouve aujourd’hui pratiquement plus un seul hectare où la population sans formation post-obligatoire ou titulaire uniquement d’un diplôme du secondaire II représente la majorité. Seules certaines zones urbaines périphériques font exception.
À Bâle, la situation est comparable. Seuls quelques quartiers périphériques du nord de la ville, comme Klybeck et Kleinhüningen, comptent encore une majorité d’habitants sans formation tertiaire. Partout ailleurs, les diplômés du tertiaire sont majoritaires.
Même dans la ville de Berne, une majorité d’académiciens vit désormais dans presque tous les quartiers. Seules les zones périphériques comme Bümpliz à l’ouest ou Murifeld à l’est de la ville font exception.
Dans les cinq grandes villes, la proportion de personnes titulaires d’un diplôme du secondaire II – généralement un apprentissage professionnel – reste donc faible. À Genève, seulement 23% des 25-64 ans appartiennent à cette catégorie de formation, contre 24% à Zurich.
Les communes proches des lacs Léman et de Zurich ont les taux de degré tertiaire les plus élevés
Les académiciens ne marquent toutefois pas seulement les villes de leur empreinte, mais aussi les communes situées dans des endroits privilégiés. Ainsi, la quasi-totalité des 50 communes affichant les taux les plus élevés de diplômes du degré tertiaire se trouvent dans les cantons de Zurich, Genève et Vaud – souvent au bord d’un lac et près des grandes villes. Ces communes figurent parmi les plus riches et les plus privilégiées de Suisse. Elles offrent de bonnes infrastructures et écoles, ce qui attire de nombreuses personnes bien formées – notamment des expatriés.
Le record est détenu par la commune lémanique de Tannay (VD): 78% des personnes âgées de 25 à 64 ans y possèdent un diplôme du degré tertiaire. La commune zurichoise de Kilchberg, située au bord du lac de Zurich, et la ville vaudoise de Saint-Sulpice, au bord du Léman, arrivent en deuxième et troisième positions avec 76% chacune.
Dans les communes rurales, l’apprentissage domine
La donne change complètement quand on examine les communes affichant les taux les plus élevés au niveau secondaire II (principalement des apprentissages professionnels). Parmi les 50 communes en tête de ce classement, presque toutes se situent dans l’Emmental ou l’Oberland bernois. Quelques-unes se trouvent en Valais. Les régions de montagne et les zones périphériques dominent largement. Dans l’Oberland bernois, la commune de Habkern détient le record suisse dans cette catégorie avec 73%. Deux autres communes bernoises – Walterswil et Kandergrund – atteignent des scores similaires avec chacune 71%.
Une étude de l’Université de Berne datant de 2016 a exploré ce fossé entre ville et campagne en matière de formation. Elle révèle ainsi que les structures locales d’une région orientent les jeunes dans leurs choix de formation. Concrètement, plus l’offre régionale d’éducation et de formation est diversifiée, plus les élèves ont tendance à opter pour une formation comme le gymnase. À l’inverse, quand l’offre de formation régionale est restreinte, les jeunes se tournent davantage vers l’apprentissage professionnel.
Lorsque l’école obligatoire domine, la proportion d’étrangers est souvent élevée
La catégorie «sans formation post-obligatoire» regroupe toutes les personnes âgées de 25 à 64 ans qui n’ont ni diplôme du secondaire II ni formation tertiaire. Autrement dit, ces personnes n’ont suivi que l’école obligatoire. La commune valaisanne de Täsch affiche le pourcentage le plus élevé: plus de la moitié de ses habitants (52%) n’ont pas de diplôme post-obligatoire. Spreitenbach (AG) et de Trimbach (SO) enregistrent également des valeurs très élevées, avec 36% chacune. Or de manière générale, de nombreuses communes présentant des taux élevés se situent en Suisse romande.
Il s’agit souvent de communes qui comptent beaucoup d’étrangers et offrent de nombreux emplois dans l’industrie ou la gastronomie. La commune valaisanne de Täsch, par exemple, détient le record suisse avec 61,5% d’étrangers. C’est d’ailleurs la seule commune suisse où la population étrangère, principalement portugaise, est majoritaire. En règle générale, ces personnes travaillent dans le secteur du tourisme à Zermatt, situé à proximité.
Les grandes villes comptent effectivement de nombreux étrangers, mais ceux-ci sont généralement mieux formés que leurs homologues vivant en zone rurale. Cette différence de niveau de formation explique pourquoi des villes comme Zurich et Genève, malgré leur forte proportion d’étrangers, affichent de faibles pourcentages de population dans la catégorie «sans formation post-obligatoire».
L’expansion du niveau de formation se poursuit
Selon le rapport sur l’éducation du Centre suisse de coordination pour la recherche en éducation, l’augmentation du nombre de personnes ayant une formation tertiaire en Suisse s’explique avant tout par la création des Hautes Écoles spécialisées et pédagogiques dans les années 1990. L’offre de formation s’est donc considérablement élargie. Les femmes, toujours plus nombreuses et mieux formées, contribuent également à cette évolution. À cela s’ajoutent les besoins de l’économie qui, avec la numérisation, requiert aujourd’hui des profils professionnels différents d’autrefois.
Enfin, des études révèlent un phénomène d’autorenforcement: la Suisse comptant de plus en plus de parents diplômés du tertiaire, leurs enfants s’orientent davantage vers les études supérieures. Ces parents souhaitent que leur progéniture atteigne au minimum leur propre niveau de formation, «afin d’éviter une baisse de statut», explique Rolf Becker, professeur de sociologie de l’éducation à l’Université de Berne.
Cette expansion du niveau de formation est loin d’être terminée: selon le scénario de référence de l’Office fédéral de la statistique, 66% des personnes âgées de 25 à 64 ans détiendront un diplôme tertiaire en 2055. Une nouvelle augmentation marquante se profile donc.
L’expansion du niveau de formation est en soi positive. D’autant plus que la proportion de personnes ayant seulement terminé l’école obligatoire a également diminué de 12% en 30 ans.
Toutefois, le taux de diplômés du secondaire II a également baissé durant la même période. En d’autres termes: la formation professionnelle classique perd donc du terrain.
Face à cette évolution, le Conseil fédéral évoque dans un rapport le risque qu’à l’avenir, l’économie – en particulier les PME – «manque de personnel qualifié formé à la pratique professionnelle». Les chiffres le confirment: les diplômes des hautes écoles ont davantage progressé ces dernières années que ceux de la formation professionnelle supérieure.
Pour revaloriser la formation professionnelle, le Conseil fédéral veut introduire de nouveaux titres: «Professional Bachelor» et «Professional Master». L’objectif est notamment d’accroître le prestige et la reconnaissance de cette filière. La proposition rencontre un accueil très favorable au Parlement: le Conseil des États a adopté en septembre la modification proposée par le gouvernement à l’unanimité (45 voix contre 0).
Pour la première fois, l’Office fédéral de la statistique (OFS) a publié des données sur le niveau de formation de la population résidante permanente suisse âgée de 25 à 64 ans, à l’hectare près (100 x 100 mètres).
Les données proviennent de plusieurs sources: la statistique démographique, le relevé structurel, la statistique du chômage ou encore l’enquête sur la structure des salaires. Ces registres et bases de données fournissent environ 90% des nouvelles informations sur le niveau de formation. Pour les 10% restants – notamment concernant les personnes sans formation connue –, l’OFS utilise un modèle statistique qui tient compte de l’âge, du sexe, du revenu, de la profession et du type de ménage. Ces résultats, considérés comme expérimentaux, font l’objet de mises à jour régulières.
Pour protéger les données personnelles, aucune valeur n’est indiquée lorsque moins de dix personnes âgées de 25 à 64 ans habitaient sur un seul et même hectare au moment de l’enquête, ou si plus de la moitié des informations font défaut pour cette zone. Cette règle explique pourquoi les zones urbaines présentent de nombreux hectares documentés, tandis que les régions rurales et peu peuplées affichent de nombreuses lacunes.
Détails sur les différentes catégories:
Tertiaire: universités, hautes écoles pédagogiques, Hautes Écoles spécialisées, écoles professionnelles supérieures
Degré secondaire II: entre autres, formation professionnelle initiale (apprentissage), écoles de culture générale, gymnases. En 2022, la formation professionnelle initiale représente 84% de cette catégorie.
Sans diplôme post-obligatoire/école obligatoire: cette catégorie comprend toutes les personnes qui ont terminé l’école obligatoire comme formation la plus élevée. Mais aussi, entre autres, celles qui ont commencé une formation de niveau secondaire II et ne l’ont pas encore terminée.
Traduit de l’allemand par Olivia Beuchat.
Newsletter
«Dernières nouvelles»
Vous voulez rester au top de l’info? «24 heures» vous propose deux rendez-vous par jour, pour ne rien rater de ce qui se passe dans votre Canton, en Suisse ou dans le monde.
Se connecter
Vous avez trouvé une erreur?Merci de nous la signaler.
0 commentaires