Face à la Russie, l’OTAN renforce sa présence en Roumanie. Sur les rives de la rivière Mureș, dans le centre du pays, des blindés français et des camions roumains franchissent un pont flottant motorisé. Cette manœuvre spectaculaire s’inscrit dans le cadre de l’exercice militaire Dacian Fall, organisé du 20 octobre au 13 novembre. Objectif : renforcer la coordination entre les forces alliées et démontrer la solidarité stratégique de l’OTAN à l’est de l’Europe.
Sous commandement français, une brigade multinationale, composée de contingents belge, luxembourgeois et espagnol, s’entraîne aux côtés de l’armée roumaine à des tirs réels et à des opérations de franchissement. Depuis 2022, la France maintient environ 1 500 soldats en Roumanie, déployés après l’invasion russe de l’Ukraine. En cas de crise, ce bataillon avancé doit être porté à une brigade de 5 000 hommes, une capacité que Dacian Fall cherche précisément à valider.
« Nous devons prouver notre aptitude à nous intégrer dans une division otanienne, tant au niveau des procédures que de la diffusion des ordres », explique le général Maxime Do Tran, commandant la 7e brigade blindée française. L’enjeu est également symbolique : il s’agit d’un signal adressé à Moscou, illustrant la cohésion et la réactivité du flanc est de l’Alliance atlantique.
Les exercices se déroulent dans plusieurs localités roumaines, suivant les véritables plans de défense de l’OTAN. À Alba Iulia, le capitaine Patrice observe avec fierté ses sapeurs manœuvrer la barge motorisée française : « Cet exercice nous permet de tester nos moyens lourds et notre capacité à nous projeter rapidement. » Non loin, les pontonniers roumains déploient leur propre dispositif, tandis que les équipages échangent leurs rôles pour renforcer leur interopérabilité.
Le colonel Jérôme Pâris, chef du détachement de génie français, rappelle que le franchissement de rivières reste une opération complexe : « En Europe, il y a un cours d’eau tous les 20 à 30 kilomètres. Les Russes l’ont appris à leurs dépens en 2022 sur la Donets. »
Plus au nord, à Bogata, d’autres unités s’exercent au « bréchage », une technique de destruction d’obstacles, avec l’aide de drones de reconnaissance. Pour le général roumain Dorin Toma, commandant des troupes de l’OTAN en Roumanie et en Bulgarie, les progrès sont considérables : « Nous sommes partis de rien, et après deux ans d’efforts, nous avons atteint un très bon niveau d’interopérabilité. »
Il reconnaît toutefois un défi à venir : maintenir ce niveau alors que les personnels et les systèmes d’armes évoluent. Cet exercice intervient alors que les États-Unis ont annoncé une réduction partielle de leur présence militaire en Roumanie — une décision sans impact militaire immédiat, selon le général Toma, mais « politiquement désordonnée ».
LNT avec AFP