Giorgia Meloni, Viktor Orban, Robert Fico… Avec un George Simion en Roumanie et un Karol Nawrocki en Pologne, la liste des dirigeants populistes et nationalistes à la tête d’un Etat européen pourrait s’allonger. La Roumanie vote ce dimanche 18 mai pour élire son président, cinq mois après la spectaculaire annulation d’un scrutin entaché de soupçons d’ingérence russe. Le souverainiste George Simion, fervent admirateur de Donald Trump et chef du parti nationaliste AUR, et Nicusor Dan, maire centriste de Bucarest, s’affrontent au second tour pour décrocher le poste. En Pologne, Karol Nawrocki, candidat du PiS, le parti souverainiste et europhobe polonais, pourrait également l’emporter sur le maire de Varsovie, Rafal Trzaskowski, un pro-Union européenne (UE), lors de l’élection présidentielle, dont le premier tour a lieu ce dimanche.

Au-delà des logiques nationales, ces élections montrent qu’une dynamique transfrontalière est de plus en plus présente dans les scrutins, principalement en Europe. Comme le rappelle Le Temps, George Simion a en effet reçu le soutien du Premier ministre Hongrois Viktor Orban et de l’actuel président conservateur polonais Andrzej Duda. Karol Nawrocki a fait campagne avec George Simion et obtenu la bénédiction de Donald Trump. Le quotidien suisse n’est pas loin de parler d’une « Internationale nationaliste » et précise que celle-ci a déjà un contre-projet de réforme de l’UE : « La Grande Réinitialisation : rétablir la souveraineté des Etats membres au XXIe siècle. »

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Il s’agit d’un rapport présenté à huis clos à la Heritage Foundation – le principal laboratoire d’idées de Donald Trump -, le 11 mars 2025 à Washington, par deux think tanks ultraconservateurs hongrois et polonais. Ce document dévoilé par le site d’information Le Grand Continent dresse une véritable feuille de route pour démanteler l’Union européenne de l’intérieur. « Il fait aujourd’hui figure de manuel du parfait petit chimiste livré par Washington pour dynamiter l’Union européenne », estime le chroniqueur du Temps.

« Rendre à l’Europe sa grandeur »

Ce rapport réalisé par le think tank Ordo Iuris Institute for Legal Culture en Pologne et Mathias Corvinus Collegium (MCC) en Hongrie – une institution d’enseignement privée financée par l’Etat hongrois et étroitement liée au gouvernement de Viktor Orban – présente un contre-projet de réforme de l’UE qui vise à « restaurer la démocratie et la souveraineté nationale au centre de la coopération de l’Union et à rendre à l’Europe sa grandeur ». La ligne directrice du rapport est le maintien et l’affirmation des « identités culturelles et historiques » des pays membres de l’UE.

Les auteurs de ce document préconisent de réduire la Commission européenne à un secrétariat général sans pouvoir, autrement dit à une structure strictement technique, tandis que le Parlement européen serait simplement consultatif. Tout pouvoir décisionnel reposerait sur les Etats membres réunis en Conseil. La liste des recommandations comprend également la suppression des symboles européens (drapeau, devise, monnaie, hymne). Les deux think tanks recommandent encore de renommer l’UE « Communauté européenne des nations (ECN) », afin de parer au soi-disant déclin du continent, précise Le Grand Continent. Ces propositions entraîneraient donc un détricotage à toute vitesse de l’édifice économique et juridique européen… Ce qui ne devrait pas déplaire à la Russie de Vladimir Poutine.

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Le Grand Continent précise que l’Ordo Iuris et le Mathias Corvinus Collegium entretiennent tous deux des liens avec le Kremlin : le lobby polonais par l’intermédiaire de groupes comme Agenda Europe et le World Congress of Families (lié à l’oligarque russe proche de Vladimir Poutine, Konstantin Malofeïev) et l’institution hongroise par le biais de l’entreprise pétrolière MOL, qui vend du pétrole russe. Mais, comme l’indique Le Temps, plutôt que d’ingérences russes – à nouveau pointées du doigt en Roumanie et en Pologne -, il s’agit surtout, dans ce cas précis, du travail de sabotage de l’UE mené par l’administration Trump. Elon Musk sur son réseau social X et le vice-président américain J. D. Vance, en février dernier à Munich, avaient donné le ton.