Selon le journal en ligne russe indépendant The Insider, Moscou a acquis des moteurs conçus par les États-Unis et fabriqués en Chine.Objectif : copier leur technologie afin d’équiper des drones fabriqués sur le sol russe.La société incriminée appartient à un oligarque proche du Kremlin.

Quand Moscou plagie le savoir-faire de Washington pour frapper l’Ukraine (nouvelle fenêtre). C’est ce qui ressort d’une enquête de The Insider (nouvelle fenêtre), publiée le 3 novembre : selon le média russe indépendant, l’armée du pays de Vladimir Poutine a acheté en Chine des moteurs conçus par les Américains pour étudier leur conception puis équiper ses drones Shahed.

À l’origine de cet espionnage industriel : Angar-22. Derrière ce nom se cache une société russe qui, en 2024, a acquis en Chine des turboréacteurs Swiwin SW400Pro et SW240B. En clair, des moteurs d’avions qui, la plupart du temps, sont installés sur des modèles réduits d’avions. Signe particulier de la commande ? Elle s’élève à 260.000 euros. Une somme qui permet d’acheter seulement une poignée de moteurs. Impossible d’équiper une flotte de drones, ont estimé les autorités. En revanche, il s’agit d’une quantité d’appareils suffisante pour les démonter et comprendre leur fonctionnement, avant d’élaborer des copies.

Une société déjà sanctionnée par les États-Unis

Autre détail étayant cette thèse : les documents d’importation des moteurs. Ceux-ci précisent qu’ils étaient destinés à “la recherche et au développement, au démontage et à l’étude”. Très vite, les soupçons se sont portés, selon The Insider, sur Angar-22. Surtout que l’entreprise est liée à Oleg Deripaska, un oligarque pro-Kremlin faisant l’objet de sanctions internationales. La société a d’ailleurs déjà été sanctionnée par Washington pour l’achat de moteurs chinois Limbach, eux aussi utilisés sur des drones.

Quelques mois après l’achat de la commande de moteurs en Chine, les autorités ukrainiennes ont retrouvé la trace d’un Swiwin SW800Pro. Celui-ci équipait une munition russe ayant frappé la ville ukrainienne de Poltava au début du mois. Entre-temps, la puissance de l’engin a été dopée, comme l’explique à The Insider l’expert militaire Anatoly Khrapchinsky. “Il suffit de changer les réglages de contrôle pour que le moteur fonctionne à pleine puissance, d’augmenter le flux de carburant et de retirer certaines protections. On obtient ainsi une poussée nettement supérieure, mais le moteur s’use très rapidement, en quelques heures seulement.” Une durée de vie limitée qui ne pose aucun souci pour les drones kamikazes utilisés par Moscou pour frapper Kiev. 

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La présence de technologies étrangères dans l’armée de Vladimir Poutine a régulièrement été dénoncée. En premier par Volodymyr Zelensky : “Lors des frappes massives dans la nuit du 5 octobre, la Russie a utilisé 549 systèmes d’armes contenant 102.785 composants de fabrication étrangère”, avait fustigé le président ukrainien sur les réseaux sociaux. Et le chef d’État de citer les États-Unis, mais aussi la Chine, Taïwan, le Royaume-Uni, l’Allemagne, la Suisse, le Japon, la Corée du Sud et les Pays-Bas, en les accusant de ne pas empêcher ces approvisionnements.

T.G.