De mystérieux postes de police chinois aux Pays-Bas

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  1. **La France abriterait trois structures de ce type, affirme l’ONG Safeguard Defenders.**

    Des postes de police chinois aux Pays-Bas ? Cette affaire n’a rien d’un canular. Et le gouvernement néerlandais est loin de la prendre à la légère. « Le ministère des Affaires étrangères enquête actuellement sur les activités des soi-disant centres de police. Lorsque nous aurons plus de clarté à ce sujet, des mesures appropriées seront prises », a fait savoir mercredi le porte-parole du ministère, affirmant prendre le dossier « très au sérieux ». Les Pays-Bas abriteraient deux postes de police chinois clandestins. Selon RTL Nieuws, le premier poste aurait été ouvert en juin 2018, à Amsterdam, par la police de la région de Lishui (est de la Chine) et serait dirigé par deux anciens policiers chinois installés aux Pays-Bas. Manifestement, ils font des étincelles puisque, toujours selon RTL Nieuws, cette structure figure dans le top 10 des meilleurs postes de police chinois à l’étranger. Un deuxième « commissariat » chinois, dirigé cette fois par un ancien militaire, aurait été ouvert cette année à Rotterdam par la ville chinoise de Fuzhou. Leur mission : traquer les opposants au pouvoir chinois vivant aux Pays-Bas. RTL Niews diffusait, mardi, le témoignage à visage découvert d’un jeune homme installé aux Pays-Bas et qui a beaucoup critiqué Pékin sur les réseaux sociaux. Dans ce témoignage, il raconte par le menu les pressions et les menaces qu’il subit de la police extraterritoriale chinoise. Il affirme ainsi être suivi dans la rue par des agents de cette police clandestine et être appelé par eux pour l’informer de ce que risquent ses parents, si lui-même ne rentre pas rapidement en Chine.

    Alors que le gouvernement chinois a rejeté ces accusations, ces deux postes de police chinois clandestins commencent à faire des vagues aux Pays-Bas, où l’État de droit et la liberté d’opinion sont des valeurs cardinales. Les parlementaires du VVD et de la D66, partenaires de la coalition au pouvoir, réclament la fermeture immédiate des deux commissariats. « Maintenant qu’il est clair que ces deux postes de police secrets opèrent illégalement ici, nous ne pouvons pas attendre un jour de plus. Nous devons arrêter ces activités dès que possible et fermer les postes », a déclaré le député D66 Sjoerd Sjoerdsma.

    En réalité, cette affaire dépasse largement les frontières des Pays-Bas. L’ONG Safeguard Defenders, qui a publié une enquête fouillée sur le sujet en septembre dernier, affirme qu’il y aurait « au moins 54 » postes de police clandestine chinoise dans le monde. Dont pas moins d’une trentaine dans l’UE : 3 en France, tous basés à Paris, 8 en Espagne (Madrid, Barcelone, Valence et Saint-Jacques-de-Compostelle), 4 en Italie, 3 au Portugal, 2 en Hongrie, etc. L’Allemagne, en revanche, ne compterait qu’une seule « antenne » de ce type, installée à Francfort.

    ### «Persuasion de retour»

    Pourrait-il y en avoir davantage dans l’UE et dans le monde ? C’est ce que laisse entendre Laura Harth, directrice de campagne au sein de cette ONG de défense des droits de l’homme basée en Espagne. « Ce nombre de 54 postes de police, explique-t-elle, est basé uniquement sur les récits de deux comtés spécifiques en Chine, dont nous avons pu lier les activités aux opérations de “persuasion de retour” dans lesquelles les structures à l’étranger ont été utilisées. Le comté de Qingtian (province du Zhejiang) semble avoir été le premier à commencer à les mettre en place au premier semestre 2018. Le comté de Fuzhou (province du Fujian) n’a commencé à les mettre en place qu’en janvier de cette année. » Toujours selon Safeguard Defenders, ces postes de police seraient mis en place avec le concours du département du travail du Front uni du Comité central du Parti communiste chinois chargé notamment, et de longue date, de contrôler la communauté chinoise installée à l’étranger. Il s’appuierait sur un réseau d’associations chinoises prenant souvent en charge des activités consulaires : renouvellement des passeports et des permis de conduire notamment. « Il s’agit par exemple des chambres de commerce chinoises ou des associations de villes telle que l’Association de Fuzhou en France pour l’un des postes clandestins créés en France », indique Laura Harth.

    À la suite de la diffusion de ce rapport, les gouvernements de plusieurs pays ont annoncé avoir lancé des enquêtes : Espagne, Portugal, Irlande, République tchèque, Allemagne et… Pays-Bas. À ce stade, à la différence d’autres pays, la France n’aurait pas pris contact avec l’ONG. Rien non plus du côté des institutions européennes alors que la relation Chine-UE a fait l’objet, vendredi matin, d’un long débat entre les Vingt-Sept réunis en sommet à Bruxelles.

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