Volodymyr Zelensky à Paris, le 17 novembre 2025. UKRAINE PRESIDENCY/UKRAINIAN PRE/ZUMA/SIPA
L’Ukraine et l’Europe sont face à un épineux dilemme, depuis l’annonce d’une proposition américaine pour mettre fin à la guerre déclenchée par la Russie en 2022. Si Washington juge ce plan « bon » pour les deux parties, il semble très favorable à Moscou : parmi les 28 points soutenus par Donald Trump et révélés par plusieurs médias, il est notamment demandé que Kiev cède des territoires occupés à la Russie, renonce à intégrer l’Otan, réduise ses forces armées et organise des élections dans la foulée. Faisant part d’inquiétudes partagées par d’autres leaders européens, le président ukrainien Volodymyr Zelensky l’a repoussé, promettant de proposer des « alternatives ». « Le Nouvel Obs » fait le point.
• Zelensky repousse le plan, malgré la crainte de perte du soutien américain
Volodymyr Zelensky a repoussé ce vendredi le plan américain, expliquant dans une vidéo à la nation que ces propositions augurent « une vie sans liberté, sans dignité, sans justice. »
« Nous traversons l’un des moments les plus difficiles de notre histoire », a-t-il reconnu, ne cachant pas son inquiétude face aux conséquences d’un refus de ce plan. « L’Ukraine pourrait être confrontée à un choix très difficile : la perte de dignité ou le risque de perdre un partenaire clé », les Etats-Unis.
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Plus tôt, le négociateur ukrainien Roustem Oumerov, secrétaire du Conseil de la sécurité nationale ukrainien, avait martelé qu’il ne peut y avoir de « décisions en dehors du cadre de notre souveraineté, de la sécurité de notre peuple ou de nos lignes rouges ».
• Les Européens inquiets pour la souveraineté territoriale de l’Ukraine
Après avoir reçu ce plan, Volodymyr Zelensky s’est concerté d’urgence vendredi avec les dirigeants français, allemand et britannique. Friedrich Merz, Emmanuel Macron et Keir Starmer ont salué les « efforts américains », selon un communiqué de la chancellerie allemande, et ont, avec le président ukrainien, « accueilli favorablement l’engagement pour la souveraineté de l’Ukraine et la volonté de lui accorder des garanties de sécurité solides ».
Mais les trois dirigeants ont appelé à trouver une solution au conflit en Ukraine impliquant « pleinement » Kiev, et assuré que toute décision nécessitait le « soutien conjoint et le consensus » des Européens et de l’Otan, a indiqué l’Elysée dans un communiqué. Les Européens souhaitent que « les forces armées ukrainiennes soient capables de défendre efficacement la souveraineté de l’Ukraine », là où le plan américain prévoit de brider l’armée ukrainienne, a précisé la chancellerie allemande. Ils se sont aussi engagés à « poursuivre l’objectif de préserver à long terme les intérêts vitaux européens et ukrainiens ».
« Rien ne doit être décidé sur l’Ukraine sans l’Ukraine », a martelé de son côté la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen après un appel avec Volodymyr Zelensky.
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Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, a également prévenu que toute « solution de paix » pour l’Ukraine devrait respecter son « intégrité territoriale », comme le dicte la charte de l’ONU et la loi internationale.
Un responsable américain a répondu à certaines inquiétudes en assurant que le plan pour l’Ukraine comprenait des garanties de sécurité de la part de Washington et de ses alliés européens équivalentes à celles de l’Otan en cas de future attaque, confirmant des informations de presse.
• Kallas accuse la Russie de tenter d’échapper aux sanctions
L’Union européenne a de son côté souligné que le plan américain ne lui avait pas été officiellement communiqué – nouveau signe de la tentative de mise à l’écart des Européens dans les négociations.
Mais la cheffe de la diplomatie de l’Union européenne, Kaja Kallas, a estimé que la Russie cherchait, avec l’annonce de ce plan, à empêcher l’entrée en vigueur des sanctions américaines contre ses exportations de pétrole et la discussion en cours à Bruxelles sur l’utilisation des avoirs de sa banque centrale gelés en Europe. « Nous devons être très fermes en disant avec nos partenaires d’Asie et d’Océanie, que nous ne tomberons pas dans ces deux pièges », a-t-elle ajouté.
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« Nous voulons tous que cette guerre se termine. Mais la manière dont elle se termine est importante : récompenser l’agression de la Russie ne rendra pas l’Ukraine, l’Europe ou la région indo-pacifique plus sûrs », a encore affirmé la cheffe de la diplomatie de l’UE.
• Zelensky promet de proposer des « alternatives »
Face au dilemme que lui pose ce plan américain, Volodymyr Zelensky a indiqué qu’il proposerait des « alternatives » au plan des Etats-Unis. « Je présenterai des arguments, je persuaderai, je proposerai des alternatives », a-t-il assuré, promettant qu’il ne « trahira » pas l’Ukraine. Il s’est entretenu avec le vice-président américain J.D. Vance dans l’après-midi.
Sans s’exprimer sur les inquiétudes du parti ukrainien, Donald Trump a lui donné une date limite pour que Kiev accepte son plan : il l’a fixée au 27 novembre. D’ici là, les dirigeants européens se retrouveront au G20, qui doit débuter demain en Afrique du Sud.