«La Cour suprême ne veut pas nous laisser chasser les criminels de notre pays. » Avec cette déclaration rageuse publiée en lettres capitales sur son réseau Truth Social, Donald Trump a vivement réagi vendredi à un nouveau revers judiciaire. La Cour suprême, pourtant à majorité conservatrice, a décidé de prolonger le gel de son programme d’expulsions d’immigrés vénézuéliens, en s’opposant à l’utilisation d’une loi d’exception vieille de plus de deux siècles.

Au cœur de la discorde, la loi de 1798 sur les « ennemis étrangers », historiquement réservée aux temps de guerre. Donald Trump l’a invoquée en mars pour justifier l’expulsion de centaines de Vénézuéliens, notamment en ciblant le gang Tren de Aragua, qualifié d’organisation terroriste par Washington. Le jour même, 250 personnes (en majorité des Vénézuéliens accusés d’appartenir à ce gang) avaient été renvoyées vers le Salvador, où plus de la moitié d’entre elles ont été incarcérées dans une prison de haute sécurité réputée pour ses conditions extrêmes.

Première suspension de la Cour suprême en avril

Mais cette stratégie d’expulsions éclair a suscité une série d’obstacles juridiques. Après plusieurs décisions de tribunaux fédéraux, la Cour suprême avait déjà suspendu le 19 avril l’application de cette mesure. Dans une nouvelle décision rendue vendredi, sept des neuf juges, dont le président conservateur John Roberts et les trois magistrats progressistes, ont confirmé cette suspension, estimant que les procédures violeraient les droits fondamentaux des personnes visées.

Les juges ont notamment pointé le caractère trop expéditif du processus : « un préavis d’à peine 24 heures avant l’expulsion, sans fournir d’information sur les droits de la contester », dénoncent-ils. Une précédente décision unanime du 7 avril allait déjà dans ce sens, affirmant que les individus concernés devaient avoir le droit de faire appel et être informés dans un « délai raisonnable ».

Renvoi de l’affaire devant une cour fédérale

La Cour suprême a renvoyé l’affaire devant une cour d’appel fédérale, lui demandant d’évaluer la légalité de l’usage de cette loi et de clarifier les garanties judiciaires offertes aux immigrés. Elle souligne toutefois les enjeux sécuritaires liés à l’immigration et exhorte les juridictions à statuer « rapidement ».

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Déjà très remontée, l’administration Trump avait menacé le 9 mai de « suspendre » les droits de recours des immigrés concernés si la justice continuait à entraver ses projets. Le camp républicain accuse régulièrement les magistrats de « saper les prérogatives du pouvoir exécutif », au moment où Donald Trump fait de la lutte contre l’immigration clandestine un pilier central de sa campagne, dénonçant une prétendue « invasion criminelle » des Etats-Unis.