Par
Lisa Rodrigues
Publié le
21 mai 2025 à 14h48
Trop de personnes à la rue, alors qu’environ 1 750 logements sont vacants à Grenoble. C’est à partir de ce constat que la Ville a décidé de frapper fort.
La mairie a écrit il y a quelques jours à la préfète de l’Isère, Catherine Séguin, pour lui demander de réquisitionner des logements vacants pour mettre à l’abri des familles sans domicile. En cas de refus, l’équipe d’Éric Piolle (Les Écologistes) a affirmé, en marge du conseil municipal du lundi 19 mai, qu’elle prendra les devants et assurera elle-même la réquisition de logements.
« En 2022, on a déjà porté une délibération pour lancer la possibilité de réquisitionner des logements vacants pour le compte de la préfecture », rembobine Céline Deslattes, conseillère déléguée à la grande précarité, contactée par actu Grenoble. « Là, on est passé à l’étape supérieure, car ce n’est plus tenable. »
Un arrêté qui pourrait être pris d’ici début juin
En mars dernier, le tribunal administratif de Grenoble a déjà condamné l’État à indemniser la Ville pour l’avance de frais de mises à l’abri de familles.
Une décision qui a encouragé l’équipe municipale à aller plus loin et à brandir cette possibilité de prendre un arrêté municipal pour réquisitionner les logements vacants. « C’est une procédure très encadrée » enclenchée dans le cadre « d’une urgence sociale » pour mettre à l’abri de personnes vulnérables, insiste Céline Deslattes.
La procédure de réquisition d’un logement
La réquisition de logement est encadrée par la loi et ne peut, normalement, être réalisée que par un représentant de l’État, comme le préfet. Elle donne forcément lieu à une indemnisation du propriétaire.
Dans le cas de Grenoble, si la mairie venait à s’emparer du sujet, elle prendrait en charge cette indemnisation, ainsi que les fluides et les assurances des logements.
La préfecture ayant normalement la compétence sur le sujet, la Ville de Grenoble lui a donc envoyé un courrier pour lui demander d’activer cette procédure, pour le moment resté sans réponse. Contactée par actu Grenoble, la préfecture de l’Isère indique n’avoir « pas de commentaires à faire » sur le sujet.
L’arrêté municipal est prêt et, sans retour de la préfecture, pourrait être publié « dans les trois semaines à venir », estime Céline Deslattes.
Des familles hébergées dans les écoles
Toutefois, la conseillère déléguée l’assure, « il est hors de question qu’en réquisitionnant les logements, on mette en danger des familles » en proposant aux personnes vulnérables des habitations insalubres, ou en réquisitionnant des logements qui s’apprêtent à être loués.
Ces logements pourraient bénéficier aux sept familles (soit environ 60 personnes, adultes et enfants) actuellement hébergées dans différentes écoles de la ville.
Depuis trois ans, 80 familles ont été hébergées et accompagnées par des parents d’élèves volontaires. Les familles dorment dans les salles de motricité, donc elles doivent sortir à 6h pour le ménage et ne reviennent que le soir…
Céline Deslattes
Conseillère déléguée à la grande précarité de Grenoble
« On attend les actes »
Alors forcément, la réquisition de logement est saluée par les représentants des parents d’élèves et des collectifs prenant en charge les familles dans les écoles.
« C’est un début de réponse. On se réjouit de cela, mais on attend les actes », indique à la rédaction Samira Dadache, secrétaire départementale de la FCPE et administratrice nationale de l’association en charge de la question des enfants à la rue.
Si la FCPE travaille de concert avec la mairie – et depuis peu avec Grenoble-Alpes Métropole – sur l’accompagnement des familles sans abri, « on aimerait bien que la préfète s’empare du sujet et que le Département fasse aussi son travail de protection de l’enfance. On se retrouve quand même avec plusieurs mamans et enfants à la rue ! »
Plus de 200 enfants à la rue à Grenoble
Selon le décompte de la mairie, 4 400 personnes sont aujourd’hui sans domicile fixe à Grenoble. Parmi eux, ils sont 1 200 à vivre à la rue, dont 240 enfants. Et les chiffres ne s’améliorent pas.
On a de plus en plus de femmes seules avec des enfants. Encore la semaine dernière, on a eu trois jeunes femmes qui vivaient à la rue, dont une était sur le point d’accoucher.
Céline Deslattes
Conseillère déléguée à la grande précarité de Grenoble
C’est normalement de la compétence de l’État de gérer les hébergements d’urgence et les mises à l’abri de personnes vulnérables, notamment des mineurs. Un rôle qu’il « ne joue pas », assène l’élue.
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