Droit de la famille –
Comment devient-on légalement parent en Suisse?
Une app comme Just a Baby démocratise l’accès à la parentalité, mais seuls le Code civil et la LPMA font loi en matière de filiation et procréation assistée. Interview d’un avocat.

En mettant en contact des personnes qui ne peuvent pas avoir d’enfants, par exemple des femmes célibataires, avec des hommes qui peuvent les aider à en concevoir un, l’app Just a Baby démocratise l’accès à la parentalité. Mais ne règle en rien les questions d’ordre juridique qui concernent la filiation, ou les complications induites par le recours à des donneurs de sperme hors des dispositions de la loi sur la procréation médicalement assistée (LPMA). Avocat spécialisé en droit de la famille, Guillaume Choffat décrypte le cadre légal en Suisse.
En Suisse, comment définit-on légalement le père et la mère d’un enfant?
Les règles sur l’établissement de la filiation sont régies par le Code civil (articles 252 à 269c). Elles sont complétées par les règles de la loi sur la procréation médicalement assistée (LPMA) s’agissant des méthodes de conceptions alternatives autorisées.
À l’égard de la mère, la filiation résulte du simple fait de la naissance. À l’égard du père, elle résulte d’une présomption légale de paternité si les parents sont mariés. Si, depuis l’entrée en vigueur du mariage pour tous au 1er juillet 2022, la mère est mariée à une femme au moment de la naissance et si l’enfant a été conçu au moyen d’un don de sperme conformément aux dispositions de la LPMA, alors l’épouse de la mère est l’autre parent de l’enfant. La filiation à l’égard du père peut résulter aussi d’une reconnaissance à l’état civil ou d’un jugement de paternité. Enfin, la filiation peut aussi résulter de l’adoption.
Quelles distinctions juridiques existent entre les couples mariés et ceux non mariés?
Les couples mariés bénéficient d’une présomption de paternité ou de parentalité. Ils peuvent recourir à l’adoption plénière, c’est-à-dire adopter conjointement un enfant, et à la PMA par don de sperme uniquement. Les couples non mariés (hétéros, lesbiens, gays) peuvent passer par l’adoption de l’enfant du partenaire, mais n’ont pas accès à la PMA en Suisse.
Et pour les célibataires?
Les célibataires peuvent adopter à certaines conditions, mais n’ont pas accès à la procréation médicalement assistée (PMA).
À qui s’adresse la PMA en Suisse?
La PMA est réservée aux couples à l’égard desquels un rapport de filiation peut être établi. Seul un couple marié peut recourir au don de sperme. Le don d’ovules, d’embryons ainsi que la maternité de substitution sont formellement interdits.
Quelle est la situation juridique d’un donneur?
Le donneur qui respecte la LPMA n’aura pas de liens avec l’enfant car l’action en paternité est exclue. S’il s’agit d’une méthode artisanale de PMA non autorisée, le donneur n’est plus protégé. Il pourra être recherché en paternité et en aliments. Des accords privés où le donneur renoncerait à ses droits ne valent rien, c’est un engagement moral qui n’est pas ratifié par un tribunal.
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À quels risques légaux les donneurs – qui passent notamment par l’app «Just a Baby» – s’exposent-ils? De quelles sanctions sont-ils passibles?
La LPMA prévoit plusieurs dispositions pénales. Une insémination, même si elle est réalisée de manière «artisanale», est une méthode de procréation médicalement assistée. Quiconque pratique la procréation médicalement assistée sans disposer de l’autorisation requise est puni d’une peine privative de liberté de trois ans au plus ou d’une peine pécuniaire. Les seules personnes autorisées sont des médecins qui ont une autorisation cantonale. La LPMA punit aussi d’une amende de 100’000 francs au plus quiconque, intentionnellement, applique une méthode de procréation médicalement assistée sans indication prévue par la loi, par exemple.
Quels changements légaux se profilent?
Le don d’ovules devrait être autorisé bientôt en Suisse, aussi bien pour les couples mariés que non mariés. Le Conseil fédéral a présenté en janvier 2025 les grandes lignes visant à légaliser cette pratique. Le projet de révision de la loi devrait être mis en consultation fin 2026.
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