Le Luxembourg dispose d’un socle favorable pour l’instauration d’une assemblée citoyenne permanente, conclut la cellule scientifique de la Chambre des députés, après une étude dédiée.

Les initiatives participatives locales et nationales ont été assez souvent expérimentées au Luxembourg. La dernière en date a eu lieu à Leudelange, il y a près d’un mois, sous la forme d’un référendum communal, lors duquel 54,76 % des citoyens en âge de voter se sont prononcés contre le plan de modération massive du trafic présenté par le conseil échevinal, refusant de placer leur localité en zone 30 km/h.

Mais la cellule scientifique de la chambre des députés s’est penchée plus particulièrement sur les dispositifs délibératifs, ces assemblées citoyennes qui vont au-delà de la simple consultation en favorisant une discussion argumentée entre citoyens, souvent tirés au sort, «dans le but de formuler des recommandations éclairées à destination des instances décisionnelles». Avec comme principale interrogation celle de savoir si au Luxembourg, la participation citoyenne pouvait être institutionnalisée, autrement dit, rendue permanente. Un dispositif intégré de manière pérenne au niveau de la Chambre.

L’expérience la plus récente est l’initiative de participation citoyenne «KlimaBiergerRot» lancée en janvier 2022. Ce Bureau du citoyen pour le climat s’inscrivait dans le cadre de la politique luxembourgeoise liée à la lutte contre le réchauffement climatique et avait livré 56 propositions. Certaines ont influencé la mise à jour du Plan national intégré Énergie et changement climatique (PNEC) en 2023.

Les partis politiques favorables

Les partis politiques, dans leur grande majorité, ne sont pas opposés aux assemblées citoyennes. L’étude rappelle que les programmes du parti déi gréng et du DP faisaient directement référence à ce processus, en plaidant pour la mise en place d’une assemblée citoyenne permanente sur le climat. Le Parti pirate soutenait également la création d’une assemblée citoyenne permanente, sans toutefois la restreindre aux politiques climatiques, comme déi Lénk qui voulait l’étendre aux questions urbanistiques.

Le LSAP soutient aussi ces assemblées tout en soulignant qu’elles doivent rester consultatives et ne pas se substituer à la démocratie représentative. À l’inverse, le CSV est resté silencieux sur la participation citoyenne non électorale dans ses programmes récents. Enfin, le parti ADR est resté fidèle à sa ligne en soutenant des référendums contraignants, principalement sur des thèmes souverainistes comme l’immigration et la sécurité. Depuis, tous les partis représentés à la Chambre (sauf l’ADR) ont reconnu la valeur des assemblées citoyennes en tant que complément aux institutions représentatives.

La volonté de formaliser et d’encadrer ces dispositifs, exprimée dans plusieurs motions, reflète une ouverture parlementaire à l’institutionnalisation de la démocratie délibérative. Cette volonté ressort également de l’accord de coalition de 2023 qui affirme que la participation citoyenne sera encouragée dans les politiques climatiques. Les contours précis de celle-ci n’ont pas encore été concrétisés.

Inclusion démocratique

La cellule scientifique qui s’est penchée sur les expériences faites dans d’autres pays, conclut que l’impact de ces dispositifs dépend fortement du suivi et de la volonté politique. Certains cas, comme le dialogue citoyen permanent en communauté germanophone de Belgique, démontrent qu’une intégration institutionnelle bien conçue peut produire des effets concrets sur les politiques publiques.

La force d’un dispositif délibératif réside dans sa capacité à influencer, même indirectement, les politiques publiques. Des procédures de suivi transparentes, incluant des réponses motivées des institutions et la participation de comités citoyens de suivi, pourraient donc être intégrées dès le départ.

Garantir un accès public aux travaux, aux recommandations et aux réponses politiques serait crucial pour préserver la confiance. Sur le plus long terme, une évaluation continue, à des fins d’apprentissage collectif, serait également pertinente pour améliorer le dispositif délibératif mis en place, souligne la cellule scientifique.

Le Luxembourg «dispose d’un socle favorable pour l’instauration d’une assemblée citoyenne permanente», estime-t-elle encore. Dans un pays marqué par une importante diversité démographique et par des inégalités d’accès aux canaux de représentation politique, une institution délibérative permanente pourrait jouer un rôle fondamental d’inclusion démocratique.

Elle permettrait non seulement de renforcer la légitimité du système représentatif, mais aussi de faire émerger des consensus citoyens sur des sujets complexes ou polarisants, conclut l’étude.