Par
Nicolas Zaugra
Publié le
21 mai 2025 à 12h34
; mis à jour le 21 mai 2025 à 12h40
C’est un rapport « choc » et inflammable sur l’activité des Frères musulmans en France réalisé par les services de l’État qui est examiné ce mercredi 21 mai 2025 par Emmanuel Macron et plusieurs ministres en conseil de défense. Les principaux éléments dévoilés mardi par Le Figaro pointent une « menace pour la cohésion nationale » avec le développement d’un islamisme « par le bas ».
Dans la métropole de Lyon, ce rapport, qui va être rendu public, pointe le rôle de l’école musulmane Al Kindi, installée à Décines qui a fait l’objet d’une rupture de contrat avec l’État mais aussi la mosquée de Villeurbanne. Des associations sont aussi surveillées de près. Ce que révèle ce rapport dont tout le monde parle.
L’école musulmane de Décines et une mosquée pointées du doigt
Dans le rapport, l’État pointe le rôle de l’école Al Kindi de Décines qui mêle primaire, collège et lycée.
Les éléments recueillis sur le lycée Al Kindi, installé à Décines près de Lyon, pourraient conduire la préfecture à engager des « procédures à son encontre », selon ce document, qui affirme que cet établissement « élitiste », qui « scolarise 608 élèves », « constitue avec la mosquée de Villeurbanne l’une des fondations principales de la mouvance frériste du Rhône ».
Le document note que le mouvement effectue d’importants investissements « dans le secteur éducatif (qui) se déploie dans un contexte d’augmentation continue des atteintes à la laïcité recensées en milieu scolaire, alimentées par l’activité des prédicateurs en ligne ».
« Accusations diffamantes »
L’école de Décines est engagé dans un bras de fer juridique avec les services de la préfecture du Rhône qui a obtenu la résiliation du contrat entre l’école religieuse et l’État.
Les juges ont confirmé en mars les manquements reprochés à Al-Kindi, dont la non-conformité au programme et la présence d’ouvrages séparatistes, justifiant ainsi la résiliation du contrat. Des arguments rejetés par la direction de l’importante école musulmane.
L’avocat d’Al-Kindi, Me Sefen Guez Guez, avait dénoncé au tribunal des « accusations diffamantes » et « insupportables » compte tenu des « mesures correctrices » prises par l’établissement (retrait des livres problématiques, rupture du contrat de l’enseignant contesté, modification du règlement intérieur, etc.).
La préfecture dénonçait la présence de sept ouvrages qualifiés de « séparatistes » au CDI, un règlement intérieur différent pour les filles et les garçons, des propos problématiques tenus par un professeur sur sa chaîne YouTube…
Contactée par actu Lyon ce mercredi à propos de ce rapport, la direction de l’école n’est pas encore revenue vers nous pour s’exprimer.
La mosquée de Villeurbanne était injoignable pour réagir aux accusations.
Une école « noyautée par les Frères musulmans »
Selon la directrice des libertés publiques et des affaires juridiques du Rhône, Pascale Léglise, l’école est « noyautée par les Frères musulmans » et inculque à ses élèves « une vision fondamentaliste et séparatiste » de la société.
Le groupe scolaire compte d’ailleurs bien récupérer son contrat avec l’État et les subventions qui vont avec lors d’une nouvelle audience judiciaire prévue dans les prochains mois.
En attendant, il continue de dénoncer un « acharnement ». La direction doit trouver 1,8 million d’euros. Elle compte sur une hausse de 20% des frais de scolarité et une cagnotte qui a déjà rassemblé 400 000 euros.
Une « cinquantaine d’associations musulmanes » inquiète
Selon l’État, « une cinquantaine d’associations musulmanes (…) affichant plus généralement une sensibilité frériste sont recensées » dans la région lyonnaise.
Deux mosquées importantes, dont celle de Villeurbanne (le rapport ne cite pas l’autre), inquiètent aussi les autorités.
Selon les éléments du Figaro, dans ces associations, les religieux sont influents dans de nombreux domaines « du caritatif et de l’humanitaire, la formation religieuse, la famille, le mariage, l’insertion professionnelle, l’entrepreneuriat musulman, la protection des consommateurs, le service à la personne, la formation pour adultes » mais aussi la « lutte contre l’islamophobie ».
Le document s’appuie sur la présence dans le Rhône de l’UJM (Union des Jeunes musulmans), du centre Tawhid, de la mosquée Othmane de Villeurbanne et du complexe socioculturel de Décines.
Cette emprise totale se traduit par une « rigorisation de la pratique religieuse avec un nombre très élevé de jeunes filles portant l’abaya et l’augmentation massive et visible de petites filles portant le voile », s’inquiète le rapport.
De nombreuses réactions politiques
La publication à venir de ce rapport provoque en tout cas des réactions politiques en cascade, surtout à droite, en France comme dans le Rhône.
La députée RN du Rhône Tiffany Joncour, dont l’école de Décines se situe sur sa circonscription, dénonce un rapport « accablant ». Elle appelle « les services de l’État, en particulier la préfecture du Rhône, à engager immédiatement toutes les démarches nécessaires à la fermeture de l’établissement » et exige « une enquête complète sur l’origine de ses financements ».
Le ministre de l’Intérieur quant à lui pointe « un islamisme à bas bruit qui se répand notamment en tentant d’entrer et d’infiltrer les associations sportives, culturelles, sociales ou autres ».
Gabriel Attal, en réponse au rapport, veut interdire le voile islamique pour les moins de 15 ans tandis que François Ruffin prend le contre-pied en affirmant que « le rapport dit qu’il y a un sentiment d’islamophobie et même d’une islamophobie d’État et que les croyants, les pratiquants, ne sont pas traités à égalité, mais sont traités à part avec des lois à part. Et là, ce que fait précisément Gabriel Attal, c’est ça ».
Les députés LFI et écologistes du Rhône quant à eux n’ont pas encore publiquement pris la parole.
Le gouvernement devrait annoncer des mesures après le conseil de défense de ce mercredi matin, certaines rendues publiques, d’autres classifiées. Dans le Rhône, la préfète va-t-elle aller jusqu’à une fermeture de l’école de Décines ? L’État n’a pas encore communiqué.
Suivez toute l’actualité de vos villes et médias favoris en vous inscrivant à Mon Actu.