Choses qui arrivent : Touhfat Mouhtare raconte l’exil, la clandestinité et la force d’écrire
On passe à la culture dans ce J avec un récit fort, sensible et politique. Chose qui arrive et nouveau. Et le nouveau livre de l’autrice comorienne TFAT Moutaré, elle y raconte la traversée de la clandestinité après la perte de son statut d’étudiante en France. La peur de l’effacement mais aussi la force de l’écriture, un récit de femme, d’exil, de résistance dans une langue fine, poétique, parfois drôle. Tout fat Moutaré, merci d’être avec nous et bienvenue dans votre JTA sur France 24. Merci à vous de m’accueillir Fatimat. Alors, vous êtes né comorienne, vous avez grandi entre les Comor et plusieurs pays d’Afrique sub-saharienne avant de poursuivre vos études en France dans cette trajectoire d’ailleurs que ce nou récit, choses qui arrivent. J’aimerais, une chose n’est pas coutume, démarrer cet entretien euh par vous demander si vous voulez bien nous lire vraiment le début de ce livre. afin que les spectateurs aient un peu votre langue qui est absolument merveilleuse dans les oreilles. La joie, il ne faut pas se réjouir trop et trop longtemps. Cela te rend aussi perméable qu’un bout de pain plongé dans du thé. Tu gonfles, tu gonfles et tu finis par exploser. Nous ris, ma meilleure amie et moi, de cette théorie qui nous vient de sa mère. Pourtant, je me surprends moi-même à écourter mes joies. Éc les joies, il ne faut pas se réjouir trop et trop longtemps. Ça sonne comme quelque chose d’assez défétiste dans le les livres. J’invite d’ailleurs les spectateurs évidemment à l’acheter et à le découvrir vous-même. Pourquoi avez-vous décidé de commencer comme ça sur ce livre, ce récit ? Parce que je pense que lorsqu’on vient d’espacces, je dis espaces au pluriel qui sont en désavantage sur les chiquiers économiques ou géopolitique très souvent et bien le territoire auquel on a le moins accès, c’est l’intimité, c’est la légèreté, c’est la joie. Et en fait cette cette injonction là que l’on a entendu, mon ami et moi, et bien c’est ce n’est même pas une injonction, c’est une forme de mise en garde. Attention parce que si tu es beaucoup trop joyeuse, étant donné les circonstances actuelles, ça va être très difficile pour toi. La chute sera très dure. Donc pour te préserver de cette chute là, je préfère que tu te préserves de la joie même. Donc je voulais vraiment explorer cette ce besoin là d’écourter sa joie à tout prix dans ce livre des choses qui arrivent choses qui arrivent vous racontez cette bascule dans la clandestinité parce que vous étiez étudiante ici à Paris et quelque chose auquel finalement vous n’étiez pas préparé vous venez d’une famille d’une classe plutôt supérieure au Comor. Vous parlez d’ailleurs dans le livre de ce que ça représente pour les gens là-bas. Qu’est-ce racontez-nous justement comment vous avez vécu cette période là ? Alors, je l’ai vécu de façon très risible au début comme une forme de déclassement puisque quand on vient justement d’un milieu assez avantageux, quand on arrive dans un pays, c’est un peu comme une reconversion professionnelle finalement, sauf qu’on n’est pas prévenu. Et donc, on arrive avec ce besoin de commencer à zéro. Sauf qu’on n’est pas prévenu qu’il faut recommencer à zéro. Et donc quand on se retrouve dans cette situation là, le on a l’impression d’être prise en flagrant délit d’exister. Je pense qu’on est beaucoup à avoir vécu ce sentiment-là, mais à ne pas s’y attarder parce que justement il faut continuer d’avancer en permanence. Et moi et bien j’ai tout simplement choisi de ne pas continuer à avancer, de ne pas continuer à marcher à marche forcé et de m’arrêter sur ce que je ressentait, de me dire tiens, qu’est-ce que ça donne si moi je décide que la grande histoire me fait aussi ressentir des choses à l’échelle de ma petite histoire à moi. Ouais. Petite histoire. Alors, une perspective très féminine dans votre récit et c’est ça qui est plutôt rare et vous le dites aussi, il y a beaucoup d’histoires sur les clandestins, les hommes qui bravent, voilà, des conditions climatiques, géopolitiques, stratégiqu et cetera. Il y en a très peu sur des femmes. Euh votre livre en ça est a quelque chose de très fort parce qu’il mêle le récit intime évidemment avec cette expérience géopolitique et politique hein, de de l’immigration qui est quand même assez forte. Est-ce que c’est quelque chose qui vous a qui était important pour vous de raconter cette perspective féminine de l’immigration ? Oui, parce qu’en plus, ce n’était pas la première fois que je mettais en place tous ces mécanismes de défense, d’autopréservation, de détermination à la joie. Je l’avais vécu bien avant, c’est pour ça que j’ai aussi voulu plonger là-dedans. Mais je pense que oui, le la figure masculine est très soit adulée, soit accusée. C’est l’un ou l’autre. Et la les figures féminines qui le vivent, elles sont accusées quand même, elles subissent le même traitement, mais il faut aussi les fragiliser. Il y a un côté un peu voilà, un peu vulnérable, un peu fragile, un peu plaintif aussi. On s’attend à ce qu’elle soit en train de se tortiller. Bon voilà, il y a toujours un côté très difficile. Et moi, j’ai voulu m’approprier ce ce sac de courage en bandoulière et tiens voilà et un récit résilient infiné. Euh merci Toufad Moutaré d’être d’être venu ici dans le GTA. Euh choses qui arrivent publié chez Bayard. Restez avec nous car l’actualité continue sur France 24. Euh on vous remercie tous et puis on pense aux gens de Moroni évidemment hein jusqu’à Paris en passant par le Burundi parce que vous avez été absolument au Burundi. Merci beaucoup, c’est la fin de ce journal. [Musique]
Touhfat Mouhtare, écrivaine comorienne, publie “Choses qui arrivent” chez Bayard. Un récit personnel et puissant sur la perte de statut, la vie en clandestinité en France, la peur d’être découverte, mais aussi la résistance par l’amitié et l’écriture. Un témoignage à la première personne qui interroge le droit à la joie, à la dignité et à l’existence.
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