Votation à Genève –
«Les lois corsets rendraient la situation dramatique à l’Hôpital»
Des aides-soignantes témoignent du manque de personnel à l’Hôpital, craignant une situation pire si les freins aux dépenses de l’État étaient acceptés.

Genève, le 6 octobre 2022 aux Hôpitaux universitaires de Genève. Visite des nouveaux locaux des Urgences, alors que les travaux étaient encore en cours.
Laurent Guiraud
Des employés de l’Hôpital cantonal ont tiré la sonnette d’alarme lundi: si la population accepte les «lois corsets» le 28 septembre, la situation deviendrait, selon eux, «dramatique» pour le personnel et donc pour les patients.
«L’Hôpital est déjà en manque de bras», affirme Sandra Froidevaux, secrétaire syndicale au SIT devant la presse. Ces nouveaux freins aux dépenses empêcheraient, en cas de déficit budgétaire, toute hausse de personnel fixe à l’État et toute augmentation des charges excédant proportionnellement la croissance démographique.
«Cette corrélation ne tient pas compte des besoins, estime Sandra Froidevaux. La croissance démographique entre 2014 et 2024 était de 10% pour 25% de personnes soignées en plus à l’Hôpital durant la même période. En cas de déficit budgétaire – soit presque tout le temps –, faudra-t-il couper ailleurs pour répondre aux besoins de l’Hôpital?» Et la syndicaliste de souligner que la situation est difficile partout, avec une hausse par exemple de 54% des dossiers à l’Hospice général en dix ans.
La conférence de presse s’est concentrée sur le Département de médecine aiguë où la consigne, selon la syndicaliste, serait déjà de limiter les nouveaux engagements à une hausse de 1%. «Ce sont les lois corsets avant les lois corsets. Mais les accepter serait encore pire, car le mécanisme deviendrait légalement contraignant.» Contacté, le porte-parole de l’Hôpital admet qu’il y aura «un budget d’efficience nécessitant une rigueur certaine».
Le manque de personnel met déjà en souffrance les équipes, selon des aides-soignantes. «Cela se répercute sur la prise en charge des patients, en faisant augmenter les risques», souligne Marie-Jo Martinez, représentante du Syndicat des services publics travaillant à l’accueil des proches aux soins intensifs.
Selon elle, depuis l’ouverture de ce service aux familles 24 h/24, il n’y a plus que deux aides-soignantes dès 21 h, contre quatre auparavant, lesquelles doivent en plus se charger de l’accueil. Impossible d’accompagner correctement ces personnes, ajoute l’employée.
Quant aux soins, «c’est un travail à la chaîne». Pour libérer des lits faute d’infirmiers en suffisance, les patients les moins mal en point sont dirigés vers les soins intermédiaires, d’où ils reviennent souvent un ou deux jours plus tard.
Troubles musculosquelettiques
Au Service d’anesthésiologie, le manque de personnel s’ajoute au fait que, depuis un an, les aides-soignantes doivent «ranger le magasin», c’est-à-dire notamment porter de lourdes caisses remplies de matériel. «Un audit a démontré une hausse en flèche des troubles musculosquelettiques parmi le personnel», déclare une aide-soignante.
En outre, l’explosion du nombre de patients résistant aux antibiotiques accroît la charge de travail. Car, au vu du protocole, le nettoyage du bloc prend plus d’une heure au lieu de dix minutes.
Enfin, Orazio Gilestro, aide-soignant, représentant du SIT et du personnel, affirme que la projection du nombre de patients pour 2040 serait déjà atteinte aujourd’hui, sans que le personnel suive. En particulier, les aides-soignants chargés de la salle d’attente ne peuvent surveiller les patients qui attendent dans le corridor où il n’y a ni sonnette d’alarme ni contact visuel avec le personnel, une configuration «dangereuse».
Le porte-parole de l’Hôpital reconnaît des consultations plus nombreuses que prévu justifiant «de nombreuses mesures pour les réduire», citant par exemple «l’application InfoMed qui aide les personnes à consulter les bons spécialistes en fonction de leur symptomatologie».
Certes, «il y a une hausse du nombre de postes, mais pas sur le terrain», poursuit le délégué du personnel. Il y avait trois infirmiers responsables avant la rénovation, contre plus de dix postes hiérarchiques aujourd’hui. Une tendance qui serait générale à l’Hôpital.
Selon la droite parlementaire, les freins aux dépenses visent, justement, à pousser à un rééquilibrage des forces en faveur du terrain. «Les réorganisations se feront sur le dos du personnel, à qui on demandera encore plus de polyvalence», rétorque Sandra Froidevaux.
Depuis 2022, en médecine aiguë, l’ensemble des postes ont été attribués sur le terrain et un travail important a été réalisé pour diminuer l’encadrement, selon l’Hôpital.
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