L’itinéraire
Environ 120 kilomètres et 12 heures de route : ce parcours au dénivelé moyen (environ 500 mètres de dénivelé positif pour autant de négatif), peut se faire en deux ou trois étapes. Il existe deux itinéraires qui varient uniquement sur la fin, à partir de Plouër-sur-Rance : soit gagner Dinard plein nord en restant sur la véloroute 42, et rejoindre Saint-Malo via un bus de mer (entre début avril et mi-novembre) ; soit rejoindre la Vélomaritime à partir de Pleslin, en traversant la Rance par le pont Saint-Hubert et en gagnant Saint-Malo par la rive droite de l’estuaire. Retour possible en train de Saint-Malo à Rennes en TER.

Prisées des citadins et visiteurs qui franchissent le pas de la mobilité douce, les pistes cyclables et véloroutes permettent aujourd’hui de relier de nombreuses villes bretonnes entre elles, bénéficiant de parcours grandioses et parfois méconnus. Parmi ceux-ci, il en est un qui relie la capitale bretonne, Rennes, à la ville maritime la plus proche, Saint-Malo.

Le long des 48 écluses du canal d’Ille-et-Rance

En trois étapes, nous vous proposons de suivre la trace du canal d’Ille-et-Rance au gré de ses 48 écluses, entre ces deux cités historiques. Un voyage haut en couleur à travers la campagne bretillienne et costarmoricaine. Le départ de cette belle randonnée à vélo se fait en plein cœur de Rennes. Officiellement, depuis le pont de la Mission, entre la place de Bretagne et le mail François-Mitterrand. Nous choisissons un démarrage en milieu de matinée pour éviter l’effervescence. Une fois les bagages chargés et solidement arrimés, c’est parti, avec l’envie pressante d’avaler les kilomètres.

En route vers Saint-Malo

En longeant les quais plein nord le long du boulevard de Chézy, nous quittons rapidement le centre-ville. À la croisée de la rue de Saint-Malo, nous suivons le canal Saint-Martin en nous immergeant dans les prairies du même nom, un des joyaux naturels de Rennes. Ayant fait l’objet d’aménagements et mises en valeur ces dernières années, cette coulée verte serpente en plein cœur de ville, permettant de totalement déconnecter et de sortir progressivement de l’agglomération.

La voie verte longe le canal et l’Ille dans ses méandres. Nous alternons les lignes droites et les grandes courbes dans un cadre bucolique.

Nous franchissons finalement la frontière de Rennes en passant sous la rocade nord. Notre fil conducteur se nomme désormais canal d’Ille-et-Rance. Il sera notre compagnon sur une grande partie de la route. Le parcours suit le fil de l’eau et les voies naturelles que sont les vallées. C’est ce qui explique d’ailleurs la proximité récurrente de la voie ferrée qui relie Rennes à Saint-Malo. Détail qui a de l’importance car elle permet de raccourcir éventuellement l’itinéraire en démarrant plus tard ou en terminant plus tôt à partir de l’une des nombreuses petites gares qui animent le chemin.

Point culminant du canal

Dans cette première partie de l’itinéraire, la voie verte longe le canal et l’Ille dans ses méandres. Nous alternons les lignes droites et les grandes courbes dans un cadre bucolique. Au gré des ponts, des écluses, des grands arbres et des hameaux, le paysage défile et nous passons successivement Saint-Grégoire, Betton, Chevaigné, pour atteindre Saint-Germain-sur-Ille, première d’une série de communes portant la rivière en leur nom. Suivront Saint-Médard et enfin Montreuil qui marque un tournant symbolique du parcours, puisque c’est là que nous quittons le cours de l’Ille et prenons la direction de l’ouest. Quelques kilomètres après Montreuil, le canal atteint son point culminant. Il a donc besoin d’apports extérieurs assurés par la rigole du Boulet. Une sorte de grand fossé qui achemine l’eau depuis l’étang du même nom, situé quelques kilomètres au nord-est.

Sur le cours de l’Ille

À proximité de La Ville Morin, le canal s’élargit donc en une réserve d’eau capable d’amortir les variations de niveau. Pour nous, cyclistes, ce col annonce plutôt une bonne nouvelle puisqu’il indique la descente à venir, au moins pour quelque temps. Après la traversée des bois de Tanouarn, le chemin longe le très bel étang de Bazouges-sous-Hédé. À l’ombre des grands hêtres, nous prenons le temps de profiter du calme des lieux. Tout comme l’étang du Boulet et quelques autres, il a été en partie creusé et aménagé pour alimenter le canal.

Gérées par la région, ces pièces d’eau forment aujourd’hui un important réseau d’espaces naturels qui abrite une richesse faunistique et floristique de premier rang. C’est aussi à proximité des étangs que nous passons notre première nuit, dans un gîte tout proche. Pour les plus chanceux ou organisés, des hébergements sont proposés sur des péniches, les pieds dans l’eau…

Cascade d’écluses

Pour cette seconde journée, le parcours démarre en descente, et non des moindres. Entre Bazouges et Hédé, le canal doit s’adapter à une brusque pente qui voit donc une succession d’écluses. Un véritable escalier de navigation qui comprend 11 marches sur environ 2 kilomètres de ligne droite, soit une écluse tous les 200 mètres. C’est dans cette surprenante perspective que l’une des maisons éclusières héberge la Maison du canal, ouverte aux visites en saison. Le chemin reprend son cours au travers d’un paysage boisé et verdoyant. Nous atteignons Tinténiac puis Québriac, passons non loin de La Chapelle-aux-Filtzméens avant d’arriver à Saint-Domineuc. Juste en sortant du bourg, nous passons sous la route nationale 12, assez fréquentée en ce milieu de journée.

Le relief nous conduit en douceur vers la vallée de Dinan. Après Évran, ce sont les eaux de la Rance qui, désormais, nous guideront jusqu’à l’arrivée.

Difficile de ne pas penser alors aux automobilistes en route pour Saint-Malo. Ils y seront dans quelques dizaines de minutes alors que nous devrons patienter jusqu’à demain… Mais que le chemin en vaut la peine. Comme pour nous conforter dans ce choix, un martin-pêcheur glisse juste sous nos yeux et sème nos regards sur la rive opposée. Petit clin d’œil de la nature. Quelques kilomètres plus loin, nous franchissons le village de Trévérien qui marque la frontière avec les Côtes-d’Armor. La prochaine étape se fera donc en terre étrangère…

En route vers Dinan

Drôle de circuit à première vue que de changer de département pour rejoindre Saint-Malo. Trop habitués aux grands axes linéaires qui ont fait fi des courbes naturelles, nous en avons presque oublié la logique paysagère. Pourtant, le relief nous conduit bien, en douceur, vers la vallée de Dinan. À peine franchi Évran que les eaux de la Rance se greffent au canal au niveau de Bétineuc. C’est elle, désormais, qui nous guidera jusqu’à l’arrivée. Nous remontons plein nord sur une ligne droite d’environ 5 kilomètres avant le premier méandre important qui traduit un terrain plus accidenté au niveau du bois de Tressaint. Encore quelques efforts et nous touchons au but de cette journée en arrivant au pied du très joli pont en pierre de Léhon. Celui-ci annonce la couleur de ce petit bourg plein de charme historique, entre son château du 13e siècle et son abbaye.

C’est justement à Dinan, à deux pas d’ici, que nous passons la seconde et dernière nuit de notre itinéraire. La vallée de la Rance Pour cette ultime étape, nous privilégions un départ matinal afin de profiter de l’après-midi à Saint-Malo avant le retour en train. Toujours sur le halage, nous nous engageons dans la vallée de la Rance. Au pied de la vieille ville, tout semble bien calme avant que le passage sous le spectaculaire viaduc nous conduise sur le port, plus animé, qui sépare Dinan de Lanvallay, à l’est.

Du vieux pont au Jerzual

Halte exigée pour une photo depuis le vieux pont moyenâgeux et, pour les plus courageux, détour dans la côte pavée du Jerzual vers la ville haute. Les vieilles pierres nous feraient presque oublier le long chemin qui nous attend encore. Aussi nous nous remettons en selle sur la rive gauche puis bifurquons à droite au bout du port pour suivre le canal. En face, déroulent les marais de la Vieille Rivière, de Landeboulou puis de Chantoiseau, avant l’arrivée sur la plaine de Taden. C’est ainsi que se nomme cet élargissement de la Rance, prisé des oiseaux et des pêcheurs. Mais gare aux imprudents qui sortiraient du chenal de navigation. L’étendue aux allures de lac est en réalité peu profonde et très envasée.

Au nord, le mont Garrot fait obstacle à la Rance et offre un remarquable point de vue sur l’estuaire et sur Saint-Suliac, que nous rejoignons peu après.

Au milieu de la plaine, le petit parking indique le chemin que nous suivons à gauche vers le bourg de Taden. C’en est cette fois bien terminé du chemin de halage et, pour marquer le coup, nous faisons face à une première grosse difficulté sous forme de dénivelé bien marqué ! Il fallait sans doute attendre le dernier jour pour nous réserver ces surprises. À la sortie du bourg, nous suivons un temps la route départementale 12 avant de bifurquer à droite vers la Meffrais puis, 500 mètres plus loin à gauche, pour trouver la voie verte en direction de Dinard. Après Saint-Samson, le chemin passe sous la route nationale 176 et atteint Pleslin. C’est au cœur du bourg que nous choisissons de quitter la voie verte et la véloroute 42 pour bifurquer à droite sur la Vélomaritime, également balisée Euro vélo n°4. un balcon sur l’estuaire Elle suit la D 366 pour rejoindre Plouër-sur-Rance et atteindre le pont Saint-Hubert, qui nous permet de franchir sereinement l’estuaire de la Rance. La rivière d’hier a bien grandi.

Une des plus belles vues du parcours

Depuis le pont, l’estuaire nous offre l’un de ses plus beaux points de vue. Au nord, le mont Garrot fait obstacle à la Rance et domine des prés-salés où se dissimule un ancien camp Viking. Au sud, l’estuaire s’élargit en une plaine en partie couverte par d’importants prés-salés et l’ancienne plage de la Ville-Ger. Nous voici de retour dans le département d’Ille-et-Vilaine, que nous avions quitté la veille. Direction la Ville-es-Nonais puis à gauche vers Saint-Suliac. Se présente alors une longue côte jusqu’au sommet du mont Garreau, qui culmine à plus de 70 mètres. Il offre un remarquable point de vue sur l’estuaire et sur Saint-Suliac que nous rejoignons peu après. Le village est classé parmi les plus beaux de Bretagne et de France. Il le doit en partie aux maisons de terre-neuvas qui s’agglomèrent au-dessus de la cale et qui ne semblent pas avoir pris une ride depuis des siècles.

En sortant du bourg, nous retrouvons la Rance dans le fond du bras de Châteauneuf, au niveau de l’ancien et imposant moulin à marée de Beauchet. Nous longeons ensuite le bras jusqu’à l’autre ancien moulin à marée de Quinard qui se dresse non loin de la route nationale 12. Nous traversons ensuite Saint-Jouan-des- Guérêts puis quelques jolis hameaux situés sur de petits bras de Rance comme Quelmer et Troctin, avant de pénétrer l’agglomération malouine en passant sous la D 168.

Au pied de la belle tour Solidor

Après quelques bifurcations du boulevard de la Rance à la rue Maurice-Noguès, nous longeons le parc de la Briantais puis encore quelques rues avant de franchir l’église Sainte-Croix et aboutir au pied de la splendide tour Solidor. Elle marque l’entrée de l’ancienne cité d’Aleth, la ville qui existait avant la christianisation et l’édification de la ville close de Saint-Malo sur un rocher plus au nord. La traversée du quartier Saint-Servan nous conduit justement au pied des remparts intra-muros en traversant les quais et longeant les bassins du port. C’est là le terme de notre aventure. Nous posons finalement les vélos près de la porte Saint-Vincent et continuons notre visite à pied. Difficile de se refondre dans la masse des visiteurs après ce break de quelques jours à travers la campagne bretonne. Au pied de la statue de Jacques Cartier, nous saluons une dernière fois les eaux de la Rance, qui nous ont guidées jusque-là et se mêlent désormais à la Manche.

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Cet article est paru dans le Bretagne Magazine n°137 (mai-juin 2024)

Où faire une halte ? Où boire un verre ?
De manière générale, le chemin ne passe jamais très loin des bourgs où l’on trouve de quoi se restaurer. Côté hébergement, les sites de réservation habituels proposent des chambres ou des gîtes parfois en bordure de l’itinéraire (bien vérifier la distance entre chaque étape au préalable). Coups de cœur de la rédaction : les bars et guinguettes de Bazouges et Hédé, le port de Dinan, le port de Saint-Suliac, les terrasses au pied de la Tour Solidor, à Saint-Malo.