Cette saison n’aura pas été de tout repos pour le Tours VB, et pour son entraîneur Marcelo Fronckowiak en particulier. Pourtant, elle se sera conclue par une demi-finale de Coupe CEV et un titre de champion de France, le 10e de l’histoire du club.
Voilà un bilan des plus solides, qui ne garantit néanmoins pas la poursuite de l’aventure à Tours du coach brésilien, arrivé en 2021 et qui a encore un an de contrat. Un sujet sur lequel il n’a pas voulu s’épancher à l’heure de tirer le bilan des dix mois écoulés. Entretien.
Marcelo, quelle image ou quel sentiment domine trois jours après ce titre de champion ?
« Sur le moment, c’est le bonheur, le Graal, etc. Avec un peu de recul, c’est un travail de longue haleine. C’est l’aboutissement de quatre ans. Quatre ans de finales où l’on a réussi beaucoup mais où il y a eu aussi des moments délicats. Ce titre, c’est le constat que le travail paye, que la capacité était toujours là. Moi, je n’ai jamais paniqué en début d’année. Il fallait absolument faire la part des choses parce qu’il y avait Zeljko (Coric) qui était suspendu de façon injuste pour le début de saison ; Sclater qui était blessé, Roland Gergye aussi ; il y a eu l’engagement d’Egleskalns, l’arrivée de Meyer et une situation de gestion physique pour Gabin qui n’était pas au top. À partir du moment où l’on avait toutes ces situations autour de nous, mais que l’on a continué à travailler correctement, cela a commencé à payer. »
Eu égard à tout cela, au fait aussi que Pascal Foussard ne soit plus là et qu’il aura été remplacé pendant quatre mois seulement, avec l’éviction ensuite de Frantz Granvorka, diriez-vous que c’est le titre le plus laborieux, dans le sens de travail et de difficultés ?
« Bien sûr, oui, surtout qu’on a des pics de performance en décembre et que cela ne dure pas puisqu’on se fait éliminer un mois plus tard en Coupe de France : on part à Montpellier après un résultat très important contre Tourcoing et on se fait balader… À ce moment-là, on a encore Sclater blessé et l’absence de Leo (Aracaju, blessé à l’épaule). »
Quand la bascule s’opère-t-elle pour vous ?
« Je pense qu’on avait à cœur de finir (la phase régulière) contre Nice avec un message. On savait qu’on allait croiser cette équipe en quarts de finale, seul l’avantage du terrain pouvait s’inverser selon le résultat. Et ce jour-là, on a montré les dents, on a commencé à récolter les fruits de tout ce vécu qui nous a endurcis. Cette victoire contre Nice est expéditive, magnifique. »
Le fait que dans ce groupe il y ait eu, certes beaucoup de jeunes, mais aussi des joueurs très pros, capables de laisser les affects de côté, vous a-t-il également permis d’aller au bout en dépit de tous les obstacles ?
« Je pense qu’il y avait pas mal de joueurs de métier. Au bout d’un moment, on s’est dit “ on s’entraîne bien ”. Je rends hommage ici à Thomas Soulier (le préparateur physique) parce que l’équipe, physiquement, est arrivée au top. C’est aussi le résultat d’une discussion qu’on avait eue après ma première saison à Tours (2021-2022), lors de laquelle on s’est pensé capable de tout gagner et dont la fin était horrible (défaites en finales de la Coupe CEV, la Coupe de France et le championnat). Nous, le staff, on s’est dit “ on sait le faire, on est capable de le faire ”. On a ciblé beaucoup de choses, concernant des détails à améliorer, comme le service par exemple ; j’ai insisté sur le système de défense ; on est revenu sur des entraînements techniques pour que l’équipe puisse être au top là-dessus.
« Il y a aussi le niveau de Luca (Ramon) qui monte énormément jusqu’à son match en finale à Poitiers, qui est une référence incroyable. Ou Antoine Pothron qui, sachant très tôt qu’il allait partir, a pris les choses en main. Et puis, il y a Strehlau. J’ai reçu un message qui m’a fait chaud au cœur de Silvano Prandi (l’entraîneur de Chaumont) qui m’a félicité pour ce résultat et pour le courage que j’avais eu de titulariser Strehlau. »
Justement, cette saison aura été aussi marquée par le fait que deux jeunes joueurs, Strehlau et Voss, finissent titulaires. Ce n’est pas rien…
« J’ai une histoire intéressante au long de ma carrière avec des jeunes joueurs. À Tourcoing, par exemple, avec Nicolas Maréchal, Jean-Stéphane Tolar ou Yann Lavallez, qui a eu sa première opportunité d’être titulaire avec moi. Au Brésil, j’ai eu Raphael Oliveira, qui est ensuite devenu quatre fois champion du monde avec Trentino. Il ne faut pas oublier que l’on a constitué cette équipe avec deux réceptionnaires-attaquants de force, Gergye et Strehlau, et deux de base, Pothron et Quiroga. Or, on a été contraint de jouer une partie de la saison avec deux réceptionnaires-attaquants de base. La défaite contre Rzeszów (demi-finale de la Coupe CEV) nous a montré qu’il fallait quelque chose de différent. Et c’est là que Strehlau, vraiment, a pris sa place. »
Cette demi-finale retour aura-t-elle aussi piqué dans leur orgueil les joueurs, alors que le club avait fait le choix de ménager ses cadres en ne les envoyant pas à Montpellier ?
« C’est un élément déclencheur, surtout pour ceux qui ont vécu beaucoup de choses avant. Je pense que c’est un élément intéressant pour Zeljko (Coric), Leo (Aracaju) ou nous, le staff. C’est-à-dire que l’on s’était déjà confronté à des situations comme ça les années précédentes et où l’on avait perdu : Monza, Berlin, Friedrichshafen, le golden set contre Saint-Nazaire… Il y a des moments où l’on est là, où l’on rate et où l’on se disait “ putain, on est malheureux, on est malchanceux ”. »
Il fallait avoir de la confiance et c’était le cas pour moi, très sincèrement
Marcelo Fronckowiak
Du coup, après Rzeszów, c’est plutôt “ il faut que ça s’arrête ” ?
« Exactement ! Quand on gagne contre Montpellier la demi-finale aller du championnat, j’avais parlé de sérénité. Il fallait avoir de la confiance et c’était le cas pour moi, très sincèrement. »
Tout cela finit sur des play-offs en totale maîtrise, même s’il y a la demi-finale retour perdue, à Grenon, contre Montpellier…
« C’est le seul jour où, je pense, on s’est mis beaucoup de pression. Lors de tous les autres matchs, même s’il y a eu des choses délicates, l’équipe n’a pas perdu le nord. Tout le monde s’est dit “ on en est capable ”. »
Cette saison vous aura-t-elle poussé à vous questionner plus encore comme coach ?
« J’ai commencé à faire un truc qui m’a beaucoup aidé : depuis deux mois et demi, je suis suivi par un psychologue et je suis fier de le faire. Je me recentre énormément. J’ai refusé de répéter certains schémas que j’ai déjà connus et j’ai cherché l’équilibre. J’ai évité de tomber dans le piège de la fierté, de la connerie. Le plus important, c’était d’arriver en finale du championnat et de le gagner. »
Si on avait perdu cette finale-là, je pense que cela m’aurait pesé très lourd
Marcelo Fronckowiak
Cette saison va laisser des marques ?
« Beaucoup, elle va surtout laisser une qualification en Ligue des champions, une quatrième finale d’affilée pour le Tours VB ; pour moi, un bilan de finales gagnées et perdues de 4-4. Samedi, avant la finale, j’ai dit aux joueurs qu’on a tous la marque du TVB en nous et que c’est à nous maintenant de laisser notre marque au TVB. Et je pense que c’est ce qu’on a fait : on a laissé notre marque avec le 10e titre, avec huit finales disputées en quatre ans, avec des joueurs jeunes qui maintenant occupent une place très importante, des joueurs expérimentés qui confirment qu’ils sont bons, qu’ils étaient bien des mecs de métier. »
Cela rend fier l’entraîneur ?
« Je suis fier, mais je n’ai pas la grosse tête. Si on avait perdu cette finale-là, je pense que cela m’aurait pesé très lourd. »
Vous enchaînez directement avec la sélection du Brésil, en tant qu’adjoint…
« Je suis fatigué, mais j’ai hâte ! On repart pratiquement de zéro quant aux joueurs. C’est passionnant et je suis très content de la façon dont on partage les choses avec les membres du staff. C’est un moment de bonheur. »
Vous comme François Bruneau avez confié être en discussion pour la suite. Pouvez-vous en dire plus ?
« Je peux vous dire que cette discussion existe et qu’il y a des instances beaucoup plus importantes que moi pour y répondre. »
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« On ne peut pas remplacer comme ça Pascal Foussard »
À la question de savoir si le dossier « manageur », avec la présence de Frantz Granvorka – novice sur ce poste – jusqu’à fin novembre et l’absence ensuite d’un remplaçant, avait pu impacter cette saison, Marcelo Fronckowiak a répondu « oui » et donné sa vision des choses. « On ne peut pas remplacer comme ça Pascal Foussard. Il est tellement important dans l’histoire du club, dans l’histoire du volley français et dans le volley mondial. Peut-être que le club n’a pas vraiment perçu l’ampleur de l’impact de l’absence de Pascal. Frantz est un personnage super important du volley français, je trouve malheureux qu’on en soit arrivé là, mais bon… Cela nous a ajouté à tous des tâches supplémentaires qui sont du boulot d’un manageur et qui allaient au-delà des périmètres de chacun. »
À ce jour, François Bruneau, le président du TVB, travaille toujours sur ce délicat sujet, aucun manageur n’ayant encore été annoncé pour l’an prochain.