L’actrice et réalisatrice présente au 78e Festival de Cannes The Phoenician Scheme, le nouveau film de Wes Anderson. L’occasion de participer à l’un des talks Women In Motion, au cours duquel elle s’est confiée sur sa soif de défis.
Son souvenir le plus fort, à Cannes, reste évidemment son prix d’interprétation féminine pour Antichrist, de Lars Von Trier, en 2009. Invité d’un talk Women In Motion, le programme de Kering qui met à l’honneur les femmes qui contribuent à façonner la culture d’aujourd’hui, Charlotte Gainsourg raconte : «Après la projection, j’étais déjà rentrée à Paris et Thierry Frémaux m’a rappelée, me demandant de revenir à Cannes, sans me dire pourquoi. Quand j’ai appris que Lars, lui, n’y serait pas, j’ai commencé à comprendre. » Un prix prestigieux pour un film qui reste cher à son cœur, avec un réalisateur qui lui a également donné l’impulsion de passer derrière la caméra. C’était en 2017, pour le clip de Deadly Valentine, extrait de son album Rest : «Je souhaitais que Lars le réalise or il n’en avait pas le temps. Mais il m’a encouragée à le tourner moi-même, en me disant qu’il allait m’indiquer quoi faire.» Dont acte : Charlotte Gainsbourg signe son premier clip, dans lequel elle place devant la caméra ses deux filles, Alice et Jo.
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Défis répétés
La famille : une notion qui vient évidemment à l’esprit quand on pense à l’actrice et à ses parents, Jane Birkin et Serge Gainsbourg. Et à laquelle elle décidément a voulu consacrer ses débuts derrière la caméra : en 2024, Charlotte Gainsbourg présentait au Festival, dans la section Cannes Première, Jane par Charlotte, un documentaire sur sa mère, disparue en 2023. Un souvenir encore à vif : «Comme elle était très malade, je craignais à tout moment qu’elle ne meure pendant le tournage. J’avais également peur, à Cannes. Mais elle est venue, en hélicoptère.»
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Timide, réservée, Charlotte Gainsbourg a fait du cinéma un espace pour vivre d’autres vies, et explorer d’autres personnalités que la sienne. Alors qu’elle enregistre, à l’âge de 13 ans, le titre Lemon Incest avec Serge Gainsbourg, sa mère l’encourage à faire ses premiers pas d’actrice : «Elle avait pensé que cela me permettrait d’avoir un territoire qui ne soit rien qu’à moi.» A ses débuts, seuls comptaient les films : l’adolescente de L’Effrontée (1985) et de La Petite voleuse (1988) est mal à l’aise avec l’exercice de la promotion, «je ne comprenais pas pourquoi je devais faire toutes ces photos, répondre à toutes ces questions.» Aujourd’hui, l’actrice confie combien sa carrière l’a aidée à prendre confiance en elle, à coups de défis répétés. De 21 grammes, de Alejandro González Iñárritu (2003) à Antichrist, Melancholia (2011) ou Nymphomaniac (2013), trois grands films que lui a offerts Lars Von Trier, les rôles les plus difficiles lui ont permis de s’aventurer sur des terrains accidentés : «J’aime les réalisateurs qui ont un goût pour la provocation car je crois qu’ils me rappellent un peu mon père», a-t-elle confié. Ils lui permettent aussi se dépasser, plus que jamais : «Quand on travaille énormément, qu’on se bat pour quelque chose, on a l’impression de le mériter vraiment.»
Sortir de soi-même
Son défi le plus récent : incarner la directrice d’une compagnie de ballet parisienne, qui organise un échange de danseurs avec une institution new yorkaise dans la série Etoile, disponible sur Prime vidéo. Une pure comédie imaginée par Amy Sherman Palladino, la showrunneuse de Gilmore Girls et de La fabuleuse Madame Maisel, dans laquelle elle interprète, en anglais et en français, des dialogues aussi rebondissants que des sauts de chats : «C’est la première fois que je jouais dans les deux langues. De plus, la comédie est un registre très difficile : tout est une question de rythme, et celui qu’imprime Amy est très rapide.» Quant à son prochain challenge, il s’agira d’incarner Gisèle Halimi dans Gisèle, de Lauriane Escaffre et Yvo Muller. Une figure de la lutte contre l’avortement, dont le plaidoyer contribua à faire changer la loi française, qu’elle avait peur de ne jamais parvenir à incarner : «Je doute beaucoup de moi. D’ailleurs, je ne regarde jamais mes films. J’aime jouer pour sortir de moi-même. Le résultat, je n’ai pas besoin de le voir. Et ne croyez pas que c’est de la modestie, je ne suis pas modeste du tout : je pense juste, sans cesse, à tout ce que j’aurais pu mieux faire.» Ce 18 mai, Charlotte Gainsbourg montera les marches du palais des festivals pour The Phoenician Scheme, le nouveau film de Wes Anderson, dans lequel elle tient le rôle de la première épouse du héros, incarné par Benicio Del Toro. Peut-être repassera-t-elle un jour derrière la caméra. Un nouveau défi, encore une fois.