« Des criminels sans scrupule qui exploitent la vulnérabilité », estime la préfecture

Gabriel Morin, directeur de cabinet du préfet de Bretagne, chargé notamment des questions de sécurité : « L’Éducation nationale est très attentive à la problématique des mineurs qui tombent dans le trafic. Nous conduisons, avec les forces de sécurité, des opérations aux abords et parfois dans les établissements scolaires, qui sont assez frappantes pour les enfants. Il s’agit de montrer qu’on est là et qu’un collège, ce n’est pas le Far West. Il y a évidemment une réponse sociale à apporter. Certains mineurs peuvent relever de la protection de l’enfance ou plutôt du judiciaire. Il s’agit de vérifier si des mesures sont nécessaires pour que ces enfants retrouvent un cadre d’éducation normal. Leur place est à l’école ou dans des structures d’accompagnement. Pas dans la rue, à faire les guetteurs pour des criminels sans scrupule qui exploitent leur vulnérabilité. L’emploi d’enfants sur les points de deal rend ce trafic encore plus abject ».

« Certaines méthodes de Rennes commencent à s’exporter ailleurs », s’alarme Alliance

Julien Le Cam, référent Bretagne du syndicat Alliance : « Les dealers préfèrent mettre des très jeunes car c’est une main-d’œuvre qui coûte moins cher. Et la justice ne peut pas les poursuivre. Pour le moment, ces pratiques extrêmes de recrutement d’enfants sont réservées à Rennes, qui reste la ville la plus délicate en Bretagne en matière de stupéfiants. L’inquiétude, c’est que cela se généralise car il y a toujours un décalage. On voit que certaines méthodes, qu’on pensait cantonnées à Rennes, commencent déjà à s’exporter ailleurs dans la région. On a vu, par exemple, des tirs à Quimper et Morlaix, où c’était impossible d’imaginer cela il y a encore quelques mois. L’utilisation des armes se répand. Et le problème, c’est que l’État n’anticipe pas. Le trafic de stupéfiants est en train de changer la face de toute la délinquance. Les commissariats bretons sont calibrés sur celle des années 90 ».

« Certaines mères seules n’ont pas le temps de s’occuper de leur enfant », pointe SGP-Police

David Leveau, secrétaire régional de SGP-Police : « L’emploi de guetteurs dès 13-14 ans est monnaie courante même si le recrutement des très jeunes semble, pour le moment, circonscrit à Rennes. Mais je crains aussi que cela arrive ailleurs en Bretagne. Il y a clairement un problème dans l’éducation des enfants. On a des familles débordées, qui ne savent plus quoi faire de leur gamin. Certaines mères les élèvent seules, ont un ou deux emplois pour pouvoir vivre et n’ont pas le temps de s’en occuper. C’est une problématique que l’on observe sur l’ensemble du territoire. Et si on ne travaille pas là-dessus, on n’y arrivera pas. D’autant qu’on voit ces vidéos de dealers qui se multiplient sur les réseaux sociaux qui ont pour but d’attirer, de montrer qu’il n’y a rien à craindre de la justice, en empruntant les codes des clips de rap. Ils occultent tout le côté négatif et le risque de le payer de sa vie. La police arrive en bout de la chaîne, quand c’est trop tard ».