C’est une adresse presque secrète, peu connue des Parisiens. Nichée au cœur de Passy, au bout d’une discrète impasse bordée de constructions néo-haussmanniennes, la maison La Roche est un petit bijou de l’architecture moderne. Construite en 1925 par Le Corbusier et Pierre Jeanneret pour Raoul Albert La Roche, un riche banquier et collectionneur originaire de Bâle, elle jouxte une autre maison érigée par le célèbre architecte pour son frère musicien, et qui abrite aujourd’hui la fondation Le Corbusier.

Si la maison La Roche ouvre toute l’année ses portes aux visiteurs sur réservation, il lui arrive aussi ponctuellement d’accueillir entre ses murs des expositions d’art contemporain. À l’occasion de la saison France-Brésil 2025, qui célèbre le bicentenaire des relations diplomatiques entre les deux pays avec une myriade d’événements dans tout l’Hexagone, une vingtaine d’artistes brésiliens modernes et contemporains investissent jusqu’au 8 juin les différentes pièces de la maison, de la cuisine au salon en passant par la chambre à coucher.

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Le Corbusier au Brésil

Intitulé « Aberto4 », l’événement s’inscrit dans un programme d’expositions initié par le conseiller en art Filipe Assis, qui a précédemment investi d’autres demeures remarquables au Brésil, conçues par Oscar Niemeyer, Vilanova Artigas, Ruy Ohtake ou encore Chu Ming Silveira. En s’invitant entre les murs de la maison La Roche, cette première édition internationale entend mettre en lumière les liens entre Le Corbusier et ce pays.

Vue de l’exposition « Aberto4 — Le Brésil après Le Corbusier ». De gauche à droite : Liuba Wolf (sculpture), Sérgio de Camargo (sculpture), Mira Schendel (peinture), Lygia Clark (sculpture), Le Corbusier (peinture)

Vue de l’exposition « Aberto4 — Le Brésil après Le Corbusier ». De gauche à droite : Liuba Wolf (sculpture), Sérgio de Camargo (sculpture), Mira Schendel (peinture), Lygia Clark (sculpture), Le Corbusier (peinture), 2025

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« Aberto4 » met en lumière la façon dont les artistes brésiliens se sont « nourris » des créations de Le Corbusier pour affirmer leur art et leur identité.

Il faut dire qu’au Brésil, l’influence de l’architecte est considérable. Le Corbusier s’y est en effet rendu pas moins de trois fois et y a bien sûr laissé son empreinte tout en contribuant à développer le modernisme brésilien. On lui doit ainsi à Rio le ministère de l’Éducation, réalisé en collaboration avec Lúcio Costa et Oscar Niemeyer. À Paris, l’architecte a aussi conçu la Maison du Brésil, édifice emblématique de la Cité internationale universitaire.

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Un dialogue réussi entre architecture et art

Vue de l’exposition « Aberto4 — Le Brésil après Le Corbusier », sculpture de Mira Schendel

Vue de l’exposition « Aberto4 — Le Brésil après Le Corbusier », sculpture de Mira Schendel, 2025

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Dans la lignée du mouvement anthropophage initié par le poète Oswald de Andrade et la peintre Tarsila do Amaral, « Aberto4 » met en lumière la façon dont les artistes brésiliens se sont « nourris » des créations de Le Corbusier pour affirmer leur art et leur identité, ce dont témoignent particulièrement les œuvres de Beatriz Milhazes (née en 1960), directement inspirées des collages réalisés par l’architecte (qui, au passage, s’est aussi essayé à la peinture et même à la tapisserie), ou encore celles de Sonia Gomes (née en 1948) et de Marina Perez Simão (née en 1980). L’architecture modernisme infuse, quant à elle, un grand tableau de Luiz Zerbini (né en 1959), représentant la façade incurvée et modulaire de l’Edifício Holiday à Recife, mais aussi une petite toile de Juan Araujo (né en 1971) figurant l’emblématique salle ovale du siège parisien du Parti communiste, construit par Niemeyer.

Si la plupart des œuvres exposées ont été réalisées pour l’occasion, des noms historiques de l’art moderne brésilien répondent aussi à l’appel. Lygia Clark (1920–1988), Hélio Oiticica (1937–1980) et Mira Schendel (1919–1988) sont ainsi rassemblés dans la galerie de la maison La Roche, un somptueux salon cathédrale baigné de lumière, où les lignes pures de Le Corbusier font admirablement écho à l’abstraction géométrique de ces grands représentants du mouvement néo-concret. Un hommage subtil, tout en élégance.

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Aberto4 – Le Brésil après Le Corbusier

Du 13 mai 2025 au 8 juin 2025

www.fondationlecorbusier.fr