Par

Antoine Grotteria

Publié le

15 mai 2025 à 6h04

Dans le magasin dépouillé de l’enseigne Hoka, situé au 35 boulevard des Capucines, deux clients élégamment apprêtés posent des questions en espagnol. De l’autre côté de la caisse, les vendeurs peinent à trouver les mots dans la langue de Cervantes. Tant pis. La communication se poursuivra en anglais. « Nous avons beaucoup de touristes étrangers qui font du lèche-vitrine et viennent regarder par curiosité, ou avec une vraie volonté d’acheter nos produits », explique le directeur de la boutique, Jordan. Dans ce quartier doré à la lisière du 1er, 2e et du 9e arrondissement, délimité par l’Opéra-Garnier, l’église de la Madeleine et la place de la Concorde, les visiteurs éphémères côtoient des travailleurs souvent costumés. Ce qui représente des opportunités économiques conséquentes. Les équipementiers sportifs spécialisés dans le textile sophistiqué ne se sont pas trompés. Et ce, portés par le dynamisme de la course à pied.

Allier l’utile au style

En quelques années, cinq entreprises ont ouvert un magasin sur le boulevard des Capucines et de la Madeleine : Salomon, Hoka, Ekosport, Arc’Teryx et Decathlon. Avec une recette souvent similaire, dans laquelle performance, utilité et style se confondent. Chaussures dernier cri, vêtements au graphisme léché… L’offre fait peu cas de distinction.

Chez Salomon et Arc’Teryx, cette proximité n’a rien de surprenant. Les deux enseignes appartiennent au groupe finlandais Amer Sports Oyj, l’un des mastodontes du matériel sportif outdoor. « On est complémentaires », reconnaît le directeur du magasin de la Madeleine, Cédric. « Nous avons une clientèle plus familiale, alors qu’ils sont un peu portés sur les jeunes », explique-t-il.

L'entrée du magasin Salomon, implanté depuis cinq ans dans le quartier.
L’entrée du magasin Salomon, implanté depuis cinq ans dans le quartier. (©AG/ actu Paris)

Très apprécié des grimpeurs et des randonneurs, la marque canadienne est sortie de son relatif anonymat en France pour toucher des urbains en quête de nature.

« Salomon a ouvert la voie. On essaie de le faire à notre manière »

Anna
Responsable de la boutique Arc’Teryx à la Madeleine

Identifiée par un public exigeant, l’entreprise a également choisi le Marais et la Samaritaine pour se développer à Paris.

Hoka, le nouveau venu

De son côté, Hoka a longtemps boudé les capitales européennes, avant de débarquer pour la première fois sur le Vieux Continent, en juin 2024. Détenue par un groupe américain, l’enseigne a vendu ses premières chaussures dans des magasins spécialisés aux États-Unis.

Ekosport a pris ses quartiers parisiens en septembre 2024.
Ekosport a pris ses quartiers parisiens en septembre 2024. (©AG/ actu Paris)

« La marque est très connue là-bas », assure le gérant du magasin, Jordan. Aujourd’hui, des ponts sont créés entre New York et Paris. « Ici, les Jeux olympiques ont fortement contribué à notre essor. Même des débutants viennent nous voir », glisse-t-il. Longtemps réservée à une population de niche, la course à pied s’est ouverte aux quatre vents, notamment en milieu urbain.

D’après l’Observatoire du Running, 12,4 millions de personnes se déclarent pratiquantes. Un chiffre en légère hausse par rapport à 2023, mais inférieur aux records atteints en 2021 (13,4 millions), dans la vague post-Covid. Cet intérêt pour le sport extérieur se traduit par des sommets d’affluence lors de courses prestigieuses, comme le marathon de Paris, qui a attiré plus de 50 000 personnes en avril dernier.

D’autres ouvertures attendues à Paris

À bientôt 32 ans, Victoria fait partie de ces nouveaux adeptes de la course à pied. Cadre dans une grande entreprise, elle court « trois à quatre fois par semaine ». Un rythme qui nécessite un « matériel de qualité ».

« Je vais davantage chercher des running qui durent quelques années, avec un certain prix, que des ‘filets de pêche’ dont l’espérance de vie est de quelques mois »

Victoria
Une pratiquante régulière de la course à pied

C’est la promesse faite par Hoka. « On n’utilise pas de coton, on conçoit uniquement avec du nylon, du polyester et d’autres matériaux plus durables. Pour ce faire, on utilise les moyens technologiques », souffle le directeur du magasin, nonobstant les effets néfastes de ces synthétiques sur l’environnement. Selon lui, les autres enseignes lorgnent leurs fabrications. « Ils nous apprécient. C’est une bonne concurrence », martèle-t-il.

L’industrie du textile du sport devrait ainsi continuer à tisser sa toile. À commencer par la capitale. Decathlon est attendu dans le quartier de Montparnasse, rue de Rennes, où doit également ouvrir le deuxième magasin Ekosport. Ce quartier pourrait bien s’inscrire dans les pas de la Madeleine.

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