Publié23. octobre 2025, 09:00
Logement au Luxembourg: Le marché locatif est-il devenu largement hors la loi?
L’expérience des locataires sur le marché locatif privé sera discutée ce jeudi après-midi à la Chambre des députés.

La règle de plafonnement des loyers ne semble pas être respectée, notamment pour les logements locatifs acquis voilà plusieurs années.
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Malgré l’augmentation des prix de vente des logements, le Luxembourg «reste majoritairement un pays de propriétaires, indique l’Observatoire de l’habitat. Néanmoins, leur proportion tend à diminuer». La proportion de locataires est ainsi passée de 28% en 2013 à 33% en 2023 et le taux d’effort des locataires atteint désormais 39%, soit un petit point en dessous du seuil de 40% considéré comme surcharge, selon la note n°44 de l’organisme. L’expérience des locataires sur le marché locatif privé sera d’ailleurs discutée ce jeudi à la Commission du Logement et de l’Aménagement du territoire de la Chambre des députés.
En principe, la loi sur le bail à usage d’habitation est là pour «assurer aux locataires une protection» en tant que «partie économiquement la plus faible au contrat de bail». En théorie, «la location d’un logement à usage d’habitation ne peut rapporter au bailleur un revenu annuel dépassant un taux de 5% du capital investi dans le logement». En pratique, la règle de plafonnement ne semble pas être respectée, notamment pour les logements locatifs acquis voilà plusieurs années, si l’on analyse les offres.
«La législation autour des 5% actuellement en vigueur est une réglementation inapplicable sur le terrain et peu transparente»
Entre le 1er juillet 2024 et le 30 juin 2025, l’Observatoire de l’habitat a recensé 9 816 offres de location d’appartements. Près de 70% provenaient de seulement quatre communes: Luxembourg-Ville, Esch-sur-Alzette, Mamer et Strassen. Durant cette période, les montants de loyer moyens demandés pour les offres dans ces communes s’élevaient à 44,34 €/m² (soit un loyer moyen de 2 217 euros pour 50 m²) pour Luxembourg-Ville, 39,40 €/m² pour Esch-sur-Alzette, 36,67€/m² pour Strassen et 34,74 €/m² pour Mamer.
En vertu de la règle de plafonnement des loyers, le capital investi moyen correspondant à ces annonces devrait, au minimum, s’élever à 10 640 €/m² (44,34 fois douze, divisé par 5%) pour les annonces de Luxembourg-Ville, 9 455 €/m² pour celles d’Esch-sur-Alzette, 8 800 €/m² pour celles de Strassen et 8 337 €/m² pour celles de Mamer. D’après les chiffres officiels du ministère du Logement, de tels niveaux de prix n’ont été enregistrés qu’à partir de 2016 pour Luxembourg-Ville et Strassen, 2019 pour Mamer et 2021 pour Esch-sur-Alzette.
Autrement dit, pour que les loyers moyens demandés soient justifiés au regard de la loi, il faudrait que l’écrasante majorité des offres locatives concernent des biens parmi les plus luxueux achetés il y a seulement quelques années. Même si le ministre du Logement a déclaré en février 2025 que «le plafond des loyers doit être respecté à tout moment par le bailleur», la règle des 5% semble plus n’être qu’un vestige juridique qui masquerait mal un marché locatif devenu largement hors la loi. Le ministre du Logement a d’ailleurs déclaré ce mois-ci que «la législation autour des 5% actuellement en vigueur est une réglementation inapplicable sur le terrain et peu transparente».
(ol)