La mode, ennemie des femmes ? • FRANCE 24

[Musique] Bonjour à toutes et à tous et bienvenue dans cette édition d’actuel consacrée à la mode. La période des défilés commence et avec elle cette question : “Où sont les femmes ?” Sur les podiums, on les voit en effet, mais en coulisse, les hommes qui dirigent les grandes maisons de couture sont beaucoup plus nombreux. Parmi les nouveaux grands noms de la mode, il n’y a que deux femmes qui émergent cette saison et plus d’une dizaine d’hommes pour prendre la direction artistique de ces entreprises. Le temps des créatrices illustre comme Coco Chanel, Madeleine Vionet, Elsas quiarelli, Vivienne Westwood ou encore Sonia Riel semble derrière nous. Un couturier exerce-t-il un autre métier qu’une couturière ? On en parle avec notre invité. Bonjour Saveria Mandela. Bonjour. Vous êtes journaliste mode, créatrice du podcast les gens de la mode. Merci beaucoup d’être avec nous. Et on va commencer avec cette question sur les chaises musicales régulières qui ont lieu dans l’industrie de la mode et en particulier de la haute couture avec ces changements à la tête des directions les directrices artistiques des grandes maisons de couture notamment un certain nombre de femmes qui se voi remplacer de plus en plus souvent par des hommes. C’est le cas récemment avec Maria Gradia Curi pour Dior et puis avec Virginie Viiard chez Chanel qui ont été remplacés respectivement par Jonathan Anderson et Mathieu Blazi. À votre avis, pourquoi est-ce que ces groupes de mode semblent préférer les hommes ? Je crois que c’est un biais systémique plus large que la ça ne concerne pas que la mode, c’est parce qu’ils sont plus nombreux. euh peut-être qu’ils savent se faire mieux voir à des moments donnés de leur carrière et euh donc ça se répercute euh quand on en arrive à un stade de carrière dans la carrière du directeur artistique où on est célèbre et où on est embauché pour des postes importants. Euh toutes ces années d’entraînement à prendre de la place dans l’espace public et à être là au bon moment se retrouve ensuite quand il quand il s’agit de choisir une personnalité créative célèbre et on a plus d’hommes que de femmes. Je vais peut-être me présenter comme quelqu’un de conservateur à travers ça, mais est-ce que finalement euh on n’imaginerait pas qu’une femme serait euh plus à même d’habiller les femmes, qu’elle sait mieux ce qu’est une vie de femme, ce que c’est que de marcher avec des talons, ce que c’est de courir avec des courses, d’aller d’un endroit à l’autre pour récupérer les enfants parce que finalement c’est pas plus simple d’avoir une femme pour habiller des femmes ? Euh, il y a des directeurs artistiques contemporains qui comprennent très bien tous ces aspects-l. Je pense notamment à Nicolas Diffelich chez Corège, mais je vous rejoins totalement. Euh on est peut-être conservatrice mais bon, on expérimente le vêtement et c’est vrai que moi en tant que cliente, peut-être pas en tant que professionnel de mode, mais en tout cas en tant que cliente, je me retrouve avec des vêtements bien plus pragmatiques quand j’achète auprès de créatrices femmes comme Phibifilo, Victoria Beckham que quand j’achète auprès de marques gérées par des créateurs hommes où ça va plus relever du vêtement spectaculaire mais pas forcément pratique. Est-ce que ça veut dire que pour qu’une femme soit la tête d’une maison euh de couture, il faut que ce soit sa maison de couture, que ce soit elle qui l’ai créée ? Je trouve qu’actuellement, oui, on en est là et il y a davantage de directeurs artistiques positionnés dans les maisons de luxe. Il y a certes quand même beaucoup de directrices artistiques femmes, elles existent, elles sont peut-être moins visibles, mais elles existent. En revanche, ce qui est clair, c’est que la plupart d’entre elles sont à la tête de leur propre maison. Là par exemple, le média professionnel Business of Fashion a fait elle fait les calculs euh pendant la fashion week de Paris sur les 10 marques dont on parle le plus. Seulement trois sont gérés par les femmes et ce sont les trois aux fondé elles-mêmes. Stella Macarty, Victoria Beckam et Mew pour Mew Chaprada. Donc il y a cet effet qu’on entend dans les discours féministes depuis des années de finalement quand on est une femme, il faut tout faire toute seule. Je vous propose qu’on écoute Audre Millet. Elle est historienne spécialiste de la mode, autrice du livre noir de la mode aux éditions les pérégrines sur ce que les femmes apportent justement en tant que créatrice. Elle est au micro de Jennifer Benbrahim. Les créatrices apportent aux femmes une liberté. Elles engoncent beaucoup moins le corps féminin que les hommes ne le font. parmi ces ces femmes qui ont libéré les femmes, qui ont apporté quelque chose à Sonia Riel qui avec ses petits gilets en maille, ses petites robes faciles à porter pour aller travailler euh a véritablement libéré le corps et a permis aux femmes de marcher, de courir derrière le tramoué, derrière le métro. Donc ces créatrices ne se contentent pas de produire un vêtement. Elles apportent aussi une sensibilité vécue et une sensibilité critique des des normes patriarcales. Elle semble plutôt d’accord avec vous Audre Mier. Est-ce que finalement ce qu’il faut retenir c’est que un homme couturier en fait il habille une femme comme lui les voix, c’est-à-dire avec un un mail gaz finalement. Oui, en tout cas, c’est l’héritage que les directeurs artistiques ont puisque tout au long du 20e siècle, dans la deuxème moitié, là où c’est la mode contemporaine comme on la connaît aujourd’hui, c’est comme ça que les historiens datent, à partir des années 50, disons, beaucoup d’hommes couturiers célèbres dont Christian Dior ont créé une vision de la femme fantasmée, la femme idéale selon eux. Et c’est quelque chose qu’on a entendu ensuite chez McQueen, chez John Gallano de dire “Moi, c’est la femme comme ça que je la vois. Moi, je suis inspirée de la femme aristocratique, de la danseuse de c de ça, de créer des stéréotypes comme ça et même si aujourd’hui c’est moins verbalisé de façon aussi stigmatisante, effectivement ça reste une vision projetée, une projection, un fantasme. Et qui embauche en fait les directeurs et directrices artistiques des grandes maisons de couture ? Je suis pas dans le processus et je ne candidate pas à ce type de poste. Je ne saurais pas exactement dire mais en gros, il y a des chasseurs de tête qui sont missionnés par les maisons de luxe euh pour commencer à faire des entretiens et à discuter. Mais après, il y a pas comme en F1 mais disons que à peu près il y a 20 grands postes, il y a 20 pilotes de F1, il y a 20 grands directeurs artistiques des 20 plus grandes marques au monde. Ils savent très bien qu’il reste une dizaine de profils environnants qui sont déjà directeurs artistiques de grande maison et qui pourraient potentiellement convenir. Donc ils sont appelés, c’est un tout petit milieu. Est-ce qu’on voit davantage les hommes directeurs artistiques comme des chefs d’entreprise plutôt que comme des créateurs et les femmes plutôt comme des personnes qui sont déconnectées du monde de l’industrie, de la finance, qui ne voi pas en terme de de croissance de marque. Je ne sais pas euh mais ça serait une énorme erreur de le voir comme ça étant donné que l’une enfin la designer qui a le mieux vendu ces dernières années, c’est Maria Gradzaakuri chez Dior. Donc de penser que les femmes n’auraient ne pourraient pas avoir la double casquette, ce serait une énorme erreur. Ce qui est surprenant d’ailleurs chez chez Dior qui est une des plus grandes maisons de couture, des plus anciennes, des plus connues en tout cas au monde, c’est que c’était la première femme à ce poste. H Oui. Dior a beaucoup travaillé avec sa sœur qui a d’ailleurs été résistante et emprisonnée pendant la Seconde Guerre mondiale, mais elle avait un rôle dans l’ombre en effet. C’est la première femme à ce poste et on a encore des maisons aujourd’hui qui n’ont jamais eu de femmes en la direction artistique et pourtant elles sont très présentes dans les maisons de couture parce que même si on a souvent un homme qui dirige dans les ateliers les couturiers sont des couturières des premières d’atelier c’est quand même très largement féminin. Oui, la couturière. Le couturier où le terme est beaucoup plus noble et c’est l’équivalent du directeur artistique aujourd’hui a majoritairement été endossé par des hommes à l’exception de comme vous le disiez Gabriel Chanel, Madeleine Vion, Caparellie. Euh est-ce qu’on peut dire fondamentalement que la mode et le féminisme sont des termes compatibles ? Est-ce que ça n’est pas fondamentalementque ? Non non, moi je je crois que c’est fondamentalement compatible parce que le vêtement c’est un moyen de maîtriser le message qu’on renvoie de soi. Donc à partir de là, on peut porter euh il faut au contraire s’intéresser à la mode, je pense en tant que femme pour reprendre aussi le contrôle de son image et savoir quelles informations on veut renvoyer, quel code on veut accepter que l’autre décode de nous. Je vous propose qu’on écoute d’ailleurs l’opinion d’audre toujours au micro de Jenny Benbrahim sur ce sujet. Le féminisme a longtemps vu dans la mode un instrument d’aliénation, l’hypersexualisation des femmes, la réduction également de leur identité à leur apparence et toutes les polémiques que l’on connaît sur l’anorexie et l’uniformisation des corps. Mais la mode est aussi un outil d’émancipation, un moyen de s’affirmer. Elle permet aux femmes de réaffirmer leur identité, de se montrer créative et c’est un terrain d’expression d’une manière générale pour les minorité. Donc il est possible de les faire dialoguer. On est toujours un peu dans l’ambivalence avec la mode. Oui, mais je pense que c’est bien pour ça qu’aujourd’hui il y en a pour tous les goûts et qu’il y a plus spécialement de notions de tendance. C’est que la mode s’est dit que pour arrêter d’être antinomique d’une saison sur l’autre, il valait peut-être mieux que chacun fasse ce qu’il veut. Et ça passe aussi par certains créateurs qui vont adorer le plat euh ou les chaussures très épaisses mais très confortables type Nicolas Gesquer chez Louis Vitton et d’autres créateurs qui ne jurent que par les talons et au moins aujourd’hui il y en a pour tout le monde. Là où dans les siècles passés en effet une mode comme celle du corsé qui était contraignante pouvait durer des siècles. On a parlé des créatrices dans l’industrie et de la mode. Il y a aussi donc les clientes et les modèles et cette mode de l’ultra maigreur qu’on pensait révolue avec le retour en tout cas l’arrivée de la body positivity des modèles plus size Natacha Vesnich et Olivia Salazoir Winspear se sont intéressés à ce phénomène et à ses limites. La maigreur est de retour sur les podiums. Les derniers défilés de mode parisien en sont le témoin. Pourtant, des mannequins grande taille comme Hashle Gram ont déjà défilé pour Dolch et Gabana, Christian Cyriano ou encore Michael Corse. La française Lesli Sidora était récemment les gér de grandes marques de prêt à porter. Mais aujourd’hui, le body positivisme qui prône l’acceptation de soi se fait de plus en plus discret. Selon VOG Business, 0,8 % des mannequins de la Fashion Week printemps été 2025 étaient de taille non standard. Un chiffre en net recule par rapport à il y a 5 ans. Même les modèles confirmés voient leur contrat fondre comme neige au soleil. On se connaît toutes, on connaît celle qui travaille le plus. Et même quand ces fillesl n’ont plus de contrat, qu’elle t’écrivent pour te dire “Moi aussi je recommence à servir des cafés, c’est qu’il y a un vrai problème.” Les marques qui s’étaient lancées sur les grandes tailles font marche arrière. Old Navy par exemple proposait des tailles au-delà du 60 en magasin. Un an plus tard, presque toutes les grandes tailles ont disparu des rayons. Le retour de la maigreur sur les podiums se reflète aussi chez les célébrités et les influenceurs. Dernier exemple, l’actrice Lily Collins, photographiée à l’occasion du défilé Calvin Klein à New York a été vivement critiquée sur les réseaux sociaux pour son corps jugé trop maigre. Mais paradoxalement sur ces mêmes réseaux, un phénomène baptisé skinny relait des vidéos prenant des régimes extrêmes. Un phénomène dénoncé par des médecins et des parents qui appellent TikTok à mieux encadrer ses dérives. Si des pathologies graves comme l’anorexie ne sont pas nouvelles, l’utilisation de certains médicaments utilisés comme coupe fin inquiète certains experts. Ils affirment que les médicaments comme l’Omampique, un antidiabétique détourné pour maigrir, ont changé la donne. Des personnalités de premier plan comme Serena Williams en recommande même l’utilisation, comme dans cette publicité pour une firme de télémédecine qui commercialise des analogues de l’ospique. L’actrice Rebelle Wilson, mais aussi l’animatrice Opra Winfrey ont aussi admis y avoir eu recours pour contrôler leur poids. reste la question de fond, celle de l’apparence dans une industrie où l’image est rene et où la diversité corporelle ne semble toujours pas être la priorité. [Musique] Veria, à quel moment c’est devenu désirable d’être extrêmement maigre ? à partir des années 90, euh on a les top modèles donc qu’on a tout encore en tête, Claudia Chiffer, Cindy Crawford, Naomi Cambell dans les années 80 qui sont progressivement remplacés début 90 par Kate Moss. Kate Moss qui en fait une enfant euh quand elle est recrutée, elle a 14 ans et quand elle devient très célèbre, elle en a 16. Puis elle fait sa première campagne qu’Elvin Klein n’a pas tout à fait 18. Donc elle a encore d’enfants, sauf que son visage séduit tellement parce qu’il apparaît dans un magazine pour jeunes qui s’appelle The Face qu’à partir de là, les bookeurs de mannequins, donc les chasseurs de tête de mannequin vont se mettre à chercher ce même type de physique très androgène parce que pas encore formé mais connu du grand public, très enfantin. Et donc on va aller vers les pays de l’Est, recruter des filles plus fines avec des traits plus fins, plus doux que ceux de d’Europe centrale et cetera. Et donc bah arrive petit à petit une maigreur consentie dans le milieu de la mode. Parce que aujourd’hui les mannequins qui défilent, c’est plus du 36, c’est même pas du 34. C’est quoi ? C’est taille 32. Oui, ce qui vaudrait pour ça équivaudrait pour nous qui faisons à peu près globalement 1,65 682 mais après les filles font 1,80 minimum grand minimum 1,75 donc pour elle ça fait des 34 36 mais les mannequins très maigres défilent surtout en haute couture parce qu’on cherche quand même des des mannequins plus minces pour porter des vêtements prototypes. Et dans ce cas-là, on pourrait dire que ça équivaudrait à 34. Moi, moi personnellement, ça me fait pas envie quand je quand je vois des vêtements, j’ai envie de d’avoir l’impression que la personne a mangé les 15 jours qui précèdent, mais c’est peut-être mon opinion personnelle. Allez, on va finir cette émission sur une note positive tout de même. Quels sont les talents féminins que vous avez repéré qui d’après vous seraient les grands noms de demain ? Regardez du côté de la Fashion Week de New York, il y a beaucoup de créatrices qui ont lancé leur marque et qui maintenant y défilent. Je pense notamment à Catherine Holstein qui a fondé la marque Kate et qui elle est une vraie business woman euh ce qu’elle incarne dans ses vêtements d’ailleurs, mais en plus d’être une excellente créatrice et puis Simon et Rocha c’est c’est très romantique, c’est très recoco, mais elle est excellente. Et ben merci beaucoup pour ces noms. On va garder un œil sur ces personnes prometteuses et merci à vous Sveria Mendela d’être venu nous parler de ce monde de la mode de plus en plus masculin mais on ne perd pas espoir. Et puis merci à vous de nous avoir suivi. À très bientôt sur France 24.

Les Fashion Weeks commencent un peu partout dans le monde et avec elles cette question : où sont les femmes ? Sur les podiums, elles sont omniprésentes, mais en coulisses, les hommes qui dirigent les grandes maisons de couture sont beaucoup plus nombreux. Dans les dernières sélections de directeurs artistiques, seuls deux noms de femmes émergent contre une dizaine d’hommes – et bien peu de diversité. Laure Manent s’entretient avec la journaliste mode Saveria Mendella, créatrice du podcast “Les gens de la mode” pour comprendre si l’époque des créatrices illustres comme Coco Chanel, Elsa Schiaparelli ou Vivienne Westwood est révolu et ce qui fait la différence entre la mode créée par un homme et celle imaginée par une femme.
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7 comments
  1. Le véritable sujet grave n’est pas seulement la sous-représentation des femmes dans la mode, mais surtout l’impact colossal de cette industrie sur les animaux et l’environnement 🌍💔. Comment peut-on encore passer sous silence les souffrances animales derrière le cuir, la fourrure, la laine… et la pollution massive causée par la fast fashion? Ne pas en parler, c’est ignorer la dimension la plus urgente et essentielle.

    The real pressing issue is not only the lack of women in leadership roles, but the devastating impact of the fashion industry on animals and the environment 🌍💔. How can we keep ignoring the cruelty behind leather, fur, wool… and the massive pollution caused by fast fashion? Not addressing this means overlooking the most urgent and essential part of the discussion.

  2. Les lululemons et compagnie font énormément de mal aux ados.

    Aussi les actrices américaines qui font les pubs de parfums français? Pourquoi?

  3. C’est quand même triste de voir que les femmes n’ont pas été capables de s’imposer dans ce milieu. Ça en dit beaucoup sur une certaine forme de colonialisme , et de soumission.

  4. Les mecs sont a ces postes parce qu'ils ont taffé autant qu'une femme, n'en déplaise a certains. Les changements des DA c’est parce que l'air du temps change.Chiuri est restée 8 ans chez Dior et prends la direction artistique de Fendi.Qui dit mieux. Ces maisons ont besoin de se renouveler.

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