Par
Juliette Voisin
Publié le
18 mai 2025 à 19h05
C’est par une lettre recommandée que Denis Sanson, commerçant à Beaumont-Hague (Manche), a appris que Mondial Relay ne souhaitait plus travailler avec lui.
« J’ai cru que j’avais fait une connerie ! »
« Deux mois après réception de la lettre, je ne faisais plus partie du réseau », raconte le gérant du garage Auto Primo.
Depuis une quinzaine d’années, son atelier était devenu un Point Relais où les clients pouvaient retirer leur colis issu de commande sur Internet. Il était l’un des seul dans La Hague, un territoire de 11 000 habitants.
J’étais étonné, au début j’ai cru que j’avais fait une connerie !
Denis Sanson, garagiste ancien Point Relais
Mais non, le commerçant subit la décision du spécialiste de la livraison de colis Mondial Relay. En mars 2025, la société a annoncé se séparer d’une partie de ses relais commerçants. Près de 3 500 seraient concernés sur 11 000 au total.
Elle s’explique, voulant « renforcer sa compétitivité en s’adaptant aux nouveaux usages des Français », « dans un contexte d’évolution du marché de la livraison de colis et des habitudes des consommateurs ».
Des nouvelles habitudes
Comme partout en France, à Beaumont-Hague, des lockers, c’est-à-dire des grandes armoires pour les colis, sont apparus il y a trois ans sur le parking de Super U. Ils remplacent désormais entièrement les services du garagiste.
Ce moyen d’envoyer ou de retirer des colis offre de la souplesse aux consommateurs qui peuvent s’en servir 24 heures sur 24 et sept jours sur sept.
Leur utilisation est en plein boom. 42 % des e-acheteurs français ont déjà utilisé un point retrait automatisé, un chiffre en constante progression, en particulier chez les moins de 35 ans, selon la Fevad.
Je trouve que les lockers sont facile d’accès pour le stationnement, que c’est rapide pour déposer ou récupérer un colis et que, comme il n’y a pas d’horaires, c’est selon mon envie. L’avantage, c’est que j’en ai un à 400 mètres de chez moi. J’ai aussi déjà eu des bugs de par ma faute et le service client est sympa et très réactif.
Céline Le Guay, habitante d’Octeville
En contrepartie, Mondial Relay verse 400 euros par mois à Super U comme un loyer qui couvre l’emplacement et les frais d’électricité. « C’est dérisoire. C’est plus rentable pour eux que de payer la commission au colis comme quand nous étions Point Relais à l’accueil du magasin, explique la direction. Ça nous facilite quand même la vie, car avec le développement de la vente en ligne, on avait du mal à suivre. »
Avec des ventes en ligne en constante progression, les casiers automatiques ou lockers, pour envoyer ou retirer un colis, se multiplient. Nombreux sont ceux qui les utilisent, même si beaucoup préfèrent rester fidèles aux commerçants. ©Jean-Paul BARBIER
Côté logistique, le supermarché n’a rien à gérer. « Le transporteur passe tous les matins. Même en cas de problème avec un colis, nous n’intervenons pas, il y a un numéro dédié. » C’est le seul locker Mondial Relay de La Hague, le plus proche étant celui du Leclerc Querqueville.
Je pense qu’il y avait de la place pour tout le monde, les armoires ne peuvent pas contenir de gros colis par exemple.
Denis Sanson, garagiste ancien Point Relais
Un manque à gagner
Cette décision brutale est un manque à gagner pour Denis Sanson qui recevait jusqu’à 100 colis par jour, comme au moment des fêtes. Cette activité annexe lui rapportait entre 200 € et 500 € par mois. Chaque dépôt ou retrait rapportant entre 15 et 30 centimes.
« Ça ne va pas me ruiner. Je préfère vendre des pneus et faire de la mécanique », relativise-t-il. Mais ce grand bavard regrette la perte de lien social que lui apportaient ses passages dans son atelier.
« Jusqu’à 100 personnes par jour ! J’aimais le côté humain, discuter avec les clients. Ce qui m’énerve le plus, c’est qu’ils ont mis ça en place pour sauver les commerces locaux et qu’ils nous jettent, sans qu’on ait notre mot à dire. »
Contacté, Mondial Relay n’a pas donné suite à nos sollicitations.
Denis Sanson, gérant du garage Auto Primo à Beaumont-Hague (Manche), déplore un manque à gagner depuis qu’il n’est plus Point Relais. ©Jean-Paul BARBIER
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