À la tribune du Parc Chanot à Marseille (VIIIe), Édouard Philippe a convié trois influents ténors du coin : la patronne du département Martine Vassal, celui de la région Renaud Muselier et le maire de Nice Christian Estrosi. Les trois ont quitté LR, tout comme le chef d’Horizons. Aucun d’entre eux ne votera donc pour Laurent Wauquiez ou Bruno Retailleau ce week-end mais tous cherchent leur champion de droite pour 2027. Et si c‘était lui, Édouard Philippe ?
« Je suis Renaissance, moi je suis avec Macron, se marre Renaud Muselier devant une salle hilare. On a besoin de travailler ensemble mais il faut additionner, pas d’hégémonie ! » Le message sonne comme un avertissement : que l’ancien Premier ministre ne tente pas d’ores et déjà une OPA sur la droite, et ce à deux ans de la future élection présidentielle. C‘est pourtant bien cela que le candidat déclaré avait en tête, ce samedi, lors de son troisième congrès à Marseille.
« Un timing parfait »
D’abord, avec le choix du casting. Muselier, Estrosi, Vassal sur scène, après Darmanin à Lille il y a deux mois : voilà la droite qu‘Édouard Philippe veut rassembler pour 2027. « Il est le barycentre de tout ce beau monde », assure un proche. Puis, grâce à l’agenda politique. Hasard du calendrier, le président d’Horizons avait prévu d’organiser ce meeting le même week-end que l’élection à la présidence des Républicains. Il l’a donc avancé de vingt-quatre heures. « Un timing parfait », sourit Jean-Marc Zulesi, l’ancien député Renaissance qui vient de prendre sa carte à Horizons. En privé, son entourage veut croire que le choc des images de ce week-end se transformera en atout pour l’ex-Premier ministre : d‘un côté les divisions, de l’autre le rassemblement.
À Marseille, Édouard Philippe livre sa vision de la justice dans un discours aux nombreux marqueurs de droite. Cette fois-ci, c‘est tout sauf un hasard. Quel électeur de Laurent Wauquiez ou de Bruno Retailleau n’applaudirait pas quand le candidat dénonce une justice « interminable de lenteur et hypocrite » ? Quand il assure qu’une « partie de la violence est liée à l’immigration » et que la France « a un problème avec le communautarisme » ? Ou quand il reprend le slogan de campagne de Nicolas Sarkozy en 2007, « Travailler plus pour gagner plus » ?
Au fil de l’allocution d’une heure, le maire du Havre coche les cases d’un « un vrai programme de droite », appuie-t-il, au moment même où son ancien parti, LR, reprend des couleurs.
« Du trumpisme aux petits pieds »
« Édouard Philippe incarne une fermeté concrète et pas populiste », assure le vice-président de son parti, Christian Estrosi. Pour le démontrer, le candidat descend en flammes Laurent Wauquiez : « Les Français ne sont pas dupes de ceux qui font du trumpisme aux petits pieds en rêvant de ressusciter le bagne du comte de Monte-Cristo, à Saint-Pierre-et-Miquelon (…) Du n’importe quoi populiste qui commence en farce et se termine en tragédie. »
Pas sa droite donc, contrairement à celles de Gérald Darmanin et Bruno Retailleau, dont il salue l’action au gouvernement, sans susciter à ce moment-là les applaudissements des près de 2 000 militants. « Sur le terrain, il y a une hype (mode, en français) Retailleau, constate Marine Cazard, cheffe du pôle Jeunes à Horizons, mais qui ne dépasse pas l’électorat déjà convaincu. Édouard va au-delà. »
Des propositions au compte-goutte
Mais pas trop loin non plus. À Bordeaux, Lille puis Marseille, Édouard Philippe se contente, la plupart du temps, de dresser un portrait du pays, « le constat des maux français », selon son conseiller Clément Tonon. Mais les propositions sont distillées au compte-goutte par le candidat. Sur le système judiciaire, l’ancien avocat plaide pour l’exécution des courtes peines, le retour des peines planchers « pour les infractions les plus graves » et la suppression du juge d’application des peines. « La transformation sera massive », promet-il.
En attendant le massif et bruyant programme de droite promis pour le printemps 2026, le patron d’Horizons va poursuivre, à bas bruit, son tour de France des sous-préfectures, avant un nouveau meeting fin août sur la jeunesse et un nouveau livre en septembre, comme l’a révélé début mai le Parisien.
Retour au Parc Chanot. À la fin du meeting, la « Marseillaise » retentit et deux jeunes militants montent sur scène afin d’offrir à Édouard Philippe un maillot de l’Olympique de Marseille. Floqué au dos : le numéro 27, pour 2027. Cette saison, l’OM ne terminera pas premier du championnat. Lui ne vise que cette place.