Par

Augustin Delaporte

Publié le

8 avr. 2025 à 7h44

La feuille de route des cinq prochaines années de la capitale pour sa biodiversité, va être présentée et soumise au vote du Conseil de Paris à venir, prévu du 8 au 11 avril 2025. Mis au point durant deux ans, avec les mairies d’arrondissement, la communauté scientifique et à partir d’une consultation publique, le tout « en cohérence avec le plan climat, le PLU et le plan santé environnement », ce troisième plan biodiversité de la Ville a l’ambition d’être une « stratégie concrète et locale pour défendre le vivant, à Paris et au-delà », pour la période 2025-2030. En voici les contours, dévoilés lors d’une conférence de presse.

Reconstituer des haies et poursuivre la piétonnisation des rues

Dix mesures phares ont été érigées. D’ici 2030, la Ville de Paris se fixe, notamment, de planter des linéaires de haies, « véritable trésor de biodiversité », allant de 500 mètres jusqu’à plusieurs kilomètres dans les arrondissements de la capitale. 360 nouvelles cours oasis vont également voir le jour dans les écoles, crèches et collèges afin de « donner l’accès à 100 % des élèves à un espace de nature dans leur école ou à proximité ».

En ce sens, la Ville compte aussi déployer des « aires éducatives parisiennes », en lien avec l’Office Français de la Biodiversité et plus particulièrement près de la Seine et des canaux parisiens.  

La végétalisation et la piétonnisation de 500 nouvelles rues, validées par la votation citoyenne du 23 mars dernier, fait partie des priorités du plan biodiversité 2025-2030. Celle-ci est imbriquée dans l’objectif plus large, d’atteindre 30 % du territoire parisien perméable et végétalisé dans les cinq ans. 

Lutter contre le morcellement des bois parisiens

Ce troisième plan prévoit la création de 100 nouveaux quartiers comprenant des aménagements dédiés à certaines espèces, comme le hérisson d’Europe ou les chauves-souris. En parallèle, 40 nouveaux espaces refuges de biodiversité et de gites, composés intégralement de flore régionale, vont être déployés. 

Regorgeant d’espèces animales, végétales, de champignons et de lichens, dont certaines sont protégées, les bois de Boulogne et de Vincennes sont aujourd’hui morcelés par les routes.

Une situation sur laquelle la Ville de Paris compte avoir de l’impact, en poursuivant sa stratégie de désimperméabilisation et de végétalisation de ces espaces, comme sur les routes de Suresnes, du Pesage ou de Saint-Hubert. Ainsi, le plan entrevoit de fermer de nouvelles voies et d’augmenter de 10 % la surface des zones de réserve dans les bois, via la mise en défens de parcelles. 

Désimperméabiliser et végétaliser les quais de Seine

En lien avec la communauté scientifique et le monde associatif, la Ville a annoncé mettre au point un baromètre de la biodiversité à Paris. Sa création sera accompagnée de diverses actions, tel que la multiplication des programmes d’inventaires et diagnostics sur les espaces naturels, ou le développement d’études spécifiques sur la biodiversité en milieu urbain, etc. 

Autre mesure majeure : Paris projette de multiplier les jardins flottants, radeaux végétalisés et frayères sur la Seine, mais aussi de désimperméabiliser et végétaliser les quais « là où il est possible de le faire », afin d’envisager « une continuité piétonne de biodiversité, allant du bois de Vincennes au bois de Boulogne ».

Aujourd’hui, le fleuve compte 36 espèces de poissons (recensées entre 2010 et 2024) et sert d’axe de déplacement pour de nombreux oiseaux, chauves-souris et pour le végétal, dont les graines sont dispersées par les flots et le vent.

Créer des jardins de pluie, mares, rivières et bassins végétalisés

Différents projets concernant la trame bleue parisienne, formée par l’ensemble des milieux humides (la Seine, les canaux, les lacs et berges des bois, etc.), sont prévus.

Paris, qui compte déjà 180 mares, veut en créer d’autres, notamment dans les parcs et jardins de moins d’un hectare qui n’en disposent pas encore.

En 2025, une nouvelle rivière doit voir le jour dans la plaine Mortemart, au bois de Vincennes, tandis que des études pour le prolongement de la rivière sèche du bois de Boulogne jusqu’au fossé du Saut du Loup et la renaissance progressive de la Bièvres sont également dans les tuyaux.

Façonner un urbanisme parisien favorable à la biodiversité 

Le plan biodiversité consacre le « bâti en tant que support de végétalisation ». Dans la continuité du PLU bioclimatique (adopté en novembre 2024) et du plan arbre (adopté en octobre 2021), la Ville de Paris aspire à végétaliser 40 hectares supplémentaires de surfaces bâties, publiques et privées, d’ici 2030.

L’exécutif planifie de financer la végétalisation de 100 copropriétés privées, grâce, notamment, au dispositif lancé en 2023, Copr’Oasis. Dans le même temps, celui-ci introduit dans le plan un nouvel outil d’autoévaluation, le BiodivScore, à destination des concepteurs et aménageurs, afin de les aider à jauger « la qualité écologique de leur proje »t et à « identifier les points à renforcer ».

84 projets locaux au programme 

Ultime mesure phare, la Ville de Paris se targue de « devenir la première capitale à s’engager à calculer son empreinte biodiversité », en intégrant cette mesure à son plan 2025-2030. Cette dernière couvrira à la fois « l’empreinte domestique », mais aussi « l’empreinte importée », qui concerne la production des biens et services consommés par la population ou l’administration parisienne.

La Ville se donne, enfin, l’objectif de réorienter 100 % des dépenses identifiées comme défavorables à la biodiversité vers des achats et financements plus vertueux d’ici 2030.

En parallèle de ces mesures, 84 projets locaux ont été définis par les mairies d’arrondissement. Et la Ville annonce le lancement d’une expérimentation de solution d’éclairage intelligent sur 10 sites, visant à suivre l’impact de cet éclairage sur la présence de 3 espèces cibles : les papillons de la nuit, les chauves-souris, ainsi que les poissons.  

Un plan… sans budget

Le talon d’Achille de ce nouveau plan biodiversité, le troisième depuis 2011, réside dans le fait qu’il n’est pas règlementaire et qu’il n’a, de fait, pas de budget.

Fatoumata Koné, présidente du groupe Les Écologistes, qui a largement œuvré à sa conception, concédait lors du point presse : « J’espère qu’on y arrivera, à ce qu’il soit comme le PLU, ou le plan climat, qu’il soit budgété et pas qu’un plan de communication… Il y a plein de propositions, mais il est vrai qu’on ne sait pas encore, concrètement, comment elles seront financées ». 

Une tâche qui reviendra, en outre, à la prochaine majorité élue en 2026. L’adjoint (Paris en commun) à la maire de Paris en charge de la végétalisation de l’espace public, de la biodiversité et de la condition animale, Christophe Najdovski préférait, lui, se montrer rassurant : « La biodiversité, c’est une approche systémique. Pour un même projet, vous pouvez avoir un impact positif, ou négatif, c’est une priorité politique ».

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