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Les dirigeants européens se sont empressés de féliciter le centriste roumain Nicușor Dan pour la victoire spectaculaire qu’il a remportée dimanche à la présidentielle sur son rival de droite dure, George Simion.

Durant sa campagne, ce dernier a défendu des valeurs nationalistes et des politiques conservatrices similaires à celles du président américain Donald Trump.

Au contraire, Nicușor Dan – le maire pro-UE et pro-OTAN de Bucarest – s’était engagé à maintenir la Roumanie dans le courant européen et à prolonger son soutien à l’Ukraine voisine. Sa victoire est un énorme soulagement pour l’UE et pour Kyiv dans une période de défis majeurs en Europe.

La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, a offert son soutien pour construire « une Roumanie ouverte et prospère dans une Europe forte ». Le président du Conseil de l’UE, António Costa, a quant à lui qualifié ce résultat de « signal fort de l’attachement des Roumains au projet européen ».

Jean-Michel De Waele, politologue à l’Université ULB de Bruxelles, a déclaré à Euronews que seul le temps nous dira si ce résultat est un revers pour les nationalistes européens, tout en soulignant que les dirigeants ne pouvaient pas ignorer la colère des électeurs anti-establishment.

« Il y a de nombreux problèmes à résoudre. Et les citoyens de l’Union européenne dans cette partie [de l’Europe] ne sont pas convaincus par l’UE », affirme-t-il.

« Après tout, 46 % des citoyens roumains ont voté pour George Simion. L’UE peut donc se réjouir, mais elle ne doit pas oublier et ne doit pas dire que les affaires continuent comme d’habitude ».

Des politiques concrètes et des positions fortes

Les électeurs polonais et portugais se sont également rendus aux urnes ce week-end.

En Pologne, le candidat pro-européen Rafał Trzaskowski a remporté le premier tour, devant le conservateur Karol Nawrocki. Les deux hommes s’affronteront au second tour le 1er juin.

Enfin, au Portugal, l’alliance AD de centre-droitau pouvoir a remporté les élections législatives anticipées, mais n’a pas obtenu la majorité, tandis que le parti d’extrême droite Chega a réalisé des gains records.

Dans le même temps, le PS, parti de gauche, a perdu 20 sièges au Parlement, ce qui a entraîné la démission du chef du parti, Pedro Nuno Santo.

Les partis traditionnels de gauche sont en chute libre dans les trois élections. Jean-Michel De Waele affirme qu’en Roumanie, le manque de soutien du centre-gauche au candidat pro-UE était une surprise majeure.

« Il y a une crise d’identité en Europe et les partis de gauche n’ont pas grand-chose à offrir et ne se remettent pas beaucoup en question », explique l’expert.

« Le PSD roumain est membre du Parti socialiste européen, qui soutient la démocratie, mais c’est tout à fait insuffisant. Je pense donc que cela montre un manque de direction, un manque de leadership ».

Lors du premier tour des élections présidentielles polonaises, deux candidats de droite se sont affrontés, sans concurrent de gauche.

Les partis de gauche ont « perdu le contact avec le public »

Selon Jean-Michel De Waele, les difficultés des partis de centre gauche en Roumanie, en Pologne et au Portugal tiennent au fait qu’ils ont perdu le contact avec leurs électeurs traditionnels.

« Nous le voyons clairement au Portugal. Les régions où le Parti communiste portugais et la gauche étaient forts sont en train d’être dévorées par l’extrême droite », indique l’expert. « Ils ont donc perdu le contact avec le public, ils n’ont plus grand-chose à offrir en termes de discours, de rêve, de projet social. Ils sont en très, très grande difficulté ».

Ces derniers temps, les sociaux-démocrates allemands et hongrois ont également eu du mal à gagner des électeurs face à leurs rivaux de droite ou de centre-droit. Selon Jean-Michel De Waele, cela s’explique en partie par un problème de leadership.

« Je pense que nous avons besoin de dirigeants forts qui osent réellement prendre des mesures. Vous savez, être de gauche aujourd’hui est presque une honte. C’est comme s’il n’y avait plus de fierté, comme si la social-démocratie avait perdu son projet ».

L’expert estime que la crise du leadership est l’une des causes de l’engouement de nombreux électeurs pour les candidats orientés vers l’action.

« Je pense que les citoyens exigent des politiques concrètes et que les gouvernements adoptent des positions fortes. C’est aussi pourquoi […] Donald Trump a tant de succès. Il est ce genre de leader populiste très viril et très fort », explique Jean-Michel De Waele.

« Et je pense que, malheureusement, la gauche modérée ou la droite modérée sont paralysées et n’ont pas de propositions fortes ».