Les jeunes issus de la formation professionnelle seraient de plus en plus nombreux à se désengager de la politique. Selon une étude de l’Université de Lausanne, ils ne se reconnaissent pas dans les personnes élues et ont l’impression que la politique n’est réservée qu’aux experts.

D’après Vanessa Juarez, chercheuse à l’UNIL et co-autrice de l’étude publiée dns la revue Journal of Community & Applied Social Psychology, voter est un geste “plus compliqué” qu’il n’y paraît pour les jeunes apprentis.

Dans Forum samedi soir, elle relève que pour les 99 jeunes Romands en formation rencontrés entre 2021 et 2022 pour l’enquête, “voter n’est pas seulement un geste technique. C’est aussi une relation à la politique, à l’Etat, à la communauté, c’est se sentir appartenir, avoir l’impression de faire quelque chose de bien pour la communauté et que sa voix est entendue”.

Ils pensent que la société les voit différemment de ceux qui ont fait des études universitaires

Vanessa Juarez, chercheuse à l’UNIL et co-autrice de l’étude

Or, les entretiens ont débouché sur un constat commun: les jeunes en apprentissage n’ont pas l’impression que ce soit le cas.

Ils estiment que “les personnes au pouvoir ne les entendent pas parce qu’ils sont jeunes et beaucoup d’entre eux se sentent dévalorisés car ils sont apprentis”, rapporte la chercheuse au laboratoire de psychologie sociale de l’Université de Lausanne.

Pas représentés

Et puis, les apprentis rencontrés ne se reconnaissent pas dans les politiciens suisses, “des hommes, blancs, vieux, qui portent des ‘costards-cravate’, qui ont des voitures de luxe et qui parlent comme dans les livres”.

“Avez-vous l’impression que ce portrait, caricatural, ressemble à notre classe?”, ont-ils demandé à Vanessa Juarez. “Pour eux, non”.

Manque de compétences

Par ailleurs, “ils ne se sentent pas compétents. Ils ont l’impression que la politique est réservée aux experts, aux personnes qui ont fait de grandes études, qui ont de grandes connaissances. Eux ne se sentent pas capables”.

Or, ce phénomène a pour conséquences d’avoir une sur-représentation des personnes avec un haut degré de formation dans les Parlements, “dans les votations” et dans “les élections fédérales”, relève Vanessa Juarez qui évoque une “problématique au niveau de ce que devrait être la démocratie”.

Pour changer la donne, ces apprentis ont de nombreuses idées, selon Vanessa Juarez. “Ils aimeraient avoir accès à une formation”, comme des cours de civisme, mais surtout “des cours où ils peuvent débattre, apprendre à se forger une opinion, savoir rechercher l’information, rencontrer des politiciens et aller dans les lieux où se passe la politique pour voir que c’est quelque chose de vivant. Pas juste des chiffres à recracher lors d’un test”.

>> Pour aller plus loin sur le sujet, lire aussi : Les jeunes Suisses et les politiques, histoire d’une déconnexion croissante

Propos recueillis par

Article web: Julie Marty