Canal de Suez, Goa, Sri Lanka, passage de l’équateur, ou encore Bali… À admirer ses dessins colorés bien disposés sur une table de la base navale, on s’attendrait presque à voir surgir Tintin ou encore Bob Morane, héros de notre enfance. Vu par le second maître (SM) Céline, alias Nautilustres, navigateur timonier à bord de la frégate Provence, la mission Clemenceau 25 prend des allures de grande aventure maritime.

Pour les 3.000 marins français qui ont participé à ce déploiement exceptionnel, ça en fut une à n’en pas douter. Le SM Céline, que nous avions rencontrée à la fin du mois de novembre dernier (1), quelques jours à peine avant qu’elle n’appareille de Toulon avec le groupe aéronaval (GAN), ne le nie pas. Elle qui avait commencé sa carrière dans les forces sous-marines, a cette fois découvert le monde en grand. Et en Technicolor! « En termes d’inspiration, c’était vraiment super. Pendant cinq mois, tous les jours, j’ai vu des choses différentes. Je n’ai jamais eu peur de la page blanche », confie la jeune femme.

La reconnaissance de ses pairs

Il ne valait mieux pas. Repérée pour son coup de crayon rafraîchissant, le SM Céline était en effet « missionnée » par sa hiérarchie pour raconter à sa manière cette incroyable mission Clemenceau. Alors elle a tout croqué, ou presque. Même ses petits ennuis médicaux qui l’ont conduite pendant deux jours dans l’hôpital du porte-avions Charles-de-Gaulle. « En termes de communication, pour faire connaître la Marine aux jeunes, le travail du SM Céline est très intéressant », commente l’officier communication de la Force d’action navale à Toulon.

Certes, le contrat n’était pas trop contraignant – « en moyenne, une publication sur Instagram toutes les deux semaines », précise l’illustratrice – mais cela venait en plus de ses quarts à la passerelle. « J’ai bien évidemment réalisé les dessins sur mon temps libre. Parfois, j’ai dû sacrifier des heures de sommeil pour finir des planches, mais j’aurais de toute façon tenu un journal personnel », confie le SM Céline.

Des efforts que la reconnaissance de ses pairs lui a vite fait oublier. « En découvrant mon travail, plusieurs marins, ou parfois leurs familles à terre, m’ont passé des commandes. C’est plutôt gratifiant. » Son talent a même dépassé les frontières. Pour preuve, ce marin japonais rencontré alors que le GAN s’était aventuré jusque dans l’océan Pacifique, et que le SM Céline a immortalisé – façon manga – à sa demande.

Rêves polaires

Cerise sur le… bateau, le SM Céline a même eu droit aux honneurs de Cols-Bleus, le magazine de la Marine nationale. « Un moment très particulier », sourit-elle. Si elle garde la tête froide, la jeune femme, encouragée par les commentaires positifs faits sur son travail artistique, aimerait bien faire quelque chose de sa production. Ses dessins sont la promesse d’un très beau carnet de voyage. Avis aux éditeurs.

Mais la SM Céline n’en a pas fini avec le grand large. À l’été, elle rejoindra la Guyane, sa nouvelle affectation, où elle sera à la barre d’un patrouilleur Antilles-Guyane de la Marine nationale. Avant même de traverser l’Atlantique, elle imagine déjà raconter son déménagement. En dessins bien sûr et sur son compte Instagram: Nautilustres.

Un bout de France en Amérique du Sud qui la rapproche de son rêve: « Depuis mes débuts dans la Marine nationale, je rêve de rejoindre l’Astrolabe qui ravitaille les bases en Antarctique. »

1. Voir également nos éditions du 25 novembre 2024.