Typhaine Krouch, psychiatre, et Sandrine Le Camus, psychologue, ont toutes les deux regardé la série de Netflix sortie à la mi-mars. Spécialisées dans la santé mentale des adolescents, elles reviennent sur les principaux enjeux de cette série.
Jamie, le personnage principal accusé de meurtre, est âgé de 13 ans. Qu’est-ce que cet âge incarne selon vous ?
Treize ans, c’est la fin de l’enfance et le début de l’adolescence. C’est vraiment une période de grande tension et de vulnérabilité, de désorganisation. Tous les schémas de l’enfance doivent être un peu remaniés et les schémas du futur adulte ne sont pas encore mis en place. Dans les consultations, entre treize et quinze ans, ce sont les âges les plus difficiles. Ils sont encore dans une espèce de rêve d’enfant mais avec un corps et une puissance d’adolescent. Tout ça avec des envies très fortes, très intenses, mais peu de moyens de les réguler. Tout adolescent n’a pas d’autre choix que de vivre cette déconstruction… sans avoir toutes les armes que l’on a à seize ans.
Au cœur de cette affaire de féminicide, il y a le fait de ne pas réussir à séduire les filles, d’être moqué sur les réseaux sociaux. Cela vous semble-t-il être un point de départ réaliste ?
À 13 ans, c’est la première rencontre de l’autre sexe. C’est une période de la vie où, de 12 à 17 ans minimum, l’image que les autres ont de soi prime sur tout le reste. D’où l’ampleur des réseaux sociaux qui peuvent être une source d’opportunités ou de vulnérabilité. C’est une autre forme de regard, encore plus cruel. À un moment donné, ce jeune homme s’est isolé, ces parents n’avaient plus du tout de lien avec lui. Les passages à l’acte peuvent être très fréquents à cet âge.