Pour décarboner le système énergétique suisse et de ne plus dépendre du nucléaire, il faudra nettement plus d’électricité issue de l’éolien et du solaire. C’est la conclusion d’un rapport d’un consortium réunissant plusieurs hautes écoles, publié jeudi.

Selon ce rapport, pour couvrir 60% des besoins en électricité de la Suisse d'ici 2050 avec de nouvelles sources d'énergie renouvelables, la capacité des installations solaires doit être quadruplée (archives).

Selon ce rapport, pour couvrir 60% des besoins en électricité de la Suisse d’ici 2050 avec de nouvelles sources d’énergie renouvelables, la capacité des installations solaires doit être quadruplée (archives).

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La Suisse prévoit de couvrir d’ici 2050 environ 60% de ses besoins en électricité avec de nouvelles sources d’énergie renouvelables telles que le photovoltaïque, l’éolien ou la biomasse. Le nouveau rapport a pour la première fois examiné en détail comment y parvenir, indique l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (EPFL) dans un communiqué.

Il en résulte que la capacité des installations solaires installées devrait être quadruplée par rapport à aujourd’hui et que la capacité des éoliennes devrait être multipliée par 80.

«Ce développement majeur du photovoltaïque et de l’énergie éolienne d’ici 2050 est presque inconcevable sans des subventions efficaces», souligne Giovanni Sansavini, professeur de fiabilité et d’ingénierie des risques à l’EPF de Zurich et l’un des co-auteurs de l’étude, cité dans le communiqué.

60% de renouvelable

L’approvisionnement énergétique neutre en carbone visé par la Suisse d’ici 2050 nécessitera l’électrification des transports, du chauffage et de l’industrie, faisant passer la demande annuelle d’électricité du niveau actuel de 56 térawattheures (TWh) à environ 75 TWh. Parallèlement, la contribution de 23 TWh des centrales nucléaires suisses devra être remplacée.

Le 9 juin 2024, 69% des votants ont approuvé la loi sur l’électricité, qui stipule que d’ici 2050, la Suisse couvrira environ 60% de sa demande d’électricité (soit 45 TWh par an) grâce à de nouvelles sources d’énergie renouvelables.

Dans la première étude du rapport, les scientifiques ont établi que la Suisse peut atteindre cet objectif de différentes façons. Toutefois, cela nécessitera un développement massif du photovoltaïque et de l’énergie éolienne. Sur les 45 TWh d’électricité, 28 TWh en moyenne proviendraient des systèmes photovoltaïques, 13 TWh des éoliennes et le reste de la biomasse.

En moyenne, la puissance installée du photovoltaïque en Suisse devrait passer de 6,4 gigawatts (GW) aujourd’hui à quelque 26,8 GW en 2050, soit quatre fois plus. Dans le cas de l’énergie éolienne, essentielle à la production d’électricité en hiver, un développement beaucoup plus important serait nécessaire. Plus précisément, la puissance devrait passer d’une moyenne de 0,1 GW aujourd’hui à quelque 8,4 GW en 2050, soit plus de 80 fois le chiffre actuel.

Limiter les importations

La loi sur l’électricité stipule également que les importations nettes d’électricité en hiver ne doivent pas dépasser 5 TWh. Si elle est appliquée strictement, cette règle nécessitera beaucoup plus d’énergie produite localement.

Par ailleurs, l’Union européenne pourrait réserver 70% de la capacité du réseau transfrontalier pour des échanges entre pays membres. Dans la première étude, les scientifiques modélisent donc l’impact d’une réduction de 70% du volume des échanges transfrontaliers d’électricité sur le mix énergétique et les coûts d’approvisionnement énergétique en Suisse.

Ils concluent que la puissance installée des éoliennes en Suisse devrait augmenter de 20% supplémentaires pour absorber cet impact. En outre, les coûts d’approvisionnement en électricité augmenteraient de 8% dans un tel scénario.

«Nos résultats démontrent de manière impressionnante à quel point il est important que la Suisse s’intègre parfaitement au marché européen de l’électricité. Sans intégration, non seulement le coût de l’approvisionnement en électricité, mais aussi l’électricité elle-même, deviendront plus chers.», explique Ambra Van Liedekerke, doctorante au sein de l’équipe de Giovanni Sansavini.

Baisse des revenus des ménages

Un autre volet du rapport modélise ce que l’objectif de zéro émission nette fixé dans l’Accord de Paris pourrait coûter à la population suisse. Les scientifiques supposent que les prix des énergies fossiles et les coûts de production de nombreuses marchandises augmenteront d’ici 2050 en raison des taxes sur le carbone et des échanges de droits d’émission.

Cela rendrait également de nombreux produits et services – tels que le logement, l’énergie, l’alimentation ou la mobilité – plus chers en Suisse. Tous les ménages suisses seraient touchés par la baisse des revenus et la hausse des prix entre 2020 et 2050, et pourraient donc potentiellement consommer moins, selon les auteurs.

Ce rapport «SWEET EDGE», élaboré dans le cadre du programme SWEET (SWiss Energy research for the Energy Transition) de l’Office fédéral de l’énergie, englobe de nombreuses études menées avec la participation des deux EPF, du WSL, des Universités de Genève et de Berne, ainsi que de la ZHAW.

https://www.research-collection.ethz.ch/handle/20.500.11850/735887